Intervention de Yannick Moreau

Réunion du 19 juin 2013 à 9h00
Commission des affaires sociales

Yannick Moreau, présidente de la commission pour l'avenir des retraites :

En dépit des nombreux travaux existant déjà sur le sujet, le temps imparti à la commission nous a paru court : nous n'avons disposé que de quatre mois pour formuler des propositions pour les court, moyen et long termes. Les membres de la commission ont été très actifs et nous avons fourni un travail dense, bénéficiant de l'aide de tous les services de l'État et du secrétariat général du COR.

Je reviendrai pour commencer sur les principaux constats faits dans notre rapport.

Premièrement, même si chacun les connaît, il convient de rappeler précisément les défis démographiques auxquels notre système de retraite demeurera confronté dans la période à venir : nous sommes dans une période de départs massifs à la retraite – ceux des enfants du baby boom – qui va durer jusqu'en 2035. Dans le même temps, l'espérance de vie s'allonge. Il existe cependant une grande différence entre les deux phénomènes : si le premier était depuis longtemps anticipé, nous n'avons découvert le second que progressivement et n'en avons pleinement pris la mesure que dans les années 1990. Ni les rapports des années 1980 ni le Livre blanc de Michel Rocard sur les retraites n'en avaient fait état. C'est qu'à l'époque, l'INSEE prévoyait plutôt un tassement de l'espérance de vie. Cette prise de conscience relativement tardive est d'ailleurs commune à l'ensemble des pays développés.

La période de vingt-cinq ans dans laquelle nous entrons sera particulièrement éprouvante. En effet, le ratio entre cotisants et retraités va continuer à décroître : auparavant de 4, passé à 3 en 1990, il est aujourd'hui de 2,5 et tombera à 1,5 en 2035. À partir de cette date, il ne se stabilisera pas complètement – l'espérance de vie continuant à s'allonger –, mais diminuera beaucoup moins rapidement. Il convient de le dire, en particulier aux jeunes : à force d'entendre parler de réformes des retraites, ceux-ci sont en effet persuadés qu'ils ne percevront aucune pension. Tel n'est évidemment pas le cas.

La situation démographique de la France est dans la moyenne des pays européens. Elle est bien meilleure que celle de l'Allemagne, où le ratio entre cotisants et retraités tombera à 1,5 beaucoup plus rapidement et poursuivra sa baisse au-delà. Elle est en revanche légèrement moins favorable au financement des retraites que celle du Royaume-Uni, où la natalité et la mortalité sont l'une et l'autre plus élevées.

Deuxièmement, les réformes des retraites conduites depuis 1987 ont produit et vont produire des effets : comme nous le montrons dans notre rapport, sans ces réformes, la masse des pensions à financer en 2040 serait supérieure de six points de produit intérieur brut (PIB) à ce qu'elle sera dans le scénario médian – scénario B du COR – que nous avons retenu. À force de mener des réformes et d'annoncer un retour à l'équilibre qui ne se produit pas, nous avons l'impression d'une succession d'échecs. Mais prétendre que rien n'a été fait en France relève de la désinformation.

Au début des années 1970, Robert Boulin a conduit une réforme très importante qui a amélioré le niveau des pensions, objectivement faible jusqu'à cette date. Puis une loi a rendu obligatoire l'affiliation aux régimes complémentaires. À l'époque, on n'était guère en mesure de réaliser des projections et d'anticiper l'évolution des coûts. Les prestations sont demeurées élevées sur toute la période et n'ont d'ailleurs toujours pas commencé à décroître s'agissant du régime général, malgré les réformes menées depuis 1987. Quant aux régimes complémentaires, ils ont continué à accorder des droits nouveaux jusqu'en 1999. Enfin, en 1982, l'âge légal de départ à la retraite a été abaissé à 60 ans.

Les réformes destinées à « refroidir la machine » ont débuté dans la deuxième moitié des années 1980. À partir de 1987, les pensions et les salaires portés au compte ont été indexés sur les prix. Mais, malgré les réformes successives – 1993, 2003, 2008 et 2010 –, l'équilibre financier n'est toujours pas atteint. Il convient donc de nous interroger sur la manière de financer les retraites dans les années qui viennent.

Les réflexions de la commission ont porté sur trois questions ou séries de questions : l'équilibre financier, qu'il convient de restaurer pour redonner confiance dans notre système de retraite ; des mesures de justice, d'équité et de bonne gestion ; l'emploi des seniors et la pénibilité, l'avenir des retraites se jouant en grande partie dans le monde du travail.

