Intervention de Patrick Yeni

Réunion du 15 mai 2013 à 9h00
Commission des affaires sociales

Patrick Yeni, président du Conseil national du sida :

Madame la présidente, mes collaborateurs et moi-même sommes extrêmement honorés de venir aujourd'hui devant vous et de constater, à la faveur de cette invitation, l'intérêt que vous portez aux questions relatives à l'infection à VIHsida.

Dans votre introduction, vous avez rappelé ce qu'est le Conseil national du sida : une structure créée en 1989, qui n'a rien à voir avec la réflexion menée sur le soin ou la recherche, mais qui est spécifiquement orientée vers les problèmes de politique générale concernant le VIHsida. Cette orientation se traduit dans la composition du conseil, qui réunit des membres de la société civile, parmi lesquels relativement peu de médecins et des personnes venant d'horizons très divers, au-delà de la médecine, à la croisée des sciences sociales et de l'éthique.

Le conseil émet des avis et des recommandations, soit sur saisine des pouvoirs publics, soit de sa propre initiative. Ces avis sont distribués à tous les acteurs de la lutte contre le VIH.

La création du conseil était tout à fait justifiée par la singularité de cette épidémie, pour laquelle, à l'époque, il n'y avait pas vraiment de traitement actif en cours. Mais cette singularité persiste – et ce sera mon premier point – même si son profil s'est un peu modifié.

Tout d'abord, la discrimination reste présente. Les enjeux éthiques liés à cette discrimination ont été au premier plan de certains avis récents émis par le conseil, que cette discrimination continue à s'exercer envers les personnes infectées par le virus, ou envers les personnes appartenant à des populations particulièrement exposées au risque d'infection par le VIH. Je fais référence aux avis sur les restrictions d'accès aux opérations funéraires des personnes décédées infectées par le VIH, et sur la nécessité d'une réflexion autour des questions posées par l'anonymat du dépistage de l'infection. Il est important de garantir cet anonymat mais, en même temps, celui-ci rend plus difficile la transition vers le soin des personnes dépistées.

Ensuite, on observe aujourd'hui un contraste entre l'efficacité à contenir l'infection chez une personne atteinte grâce aux progrès thérapeutiques considérables qui ont été accomplis et l'inefficacité des mesures préventives visant à contenir la transmission de l'infection d'une personne à une autre. L'épidémie de l'infection au VIH reste aussi active qu'il y a une dizaine d'années, et la persistance de cette activité de l'épidémie a conduit à renouveler les concepts préventifs en associant aux méthodes traditionnelles le dépistage et le traitement.

Le Conseil national du sida s'est parfaitement inscrit dans cette logique en produisant, il y a quelques années, un avis demandant l'élargissement du dépistage de l'infection par le VIH et, plus récemment, en émettant des avis, d'une part sur le rôle du traitement comme élément de prévention de la transmission du VIH, et d'autre part sur l'utilisation des autotests diagnostics pour élargir les perspectives de dépistage.

Le troisième élément de singularité réside dans la multiplicité des acteurs engagés d'une façon ou d'une autre dans la lutte contre l'épidémie. Je ne vise pas seulement le personnel responsable des soins et, au-delà, des associations. Je vise également les personnes qui, pour les pouvoirs publics, sont en charge de réfléchir sur les caractéristiques de l'encadrement des populations particulièrement à risque – migrants, personnes prostituées, etc. Cette multiplicité conduit parfois à s'interroger sur la cohérence des politiques publiques. Par exemple, dans les mesures prises à l'égard de certaines populations – précisément les migrants et les personnes prostituées – l'objectif de santé publique peut ne pas être pris en compte.

Le quatrième et dernier élément de singularité de l'épidémie VIHsida est le caractère international et solidaire de la lutte contre l'épidémie. Je pense en particulier à la contribution au financement de la lutte contre l'épidémie dans les pays démunis. En ce domaine, notre pays est en pointe. Trouver des financements devient de plus en plus difficile. Or la France contribue depuis longtemps et avec efficacité à la recherche de financements innovants. Le conseil s'implique dans cette réflexion sur les financements innovants de la solidarité avec les pays démunis, en produisant des avis et des notes et en participant à des colloques internationaux sur ce thème.

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