Intervention de Patrick Hetzel

Séance en hémicycle du 23 mai 2013 à 21h30
Projet de loi relatif à l'enseignement supérieur et à la recherche — Article 18, amendement 175

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Hetzel :

Je salue vos bonnes lectures, madame la ministre, et je ne peux pas vous blâmer de lire mon rapport. Vous avez noté qu'il y avait une certaine cohérence. Nous avons essayé de la mettre en oeuvre au cours des dernières années, et j'espère que ce sera toujours le cas pour notre enseignement supérieur et notre recherche.

Certaines choses ont été dites, qui sont fausses.

Faisons d'abord attention à ne pas perdre de vue le fait que, depuis qu'ils ont été créés, les IUT ont évolué, comme toute la société française. Vouloir revenir aux origines en souhaitant qu'ils assurent la mission qui leur avait été confiée au moment où ils ont été portés sur les fonts baptismaux est à mon avis une erreur. Entre-temps, ils ont évolué, et leurs publics également. Il est important de regarder ce qui se passe dans ces établissements et d'en tirer un certain nombre de conclusions.

Vous avez indiqué, monsieur le rapporteur, que l'objectif était que 50 % d'une classe d'âge soient diplômés d'un bac plus trois. Il y a en réalité des divergences. J'avais retenu que 50 % d'une classe d'âge devaient être diplômés de l'enseignement supérieur, ce qui n'est pas exactement pareil. Les BTS sont des diplômes d'enseignement supérieur, les DUT aussi, et ce ne sont pas systématiquement des bacs plus trois.

Sur les IUT à proprement parler, j'entends dire que les bacheliers généraux veulent tous poursuivre des études longues. Non, ce n'est pas le cas. Effectivement, deux tiers des étudiants d'IUT poursuivent leurs études, mais en filière courte. La très grande majorité d'entre eux fait une licence professionnelle et va ensuite travailler.

Les IUT ont mis en place progressivement le LMD, en relation d'ailleurs avec l'écosystème universitaire, mais cela ne s'est pas fait de la même manière dans les filières industrielles et les filières tertiaires. Prétendre que tous les diplômés d'IUT voudraient poursuivre leurs études et, a fortiori, aller vers des études longues, c'est une erreur. En réalité, la très grande majorité d'entre eux fait simplement une année supplémentaire.

Et d'ailleurs le fait que certains de ces jeunes poursuivent leurs études, c'est aussi une sécurisation. N'oublions pas qu'un certain nombre d'entre eux sont d'origine modeste, je l'ai vu lorsque j'étais recteur. Les familles sont à la recherche d'une sécurisation des parcours, et les IUT jouent à cet égard un rôle essentiel. Les stigmatiser aujourd'hui en prévoyant des quotas, c'est leur dire qu'ils ont dérivé. Ce n'est pas eux qui ont dérivé ! Il ne faut pas les stigmatiser.

Venons-en à la réussite étudiante. Oui, c'est une question essentielle mais, qu'on le veuille ou non, même si le baccalauréat a trois formes, avec des bacheliers généraux, des bacheliers technologiques et des bacheliers professionnels, c'est une erreur de considérer que les bacheliers professionnels peuvent aisément poursuivre dans l'enseignement supérieur. Vous n'avez probablement pas eu de bacheliers professionnels devant vous. Ils ont connu une pédagogie différente, une pédagogie inductive, alors que ce qui prédomine à l'université, c'est une pédagogie hypothético-déductive. Il faut donc prévoir des dispositifs particuliers, et je pense que l'alternance et l'apprentissage sont beaucoup mieux adaptés.

J'en reviens à la question des quotas, dont la philosophie nous pose un problème car c'est imposer les choses. Il est d'ailleurs assez intéressant de voir comment elles ont évolué. Le rapporteur nous a dit que c'était une proposition du Conseil d'État. Oui, c'est le Conseil d'État qui, lorsque le projet de loi lui a été soumis, a proposé un tel dispositif, mais il propose et le Gouvernement dispose. Le Gouvernement a donc choisi un dispositif de quotas. On stigmatise les IUT. C'est un mauvais procès et je ne pense pas que ce soit ainsi que l'on résoudra la question.

Ce que nous avons essayé de faire au cours des cinq dernières années, c'est valoriser l'enseignement supérieur dans son ensemble, pour augmenter l'attractivité globale de nos universités afin que les bacheliers généraux aillent naturellement vers l'université sans que l'on soit amené à les rejeter d'un dispositif. C'est une vision éminemment positive et il me semblait important d'insister sur ce point ce soir.

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