Intervention de Guy Geoffroy

Séance en hémicycle du 25 avril 2013 à 9h30
Application de l'article 11 de la constitution — Présentation commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuy Geoffroy, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des lois, mes chers collègues, j'ai l'honneur de rapporter pour la seconde fois devant cette assemblée ces projets de lois, organique et simple, visant à enfin mettre en oeuvre les dispositions nouvelles de l'article 11 de la Constitution telles qu'elles résultent de la révision de juillet 2008.

Presque cinq ans se sont écoulés, et la disposition dont nous débattons est la seule à ne pas encore avoir été mise en oeuvre. Nous conviendrons tous qu'il ne faut plus tarder à présent. Nous avons exprimé les uns et les autres les raisons qui ont conduit à ce délai trop long. Nous pourrions nous en renvoyer la responsabilité, mais aujourd'hui l'essentiel est de trouver les voies d'un progrès, comme nous y a invité le ministre. Certains trouveront que ce progrès qui a été inscrit dans notre loi fondamentale est limité et insuffisant, d'autres le jugeront inutile.

Le ministre a rappelé l'objet de ce texte. Il faut que nos concitoyens sachent bien qu'il ne s'agit pas de mettre en place un référendum d'initiative populaire. L'initiative de ce référendum appartient au Parlement, plus précisément à un cinquième de ses membres. La part non négligeable prise par le peuple dans la mise en oeuvre de ces dispositions consiste dans le soutien populaire apporté par l'intermédiaire des pétitions de 10 % des électeurs inscrits.

Nous pouvons donc parler, bien que la formule ne soit pas non plus la mieux appropriée, d'un référendum dont l'initiative est partagée. Il serait préférable de dire que l'initiative en appartient au Parlement et qu'elle est soutenue par une dixième de nos concitoyens électeurs.

Il y a dix-huit mois, nous avions eu un débat sur le fond en première lecture. Nos collègues qui étaient alors dans l'opposition avaient refusé de participer au vote sans s'opposer au projet en lui-même. Ils avaient ainsi manifesté leur volonté de témoigner de l'insuffisance des dispositions de l'article 11 à leurs yeux. De son côté, la majorité avait adopté le texte au bénéfice de quelques améliorations que le rapporteur que j'étais s'était permis de leur proposer.

Depuis, un changement de législature est survenu, et le texte a été examiné en première lecture au Sénat. Le ministre a fidèlement rappelé les conditions dans lesquelles le Sénat avait pris ce texte en charge pour le modifier profondément. Seul l'article 20 a été adopté conforme par nos deux assemblées.

Le travail du Sénat a été original, complexe, et a apporté certaines modifications méritées et que nous souhaitons faire nôtres. D'autres sont moins pertinentes, plus éloignées de la philosophie et de la lettre du texte, et méritent probablement d'être revues.

Afin d'avancer, et partant du constat que le Sénat avait adopté ce texte à l'unanimité de ses groupes et avec l'approbation du Gouvernement, j'ai souhaité proposer à l'Assemblée un vote conforme. En cela je m'appuyais sur l'exemple d'un calendrier similaire retenu par le Gouvernement et sa majorité pour l'adoption d'un autre projet de loi en termes identiques. Le Gouvernement et la majorité, d'après ce que j'en ai constaté, ne l'ont pas souhaité.

C'est ce qui m'a conduit, en commission, à exprimer un avis défavorable sur l'ensemble des amendements présentés par le groupe majoritaire. Leur pertinence n'était pas nulle, mais je souhaitais être cohérent avec la volonté que j'avais exprimée d'un vote conforme.

Ceci ne signifie pas que le travail que nous avons effectué en commission soit négatif, bien au contraire. Je proposerai d'ailleurs, avec l'avis favorable de la commission qui s'est réunie ce matin au titre de l'article 88, de compléter et d'améliorer le travail réalisé par la commission lors de son premier examen de ce texte. Peut-être, en coordination avec les amendements de nos collègues du groupe SRC, pourrons-nous faire oeuvre utile pour faire progresser le texte et converger l'Assemblée et le Sénat. Ainsi les dispositions définitives de la loi organique et de la loi simple pourraient être adoptées le plus rapidement possible.

