Intervention de Benoist Apparu

Séance en hémicycle du 24 septembre 2012 à 16h00
Mobilisation du foncier public en faveur du logement et renforcement des obligations de production de logement social — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBenoist Apparu :

Vous allez obliger les communes à faire du logement social pour rattraper leur retard et payer le moins d'amendes possibles, mais au détriment du logement privé, notamment à la fin des périodes triennales, du fait de vos obligations de production.

Ainsi, la critique principale que nous formulons à l'encontre de votre projet de loi, c'est qu'il ne répond en rien aux objectifs quantitatifs que vous vous êtes fixés. Il est pourtant nécessaire d'atteindre ces objectifs car, tant que nous n'aurons pas résolu la question de l'offre et de la demande dans les territoires tendus, les prix continueront de progresser. Vous pourrez encadrer les loyers autant que vous le souhaitez et nous proposer une loi sur la question en mars prochain, cela ne changera en rien l'équation si vous n'augmentez pas la production. Or votre texte ne permettra aucunement d'augmenter la production de logements pour les raisons que je viens d'évoquer.

J'émettrai une autre critique. Si votre texte traite de questions importantes pour le logement social, comme les coûts de production – au sujet desquels nous ferons bien évidemment des contre-propositions pour vous démontrer que l'on peut obtenir le même résultat sans brader le patrimoine de l'État, notamment grâce au bail emphytéotique –, ou encore la question de la mixité sociale, il oublie des pans entiers de la politique publique en faveur du logement social. Vous renvoyez ces aspects à une date ultérieure, assez peu définie.

Quant au contenu de votre projet de loi, au-delà des critiques que je viens de formuler, nous vous en proposerons plusieurs modifications, par le biais d'amendements.

En premier lieu, nous pensons qu'il existe une alternative à votre proposition de gratuité du foncier public. Nous l'avons formulée en commission : il s'agit du bail emphytéotique. Vous nous répondrez que c'est ce que préconise l'amendement de Daniel Goldberg adopté par la commission. Mais vous reconnaissez vous-même, madame la rapporteure, que cet amendement a beau être sympathique, il n'est en rien normatif et ne génère aucune obligation pour quiconque.

Vous proposez une décote de 100 % des terrains, dès lors qu'ils sont donnés aux collectivités locales. Nous considérons que ce don aux collectivités est une erreur, à l'heure où l'État a besoin de ces recettes pour combler son déficit. Nous proposons donc de passer par le bail emphytéotique, pour un résultat économique identique, puisque nous réduisons les coûts de production d'un logement social de la part des charges foncières afférentes à la construction, tout en permettant à l'État de conserver la propriété du bien et de le vendre dans vingt, trente ou cinquante ans. Pour la même efficacité économique, notre solution permet de sauvegarder les recettes budgétaires dont l'État à besoin.

Si vous refusez le bail emphytéotique, nous proposons alors – et je suis en cela Michel Piron – une décote qui n'excède pas 50 %. En effet, si nous comprenons la nécessité de réduire les coûts de production, nous ne voyons pas au nom de quoi la production de logement social serait exonérée de charges foncières dans certains territoires. Je ne connais aucune opération immobilière qui s'effectue sans charge foncière, et c'est normal. Quand la charge foncière est élevée, comme c'est le cas en Île-de-France ou en région PACA, réduisons-la, mais pas au-delà de 50 %, comme le propose notre amendement, afin de ne pas brader les terrains publics.

J'en viens à la deuxième partie de votre texte, à savoir l'obligation de production de logements sociaux en plus grand nombre et le passage de 20 à 25 % du taux de la loi SRU, pour me livrer, là encore, à quelques contre-propositions.

Je suis, à titre personnel et conformément au projet de l'UMP, favorable à cette augmentation, mais à certaines conditions, notamment celle d'y intégrer l'accession à la propriété. Il y a sur ce point-là une différence fondamentale entre nous. Pour ce qui nous concerne, nous considérons que l'essentiel, c'est de permettre à ceux qui n'ont pas les moyens de se loger dans le secteur privé d'accéder à un logement aidé. Telle est à nos yeux la vocation même du logement social.

Imaginons un couple, M. et Mme Durand, et leurs deux enfants. Ils disposent d'un revenu de 2 000 euros par mois, ce qui les situe sous le plafond des logements HLM. Or, selon votre mode de calcul, dès lors que ce couple est locataire en HLM, il entre dans le calcul de la loi SRU, tandis que s'il bénéficie d'un logement aidé via le prêt social location accession, le PSLA, il n'est pas pris en compte.

Je ne comprends pas cette idéologie selon laquelle un logement aidé en location est un logement social et ressortit à la mixité, tandis que le même logement, fabriqué par un bailleur social mais propriété d'un ménage disposant des mêmes revenus, ne relève plus de la mixité et n'est pas décompté au titre de la loi SRU ! Il y a là une différence d'approche majeure entre nous. Nous considérons en effet que l'accession sociale à la propriété doit faire partie du décompte de la loi SRU.

Vous ne souhaitez pas intégrer dans le calcul historique de la loi SRU le PSLA dans les 20 % : dont acte. Mais rien n'empêche d'imaginer, pour reprendre là encore une préconisation faite par Michel Piron en commission, que l'on intègre, lors du passage de 20 à 25 %, le PSLA pour les productions futures. D'autant que vous acceptez, à l'article 1er, de décompter le PSLA pour la gratuité des terrains publics.

Je répète que, pour nous, la mixité ne dépend pas du statut d'occupation d'un logement – en location ou en propriété – mais bel et bien des revenus du ménage occupant. Si ses revenus sont faibles ou modestes et ne permettent pas au ménage de se loger dans le secteur privé, il est logique qu'il bénéficie d'un logement social, en location ou en propriété. C'est une différence majeure entre votre position et la nôtre.

Je veux également vous dire que, pour nous, la mixité marche dans les deux sens. Je considère, comme plusieurs d'entre nous, que les collectivités locales qui possèdent moins de 5 % de logements sociaux doivent fournir un effort de production. Car la mixité, c'est permettre à chacun de se loger.

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