À court terme, il est impératif d'assurer le financement de nos régimes de retraite par des mesures pérennes, le COR estimant le besoin de financement à 20 milliards d'euros en 2020.

Trois blocs peuvent être distingués : le régime général, les régimes alignés et le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) ; les régimes complémentaires ; le régime de la fonction publique d'État, les régimes spéciaux et les autres régimes équilibrés par des taxes affectées ou par une subvention de l'État. Selon les rapports du COR, ces trois blocs vont connaître des évolutions différenciées, qui tiennent à la situation démographique propre à chacun d'entre eux : alors que les déficits du régime général et des régimes complémentaires vont continuer à se creuser jusqu'en 2020, celui du régime de la fonction publique d'État a déjà atteint son niveau le plus dégradé.

S'agissant des régimes complémentaires, une partie du besoin de financement – 7,6 milliards d'euros en 2020 – sera couvert par les mesures adoptées par les partenaires sociaux dans le cadre de l'accord national interprofessionnel conclu récemment. Il appartient désormais aux mêmes partenaires sociaux de prendre des décisions complémentaires permettant le retour à l'équilibre ; notre commission n'était pas chargée de les identifier.

Pour ce qui est du régime de la fonction publique d'État, des régimes spéciaux et des autres régimes équilibrés par des taxes affectées ou par une subvention de l'État, le COR a évalué en 2011 le besoin de financement à 8,6 milliards d'euros en 2020. Les lois de finances pour 2012 et 2013 l'ont déjà couvert à hauteur de 4 milliards d'euros. D'une manière générale, la commission a estimé que toutes les mesures qui seraient prises pour rééquilibrer le régime général et les régimes alignés devraient être étendues aux assurés – cotisants et retraités – des régimes du secteur public.

En ce qui concerne le régime général, les régimes alignés et le FSV, leur besoin de financement a été estimé par le COR à 5 milliards d'euros. Cependant, compte tenu d'un début de trajectoire économique dégradé par rapport aux hypothèses retenues par le COR, la commission a évalué l'effort financier nécessaire à 7 milliards d'euros. Elle a donc dressé une liste de mesures chiffrées, dont le rendement cumulé dépasse néanmoins largement cette somme. En effet, les mesures détaillées dans le rapport ne sont que des éventualités : la commission n'a pas exprimé de préférences ; il appartient au Gouvernement de faire ses choix. Pour la plupart des mesures, la commission n'a précisé leur rendement que pour le régime général et les régimes alignés. Quant aux mesures fiscales, elles concernent l'ensemble des retraités ; leur rendement est donc calculé tous régimes confondus.

Dans son rapport, la commission a distingué les mesures qui concerneraient les retraités de celles qui toucheraient les actifs. La question de savoir dans quelle proportion l'effort doit porter sur l'une ou l'autre catégorie – par exemple, pour un tiers sur les retraités et pour les deux autres tiers sur les actifs, ou à parité sur les deux catégories – est éminemment politique.

S'agissant des retraités, des mesures de désindexation peuvent être envisagées. Par exemple, une sous-indexation de 1,2 point des pensions soumises au taux plein de la CSG et de 0,5 point des pensions soumises au taux réduit, appliquée en 2014, 2015 et 2016, permettrait de réaliser une économie de 2,8 milliards d'euros en 2020. Cette mesure n'affecterait pas les pensions les plus modestes, les retraités non assujettis à la CSG n'étant pas concernés.

En matière fiscale, la Cour des comptes avait estimé que la situation des retraités était trop avantageuse et avait dressé une liste de mesures possibles, que la commission a examinées. Ainsi, la remise en cause de l'abattement fiscal de 10 % sur les pensions – équivalent de l'abattement pour frais professionnels dont bénéficient les actifs – rapporterait des sommes importantes : 3 à 5 milliards s'il était supprimé ; sensiblement moins si l'on se contentait d'en abaisser le plafond de 3 660 à 1 500 ou 2 500 euros par foyer fiscal. La suppression totale de l'abattement serait sévère : 790 000 ménages supplémentaires deviendraient imposables ; les autres prestations dont bénéficient certains d'entre eux seraient, en outre, réduites.

Enfin, des mesures peuvent également être envisagées s'agissant des recettes, par exemple un alignement sur celui des actifs du taux de la CSG auxquels sont assujettis les retraités.

