Intervention de Jean-Yves Le Déaut

Séance en hémicycle du 24 mai 2013 à 15h00
Projet de loi relatif à l'enseignement supérieur et à la recherche — Article 48, amendements 103 184

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Yves Le Déaut :

Trop d'évaluation nuit à l'évaluation et représente un coût, une charge de travail. On avait l'impression que le quart de notre communauté scientifique était devenue évaluateur et expert.

Il convient de changer le système, car l'AERES n'a pas respecté le contenu du décret la concernant, pris en application de la loi de programme du 18 avril 2006, et plus précisément des dispositions codifiées aux articles L. 114-3-1 et suivants du code de la recherche. L'AERES avait en particulier pour rôle de valider les procédures d'évaluation des personnels des établissements et organismes mentionnés au 1° dudit article L. 114-3-1 et de donner son avis sur les conditions dans lesquelles elles étaient mises en oeuvre. Or, elle ne l'a pas fait : l'AERES a fait de l'évaluation sans suffisamment valider des procédures préexistantes.

Le Gouvernement a fait le choix d'instituer une autorité administrative indépendante, ce qui est nécessaire et qui me paraît être une bonne chose.

Vous regrettez que le nom de « Haut Conseil » se rapproche du nom précédent.

Le Gouvernement a d'ailleurs suivi globalement les conclusions des assises et le rapport que j'avais fait, sauf sur le nom. Nous en avions proposé un autre.

Nous devons, bien sûr, parvenir à régler le système bureaucratique actuel. Il faut évaluer les personnels, ce qui n'était pas suffisamment fait, donner plus de responsabilités à ceux qui mettaient déjà en place le système d'évaluation, créer des comités mixtes entre universités et établissements publics de recherche et évaluer toutes les missions de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Nous sommes dans un système où l'on évalue uniquement la recherche, c'est-à-dire que la carrière des individus est fondée sur leurs performances en matière de recherche. Or la mission de l'enseignement supérieur et de la recherche va bien au-delà. La recherche, c'est important, c'est nécessaire pour faire avancer les connaissances, mais il y a aussi la transmission de ces connaissances par l'enseignement, la valorisation, le transfert de technologies, le service à la société, la médiation scientifique, la diffusion et la médiation de la culture scientifique, tout ce qui concerne les relations internationales. Toutes ces tâches effectuées par des étudiants chercheurs et des chercheurs, que je tiens à saluer dans cet hémicycle, doivent être évaluées.

Je terminerai par une anecdote. Il y avait à l'Université de Lorraine un chimiste qui était maître de conférences. Il était conscient d'avoir la capacité d'être un grand vulgarisateur, il se surnommait d'ailleurs lui-même le « camelot des sciences ». Il allait dans toutes les expo-sciences, dans toutes les fêtes scientifiques expliquer à l'aide d'expériences simples ce qu'était la chimie. Un jour, il a voulu passer en classe exceptionnelle et devenir professeur. Cela lui a été refusé parce qu'il n'avait pas un dossier de chercheur assez solide. Ce « camelot des sciences » a pourtant fait davantage, sans doute, pour le développement de la science dans notre pays qu'un certain nombre d'autres que je ne citerai pas et qui, eux, sont passés parce qu'ils répondaient aux normes.

Le problème de l'évaluation, c'est qu'il faut reconnaître toutes les missions, afin que la norme que l'on a fixée ne soit pas le seul critère de réussite.

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