Intervention de Gérald Darmanin

Séance en hémicycle du 25 avril 2013 à 9h30
Application de l'article 11 de la constitution — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérald Darmanin :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je veux tout d'abord saluer l'excellent travail de notre rapporteur.

Vous l'avez souligné, monsieur le président de la commission : il est à la fois rare et intéressant de pouvoir prendre un peu de temps pour discuter de notre Constitution et de notre cadre institutionnel de manière générale. Quoi de mieux que de le faire autour de l'idée de référendum ?

La Cinquième République est un régime à la fois légitime et efficace. Certains veulent modifier sa Constitution. Nous l'avons beaucoup modifiée depuis 1958 ; elle reste cependant un texte qui permet à tous les gouvernements, quels qu'ils soient, de faire face à des problèmes nationaux et internationaux importants, et qui permet au Président de la République, au Gouvernement et au Parlement de s'exprimer et de conduire notre pays sur les voies de l'intérêt général.

En tant qu'orateur principal du groupe UMP sur ces textes, j'articulerai mon propos autour de trois axes. Cette discussion est, tout d'abord, l'occasion de reparler de notre conception du référendum devant notre assemblée. J'aborderai ensuite les nouveaux droits introduits par la réforme de 2008 voulue par le Président Sarkozy. J'évoquerai enfin le contexte politique dans lequel nous étudions ces projets de loi, à l'initiative du groupe UMP.

Ce n'est un secret pour personne : notre famille politique est très attachée au référendum, qui représente l'arbitrage national voulu par le Général de Gaulle. La Constitution, directement adoptée par les Français, prévoit que la souveraineté s'exprime par les représentants du peuple, mais aussi par la voix du peuple lui-même. Le général de Gaulle disait : « la souveraineté nationale, c'est le peuple exerçant sa souveraineté sans entrave ». Notre Constitution prévoit effectivement que cette souveraineté puisse s'exprimer par la voie du référendum.

Je regrette que M. Tourret ne soit pas présent dans l'hémicycle : j'aurais aimé évoquer avec lui la question du plébiscite, qu'il a largement mise en avant dans ses dernières interventions – mais vous l'avez aussi évoquée, monsieur le ministre. Que serait un régime politique qui n'aurait pas la confiance du peuple ? Il ne faut pas avoir peur du peuple ! Il me semble que M. Tourret, dans sa détestation du référendum, déteste également le suffrage universel direct pour l'élection du Président de la République, comme nous l'avons constaté lors d'un récent débat parlementaire.

Quand mon collègue Tourret reviendra et prendra la parole, je pense qu'il se souviendra que c'est grâce aux voix des radicaux que la réforme de 2008 proposée par le Président de la République a pu être adoptée. (Sourires.) Sans les radicaux, qui sont les amis politiques de M. Tourret, nous ne serions peut-être pas en train de discuter du référendum d'initiative partagée.

Le président Urvoas a eu tout à fait raison de rappeler la cohérence des positions des différents groupes politiques. M. Tourret devrait comprendre pourquoi ses collègues politiques ont voté la réforme de 2008, et pourquoi les radicaux du Sénat ont voté en faveur des textes dont nous discutons aujourd'hui.

J'en viens aux nouveaux droits introduits par la réforme constitutionnelle de 2008. Monsieur le ministre, chers collègues du groupe socialiste, nous sommes assez étonnés que, alors que souhaitez toujours créer de nouveaux droits – on l'a vu lors des derniers débats parlementaires –, vous refusiez désormais de donner rapidement un droit à nos concitoyens. M. le rapporteur a eu raison de le souligner : cinq ans, c'est trop long.

La réforme constitutionnelle a introduit un nouveau droit : celui, pour une partie du peuple, de demander à ses représentants d'étudier une question à l'Assemblée nationale et au Sénat. Je ne comprends pas très bien la logique qui consiste à vouloir absolument créer de nouveaux droits sociétaux, tout en considérant que la mise en oeuvre d'une disposition donnant aux Français un nouveau droit sur les textes discutés par leurs représentants puisse être retardée. Nous regrettons que, malgré les petites imperfections des textes adoptés par le Sénat, la majorité ne souhaite pas voter ces projets de loi conformes ; mais puisqu'elle a manifestement l'intention de modifier ces textes, nous pourrons effectivement les améliorer.

La Cinquième République a été beaucoup critiquée, par les radicaux mais aussi par certains socialistes, pour son parlementarisme rationalisé. Même s'il ne s'agit pas d'un référendum d'initiative populaire, ce référendum est tout de même rationalisé – il est, en tout cas, très encadré. Personnellement, je partage les critiques inverses : j'aurais préféré que le peuple puisse proposer sans entraves à ses représentants de se saisir d'un texte. Les nombreux garde-fous mis en place par ces deux projets de loi montrent que l'utilisation de cette procédure ne pourra pas susciter de grandes craintes. Le président de la commission a raison de dire que ce sont les grands partis de notre vie politique – si ce n'est les deux plus grands d'entre eux – qui permettront la mise en oeuvre de cette initiative. Dans la réforme institutionnelle qui sera présentée par le Gouvernement, l'une des seules avancées sera sans doute l'élection d'un certain nombre de députés à la proportionnelle : ce mode de scrutin contribuera peut-être à la diversification des parlementaires, lesquels pourront, de manière moins partisane, permettre l'inscription de certains textes cosignés par les électeurs à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.

Monsieur le ministre, nous avons du mal à comprendre le contexte politique. Ou peut-être le comprenons-nous trop ! Lors des débats au Sénat, le Gouvernement avait approuvé ces textes, qui ont été adoptés à l'unanimité – le compte rendu en fait foi. Or, depuis le vote du Sénat, la position du Gouvernement a changé : ces textes ne lui conviennent plus tout à fait. Sans doute est-ce pour calmer le jeu politique, en lien avec d'autres projets de loi récemment discutés dans cet hémicycle et qui intéressent directement le peuple. Sans doute votre volonté de retarder un peu la mise en oeuvre de cette réforme de 2008 a-t-elle un lien direct avec la loi ouvrant le mariage et l'adoption aux couples homosexuels – je n'oserais évoquer la question de l'amnistie sociale défendue par nos amis communistes. Je pense que vous cherchez à gagner du temps, monsieur le ministre : c'est dommage.

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