S'agissant des actifs, une hausse de 0,1 point par an pendant quatre ans du taux de la cotisation déplafonnée rapporterait 3 milliards d'euros, et donc une hausse de 0,2 point, le double.

Une sous-indexation des salaires portés au compte permettrait également certains gains. Enfin, une augmentation de la durée de cotisation ou un report de l'âge légal du départ à la retraite sont également possibles. Cependant, compte tenu de la proximité de l'échéance de 2020, des mesures d'âge et de durée déjà mises en application actuellement et du niveau élevé du chômage, elles n'auraient qu'un rendement assez faible : 600 millions d'euros pour le régime général en 2020 dans l'hypothèse d'un calendrier très resserré.

Une fois la question du court terme traitée, la commission s'est penchée sur celle de la trajectoire de long terme. Elle a examiné la manière dont elle avait été abordée dans le cadre des précédentes réformes, à des époques où la réflexion, notamment sur les outils de pilotage, n'était pas aussi avancée.

En 1993, le Gouvernement n'avait pas promis un retour à l'équilibre, il souhaitait avant tout réaliser des économies.

En 2003, le Gouvernement a tenté de financer un retour à l'équilibre et fixé une clause de rendez-vous à 2008. Cependant, si une réforme très importante a bien été conduite en 2008, il ne s'est pas agi du rendez-vous prévu pour examiner les conditions d'un retour à l'équilibre. C'est d'ailleurs un problème : comment faire respecter les rendez-vous fixés par le Parlement ?

En 2010, le Gouvernement a annoncé un retour à l'équilibre, qu'il a cherché à atteindre, d'une part, grâce à des mesures pérennes – report de l'âge légal de départ à la retraite – et, d'autre part, grâce à des financements provenant du Fonds de réserve pour les retraites (FRR), lesquels n'étaient cependant pas reconductibles et n'ont donc pas eu d'effet durable.

La commission a estimé qu'il convenait désormais de présenter aux Français des solutions pérennes. De ce point de vue, elle a considéré que la réforme de 2003 n'était pas déraisonnable : le Gouvernement avait retenu l'un des scénarios du COR et tenté d'élaborer un plan de retour à l'équilibre.

Aujourd'hui, si nous retenons le scénario B du COR – 1,6 % de croissance par an, dont 1,5 point de gains de productivité et 0,1 point d'augmentation de la population active –, l'équilibre financier du système de retraite sera assuré à partir de 2020. Nous aurions donc pu nous en tenir là et ne rien proposer pour le long terme. Cependant, ce raisonnement nous est apparu peu crédible. En effet, la France est, comme les autres pays développés, confrontée à un deuxième défi : celui d'une croissance faible – les gains de productivité étant incertains – et irrégulière. Nous ne sommes donc nullement assurés que le scénario B est bien celui qui se réalisera pendant les vingt prochaines années. Aucun des économistes que la commission a consultés ne l'a d'ailleurs jugé raisonnable. La commission a donc travaillé à partir de l'ensemble des hypothèses présentées par le COR.

Dans tous les cas de figure – y compris le scénario B –, la commission propose d'augmenter la durée de la vie active afin de tenir compte de l'allongement de l'espérance de vie. Elle est partie de l'hypothèse que l'augmentation de la durée de cotisation serait poursuivie au rythme prévu par la réforme de 2003. Cependant, elle a également chiffré d'autres scénarios d'augmentation de la durée de cotisation et de report de l'âge légal de départ à la retraite. Le choix entre ces différentes propositions relève d'une décision politique.

La commission a étudié d'autres mesures que celles portant sur l'âge et la durée. Elle a constaté que le système de retraite ne rencontrait guère de problèmes de financement en période de croissance, mais qu'il y était confronté lorsque celle-ci faisait défaut. En effet, de manière définitive depuis la réforme de 1993, la revalorisation des pensions est indexée sur les prix, qui ont augmenté faiblement et régulièrement ces dernières années, indépendamment du contexte économique. Les cotisations évoluent pour leur part comme les salaires, qui sont au contraire très sensibles à la situation de l'économie. Lorsque celle-ci est bonne, le différentiel entre salaires et prix permet de financer le déséquilibre démographique lié au départ à la retraite des générations du baby boom – tel était d'ailleurs l'objectif de la réforme de 1993. De plus, les taux de remplacement baissent de manière mécanique. En revanche, en période de faible croissance, le différentiel entre salaires et prix n'est plus suffisant pour financer le système de retraite et les taux de remplacement ne se dégradent plus.

