Intervention de Cécile Duflot

Séance en hémicycle du 21 mai 2013 à 15h00
Autorisation de légiférer pour accélérer les projets de construction

Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement :

Nous devons promouvoir la ville dense, afin de lutter contre l'étalement urbain et l'artificialisation des sols. L'urgence de la construction de logements est compatible avec la protection de l'environnement. Nous ne souhaitons pas nous engager dans une logique de productivisme urbain aveugle, mais bien mobiliser toutes les ressources de notre intelligence collective pour donner enfin sa chance à l'écologie urbaine.

Il faut de la nature en ville pour faire droit à la biodiversité et rendre la densité non seulement acceptable mais aussi souhaitable. Tandis que la densité urbaine permet la qualité des services, des équipements et des réseaux, la nature en ville préserve les respirations et la qualité du cadre de vie. Il faut tout à la fois plus de logements, et plus de logements de qualité. C'est le sens des politiques que nous aurons à conduire au service de la rénovation énergétique.

Vous l'aurez compris, si le Président de la République a choisi – comme il l'a annoncé le 21 mars dernier à Alfortville – de procéder par ordonnances, c'est pour utiliser toutes les possibilités d'accélération offertes par le droit. Au sens propre du terme, nous pouvons dire qu'ici nécessité fait loi.

Le projet de loi que je vous présente aujourd'hui est l'un des fruits de ce plan d'investissement. Son objectif, très simple, consiste à lever aussi vite que possible les principaux freins identifiés à la construction de logements.

Ces freins sont de tous ordres : souvent financiers, parfois techniques, la plupart d'entre eux trouvent leur source commune dans l'empilement des procédures, la complexité des dispositifs et l'absence de lisibilité d'ensemble du droit de l'urbanisme, qui mettent en jeu la sécurité juridique des projets.

L'habilitation que vous demande aujourd'hui le Gouvernement cible une série de sujets identifiés lors des vastes concertations menées à l'occasion de la préparation du projet de loi sur le logement et l'urbanisme que je déposerai bientôt sur le bureau du Parlement. Je vous les présenterai en détail tout à l'heure lorsque nous en débattrons, mais je veux, à ce stade, dire un mot rapide de quelques-unes d'entre elles.

Les professionnels, les élus, mais aussi les citoyens se plaignent de l'empilement dans le temps des procédures relatives à la construction de logements. Le Gouvernement vous propose donc de l'habiliter pour lui permettre de bâtir une procédure intégrée concernant le logement, qui fusionne les délais plutôt que de les compiler. C'est une question de cohérence.

Il vous propose aussi d'améliorer l'accès aux documents d'urbanisme à travers la création d'un portail national de l'urbanisme où professionnels comme particuliers pourront trouver les renseignements utiles pour déterminer facilement la constructibilité d'un terrain et envisager ainsi plus facilement les projets aux endroits les plus opportuns. C'est une question de transparence.

Le Gouvernement souhaite également faciliter le financement de projets d'aménagement, en particulier les plus complexes d'entre eux, en permettant aux collectivités territoriales d'augmenter le taux maximal de garantie d'emprunt qu'elles peuvent consentir. C'est une question de mobilisation.

Tout le monde s'accorde à dire aujourd'hui qu'il est urgent de réduire le délai de traitement des recours contentieux et de lutter efficacement contre les recours de type mafieux qui se multiplient contre les permis de construire. Il vous est proposé d'habiliter le Gouvernement à prendre une ordonnance à cette fin ; elle se fondera sur les conclusions du rapport que m'a remis le président Labetoulle, juriste et grand spécialiste de ces questions. Ce n'est au fond rien d'autre qu'une question de démocratie.

J'en ai présenté le contenu au Président de la République. Voilà ce que je peux d'ores et déjà vous en dire.

Pour lutter contre les recours regardés comme abusifs, je proposerai un encadrement équilibré de l'intérêt à agir des personnes pour s'assurer que les motifs fondant le recours sont bien liés à l'urbanisme.

J'envisage aussi d'ouvrir au titulaire du permis de construire une action en dommages et intérêts contre l'auteur d'un recours dont l'introduction serait à l'origine d'un préjudice anormal. Si cette proposition constituera un moyen de dissuasion très puissant, elle doit évidemment, pour être juste, viser exclusivement les recours malveillants, qui n'ont d'autre fondement que l'intérêt financier. Les associations agréées pour la protection de l'environnement n'auront donc pas vocation à en être l'objet.

Une troisième proposition, qui me paraît très forte, consiste à déclarer à l'administration fiscale les transactions qui aboutissent à un désistement monnayé du recours contre un permis de construire, sous peine de nullité de la transaction. J'ai toujours cru, en la matière, au pouvoir dissuasif de l'administration fiscale.

Pour raccourcir les délais de traitement des recours, la quatrième proposition, parmi les plus puissantes, consistera à conférer au juge la possibilité de fixer une date au-delà de laquelle de nouveaux moyens d'annulation du permis ne pourront plus être invoqués. On ne pourra plus égrener les moyens, en gardant les meilleurs pour la fin, dans le seul but de ralentir sans fin la procédure.

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