Rappelons brièvement ce que nous n'avons pas souhaité retenir parmi les modifications apportées par le Sénat.

C'est tout d'abord le cas de la novation un peu curieuse consistant à créer un nouveau type de proposition de loi, la proposition de loi d'initiative référendaire. Si l'on peut en comprendre l'esprit, la lettre ne peut pas en être acceptée. Ce serait une négation du texte de l'article 11 de la Constitution que nous avions tenu, en première lecture, à appliquer strictement. Il s'agit d'une initiative référendaire, mais elle prend la forme d'une proposition de loi. Nous ne pouvons pas parler de proposition de loi référendaire, ce n'est pas conforme à la lettre de la Constitution. Notre commission est donc revenue sur cette disposition.

D'autres dispositions ont recueilli notre accord, notamment le rééquilibrage des délais. Porter de trois à six mois le délai de collecte des soutiens semble raisonnable. De même, réduire de six mois la durée du travail parlementaire pour l'examen du texte par chacune des chambres ne semble pas modifier profondément la capacité de ce texte à produire ses effets.

Le Sénat a supprimé la commission de contrôle, et notre assemblée a souhaité la rétablir. Il va falloir améliorer les dispositions sur ce point, et j'espère que notre travail va le permettre.

Nous avons également souhaité rétablir le délai donné au Président de la République pour lancer le référendum et convoquer le corps électoral au terme de la procédure. Nous espérons que toutes ces dispositions pourront trouver un terrain d'entente avec le Gouvernement et nos collègues du Sénat.

Le travail que nous avons à faire aujourd'hui est donc un peu particulier, puisque nous allons faire en séance une partie du travail que nous aurions pu faire en commission si nous n'avions pas eu ce différend sur l'opportunité d'adopter ce texte en termes identiques. Je pense que nous allons pouvoir réaliser ce travail, non pas dans la volonté d'un consensus mou qui n'aurait pas de sens, mais dans celle d'adresser un message clair à nos concitoyens. Nous n'étions pas d'accord au moment de la révision constitutionnelle sur le fond de l'article 11. Maintenant qu'il a été adopté dans ses nouvelles dispositions, il faut que nous soyons en mesure, Gouvernement et Parlement, de donner à nos concitoyens la possibilité d'avoir recours à cette nouvelle procédure. Qu'on l'estime inutile ou dangereuse, ou insuffisante et à développer, nous devons faire ce pas nouveau vers une démocratie directe, et apporter notre concours à une initiative offrant la possibilité à nos concitoyens de voter directement une loi, faute de son examen par le Parlement.

C'est sans aucune malice que je rappelle que la première lecture au Sénat et la deuxième lecture à l'Assemblée résultent de la volonté des parlementaires UMP de chacune des assemblées d'examiner ces textes. Je souhaite, monsieur le ministre, que vous fassiez en sorte que le Gouvernement prenne l'initiative d'une inscription en deuxième lecture au Sénat, en vue d'un vote conforme de nos collègues sénateurs. À défaut, nous aurions à travailler au sein d'une commission mixte paritaire dans les conditions les plus équilibrées et les plus rationnelles possibles. Ainsi, le souhait d'un grand nombre de nos concitoyens de disposer d'un outil nouveau, même s'il est toujours perfectible, serait enfin satisfait.

La commission, son rapporteur, ainsi que l'a majorité et l'opposition, ont souhaité travailler dans un état d'esprit positif. Je forme le voeu que nos travaux permettent d'aboutir, au terme de cette matinée, à un texte qui résume la philosophie qui nous est commune et qui permette aux sénateurs de l'adopter en termes identiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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