Dans les faits, aujourd'hui, les taux de remplacement ne diminuent pas : leur baisse dans le régime de base a été plus que compensée par les droits que les régimes complémentaires ont continué à accorder. Le niveau des pensions est donc historiquement haut. Cette situation ne va pas durer : à partir de 2018 ou 2020, les taux de remplacement vont se dégrader. Cela n'a rien de dramatique compte tenu du montant relativement élevé des pensions, mais il conviendra de surveiller ce phénomène.

Comment font les pays étrangers pour faire face aux aléas conjoncturels que j'ai décrits ? Chez beaucoup de nos partenaires, le mode de calcul des pensions n'est pas totalement fixe : on tient compte, chaque année, de la situation démographique et du contexte économique. Ainsi, en Allemagne, un coefficient démographique et un coefficient économique sont calculés chaque année et appliqués tant aux salaires portés au compte qu'aux pensions. L'indexation des pensions sur les prix constitue une originalité française.

En somme, la France doit choisir entre deux voies : procéder à une réforme des retraites tous les trois à cinq ans – si la situation économique n'est pas bonne – ou introduire des éléments de pilotage. Beaucoup estiment que nous devrions passer à un régime par points. Cependant, une telle réforme ne produirait en soi aucune économie en l'absence de mécanisme de pilotage. En réalité, comme l'explique la commission dans son rapport, il est possible de piloter tous les types de régimes : par annuités, par points ou en comptes notionnels. Plus que la nature du système, importent les outils de pilotage dont on se dote et les objectifs qu'on fixe. Bien sûr, cela n'empêche pas d'avoir une préférence pour tel ou tel système. Quoi qu'il en soit, la diversité des régimes français rend un pilotage plus difficile.

Afin de piloter notre système par annuités, la commission propose que soit calculé, chaque année, un coefficient d'indexation des salaires portés au compte, en fonction des gains de productivité – c'est-à-dire des salaires nets – observés au cours des dix dernières années.

La France étant attachée au primat du politique, nous n'estimons pas souhaitable que le mécanisme d'indexation soit purement automatique, comme c'est le cas en Suède. Ce serait l'échec assuré. La réforme doit être réalisable et ne doit ni bloquer ni mettre en péril notre système.

Le coefficient d'indexation serait donc calculé par un comité d'experts selon les modalités de pilotage prévues par la loi. Ensuite, le Gouvernement aurait la possibilité, après consultation du COR et des partenaires sociaux, soit de retenir ce coefficient, soit d'adopter des dispositions d'effet équivalent. Il inscrirait dans tous les cas la ou les mesures décidées dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. L'instauration de ce mode de pilotage impliquant un choix politique annuel constituerait un progrès considérable.

J'en viens aux mesures visant à renforcer l'équité et la lisibilité, dont nous pourrons débattre plus longuement ensuite. La commission a travaillé de manière sélective : sur la vingtaine de mesures qu'a proposées le COR dans ses rapports, elle n'en a étudié que cinq ou six. De plus, elle n'a pas pu en chiffrer le coût dans le laps de temps qui lui était imparti. Cependant, elle a clairement indiqué que ces mesures devraient, si elles étaient adoptées, être intégralement financées dans le cadre de la réforme.

Les premières mesures que nous proposons concernent les règles d'acquisition des trimestres. Le calcul des droits à pension est défavorable à certaines catégories : les apprentis, les stagiaires en entreprise, les stagiaires de la formation professionnelle. Ces situations ne sont pas normales et il ne serait pas très coûteux d'y remédier. Nous proposons également des mesures – sans doute peu onéreuses – en faveur des polypensionnés, ainsi qu'une meilleure prise en compte des aléas de carrière.

D'autre part, la commission a étudié assez longuement la question des avantages familiaux. D'abord, ceux-ci varient considérablement d'un régime à l'autre. Ensuite, nous observons, notamment dans le régime général, des empilements d'avantages – assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF), majorations de durée d'assurance… – qui vont parfois au-delà de ce qui est nécessaire. Enfin, lorsqu'elles sont proportionnelles aux pensions, les majorations pour enfant profitent paradoxalement davantage aux hommes qu'aux femmes, dans la mesure où ils perçoivent des pensions en moyenne plus élevées. Pourtant, les femmes contribuent largement à l'éducation des enfants. Il convient donc de revoir l'ensemble du système, qui a vieilli. Il serait notamment souhaitable de forfaitiser les aides. C'est, selon nous, une mesure intéressante et importante, une des rares que nous pouvons prendre en faveur des femmes, désavantagées par rapport aux hommes en matière de retraites.

