Intervention de Philippe Vitel

Séance en hémicycle du 13 juin 2013 à 9h30
Questions orales sans débat — Assujettissement à la tva des actes chirurgicaux

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Vitel :

Ma question, à laquelle j'associe mon collègue Jean-Pierre Door, s'adresse à M. le ministre délégué chargé du budget ; elle a trait aux critères d'assujettissement des actes thérapeutiques à la TVA.

Il est de règle constante que les actes thérapeutiques sont exonérés de TVA. Il est également de règle constante que l'appréciation du caractère thérapeutique d'un acte relève de la seule compétence du praticien, lui seul ayant reçu la qualification pour soigner par la pratique de son art.

Pourtant, l'administration fiscale a décidé de changer cette règle, en introduisant dans le bulletin officiel des impôts du 27 septembre 2012, le principe selon lequel un acte de chirurgie plastique est désormais assujetti à la TVA, dès lors qu'il n'est pas remboursé par la sécurité sociale. Il s'agit là d'une brèche considérable dans un dispositif jusque-là intangible. Cette brèche est bien sûr inacceptable dans un environnement budgétaire où la tendance est de rembourser de moins en moins les actes chirurgicaux et médicaux.

Si l'on suivait l'administration, non seulement le patient n'est plus remboursé, mais en plus il doit s'acquitter de la TVA. Cette interprétation est de plus inacceptable puisqu'elle est contraire au droit, notamment communautaire. L'administration fiscale pose en effet comme critère exclusif le remboursement par la sécurité sociale, faisant de ce dernier non plus un indice, mais un référent absolu de l'existence d'un acte thérapeutique ou pas. Or la Cour de justice de l'Union européenne vient de rappeler le 21 mars dernier, dans le cadre d'une question préjudicielle suédoise que, d'une part, les actes de chirurgie et de médecine esthétiques doivent être exonérés de TVA dès lors qu'ils ont une finalité thérapeutique et, d'autre part – c'est un point fondamental –, que seul le praticien peut apprécier cette finalité thérapeutique.

Ce rappel par la Cour de justice est donc radicalement contraire à la position de l'administration fiscale qui rappelle immanquablement qu'elle souhaite s'affranchir de l'appréciation de chaque praticien pour la détermination de la finalité thérapeutique. Cet argument est d'ailleurs repris dans les réponses types faites par le ministère du budget : « Le critère de la prise en charge par l'Assurance maladie constitue un critère permettant d'assurer la sécurité juridique des médecins en s'affranchissant ainsi de l'appréciation subjective de chaque praticien ou patient qui aurait été placé sous le contrôle a posteriori de l'administration ». Cet argument ne peut donc plus tenir, à moins de tromper la représentation nationale et de continuer ainsi de mettre patients et praticiens dans une situation de fragilité juridique inacceptable.

Enfin, le principe introduit par l'administration est discriminatoire en ce qu'il ne s'applique qu'à une seule profession médicale. Tous les actes des autres professions restent exonérés de TVA, quand bien même ils ne seraient pas remboursés par l'assurance maladie – et ils sont légion. Des personnalités hautement qualifiées ont d'ailleurs relevé ainsi la contrariété au droit de cette position de l'administration, notamment Pierre Sargos ancien président de la Cour de Cassation.

Monsieur le ministre, maintenez-vous cette interprétation erronée de votre administration ? Si oui, allez-vous désormais assujettir à la TVA tous les actes chirurgicaux et médicaux non remboursés dans un souci d'égalité d'interprétation ? Sinon, comptez-vous prescrire à vos services un rétablissement de l'interprétation initiale faisant du non-remboursement un indice d'appréciation parmi d'autres de la présence ou pas d'un acte à finalité thérapeutique ? Je vous remercie.

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