Intervention de Martine Martinel

Séance en hémicycle du 5 juin 2013 à 15h00
Recrutement à la tête des grandes institutions culturelles — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartine Martinel :

Madame la présidente, madame la ministre, chers collègues, il est particulièrement opportun, le jour où se tiennent aux Grand Palais les assises de l'audiovisuel, d'examiner une proposition de résolution déposée par le groupe socialiste, à l'initiative de Patrick Bloche, à propos des nominations à la tête des grandes institutions culturelles.

Emmanuel Vallon, Sophie Deschamps et Alain Seban se sont fait l'écho ce matin, lors d'une table ronde, avec des orientations différentes, de préoccupations semblables qui rejoignent celles de la proposition de résolution : trop d'opacité dans les nominations, absence de parité, peu de valorisation des projets – pardonnez-moi de vous refaire le coup du fait du prince… ou de la princesse !

L'adoption de ce texte permettrait de donner plus de clarté et peut-être plus de cohérence à la République des lettres et des arts et de légitimité aux choix qui reviennent à la discrétion de l'exécutif.

Si des règles prévalent dans ce domaine, elles souffrent beaucoup trop d'exceptions. Ainsi, le processus de nomination passe par des publications de fiches de poste. Il est soumis à des contraintes sur la limite d'âge, mais elles sont variables ; les durées de mandat diffèrent selon les institutions et le renouvellement de ces mandats varie d'un établissement à l'autre. En outre, malgré les possibilités offertes, les postes sont généralement attribués à des Français, sans prise en compte des talents venus de l'étranger – M. Seban y a insisté ce matin.

Celles ou ceux qui président aux destinées – la liste n'est pas exhaustive – de l'établissement public de Versailles, du musée du Louvre, de la Comédie française, du Festival d'Avignon, de l'Opéra de Paris, de la BNF et de bien d'autres, sont nommés par l'exécutif sur proposition du ministère de la culture, avec avis des collectivités locales dans les cas de cofinancement. Ce processus, quelles que soient les nominations, parfois contestables, souvent justifiées, fait qu'à peine ces dernières connues, des tribunes fleurissent dans la presse pour les contester.

Comment se satisfaire d'un système qui permet qu'en 2012, 81,5 % de l'administration culturelle, 75 % des directeurs de théâtre et 96 % des directeurs d'opéra soient des hommes ? Comment accepter, madame la ministre, que les femmes, aussi nombreuses, si ce n'est plus nombreuses que les hommes dans notre société, soient si peu talentueuses, au point d'être si peu présentes aux postes de responsabilité dans les institutions culturelles ?

La prise en compte de la diversité des origines ethniques et sociales ainsi que du parcours et de la formation professionnels, appelle des remarques de même ordre. De même, on peut s'étonner que des personnalités passent aisément et sans régulation apparente d'une direction d'institution.

Face à ces constats et ces interrogations, vous avez plaidé, madame la ministre, pour « des choix ouverts et plus transparents » dans les colonnes du Figaro. Le groupe socialiste propose quant à lui que les dossiers des candidats soient étudiés par des commissions pluralistes dont les critères de sélection seraient l'ambition du projet et les compétences en termes de créativité et d'innovation, le tout dans le respect de la parité et de la diversité. Si la procédure formulée par la proposition de résolution est retenue, elle n'entravera pas le pouvoir exécutif tout en fortifiant le soutien à la personne désignée et sa légitimité.

Il importe que les nominations ne s'apparentent plus, comme l'a écrit Bernard Faivre d'Arcier en 2011, à « un bricolage fait d'opportunités et d'arbitraire » et qu'à la personne on préfère dorénavant le projet qu'elle défend. J'espère que nous adopterons la proposition de résolution, qui, loin d'être timide, ouvre de véritables pistes de réflexion.

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