Le système est encore plus illogique et illisible en ce qui concerne les pensions de réversion : dans le régime de base, leur versement est soumis à condition de ressources alors que, dans les régimes complémentaires, leur montant est proportionnel à celui de la retraite ; en outre, les taux sont beaucoup plus favorables dans les régimes complémentaires du secteur privé.

En tous les cas, toute réforme des avantages familiaux devra être menée de manière coordonnée entre le régime de base et les régimes complémentaires, d'une part, et entre le régime général et les autres régimes, d'autre part. Il faut clore l'époque où chaque régime pouvait élaborer son propre dispositif dans son coin. Nous pensons possible de parvenir à une convergence, d'autant que les partenaires sociaux et les responsables des différents régimes ne sont pas opposés à un rapprochement, voire à une uniformisation des règles en la matière.

Cependant, c'est une réforme complexe. La commission n'est pas certaine que le Gouvernement sera en mesure de la mener à bien dans le temps qu'il s'est donné pour conduire sa réforme des retraites. Elle a donc imaginé deux scénarios dans lesquels les réformes seraient moins importantes, mais incluraient la forfaitisation de certains avantages.

Au titre des mesures visant à renforcer l'équité et la lisibilité, la commission a étudié les taux de remplacement dans les régimes de la fonction publique et dans ceux du secteur privé. Contrairement à ce que l'on pouvait penser, ces taux ne sont pas plus avantageux dans le secteur privé où, de plus, ils restent pour le moment stables alors qu'ils baissent dans le secteur public. Ce n'est guère étonnant : comme la part des primes dans la rémunération des fonctionnaires augmente chaque année et que les primes ne sont pas prises en compte dans le calcul des pensions, le taux de remplacement diminue mécaniquement.

Quoi qu'il en soit, la commission a estimé que les différences de mode de calcul des pensions entre secteur public et secteur privé nuisaient à la lisibilité du système de retraite. Elle a donc proposé une évolution de ce mode de calcul dans le secteur public. Il ne s'agit nullement, comme je l'ai parfois entendu, de prendre en compte les salaires des vingt-cinq dernières années et d'intégrer toutes les primes. Une telle réforme aurait probablement des effets très anti-redistributifs : elle serait favorable aux cadres de la fonction publique qui perçoivent des primes élevées, mais non aux autres agents. En outre, elle supposerait au préalable une évolution profonde de la politique salariale menée par le Gouvernement, celles qui ont été conduites jusqu'ici rendant très malaisée une réforme des régimes de retraite de la fonction publique.

La commission est néanmoins favorable à une évolution – qui est loin de faire l'unanimité – : elle propose d'allonger la durée de référence de trois à dix ans, en contrepartie de l'intégration d'une partie des primes. Des mesures techniques permettraient de maintenir le niveau des pensions pour les agents qui ne perçoivent pas de primes. En effet, l'objectif de cette réforme serait non pas de faire baisser les pensions, mais de rapprocher les modes de calcul entre secteur public et secteur privé, de telle manière que le système de pilotage que nous proposons puisse concerner tous les régimes. La commission a en effet souhaité aller au bout de la logique de lisibilité et d'équité : il n'était pas question pour elle de préconiser un pilotage qui serait appliqué au seul secteur privé.

Je n'ai pas le temps de détailler les mesures que nous proposons pour accroître le taux d'emploi des seniors. Cependant, nous y attachons autant d'importance qu'aux autres volets de la réforme.

En matière de prise en compte de la pénibilité, beaucoup ont considéré que la réforme de 2010 n'était pas allée assez loin. Tout en retenant les mêmes critères, la commission propose un système alternatif : les salariés accumuleraient des points en fonction de la durée pendant laquelle ils exercent une activité dite pénible ; ces points seraient transférables d'une entreprise à une autre et seraient convertibles en trimestres soit de formation professionnelle – principalement en vue d'une reconversion –, soit de temps partiel de fin de carrière, soit de rachat de trimestres au titre de la retraite. Le barème favoriserait le recours à la formation et au temps partiel : pour un même nombre de points, un salarié aurait droit à trois fois plus de trimestres de formation et à deux fois plus de trimestres de temps partiel que de rachat de trimestres à la retraite.

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