Intervention de Jacques Krabal

Séance en hémicycle du 26 juin 2013 à 15h00
Projet de fermeture de l'usine goodyear d'amiens-nord — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJacques Krabal :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des affaires économiques, madame la rapporteure, mes chers collègues, nous sommes aujourd'hui appelés à nous prononcer au sujet de la création d'une commission d'enquête parlementaire sur la fermeture éventuelle de l'usine Goodyear d'Amiens-Nord.

Au nom des députés du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, je vous annonce immédiatement que nous accueillons avec bienveillance cette initiative et que nous voterons pour cette proposition de résolution.

La France traverse une période de désindustrialisation massive, qui a des conséquences économiques et sociales graves pour nombre de nos concitoyens. Face à cette situation, nous considérons que notre devoir de responsables politiques est de chercher sans cesse des réponses afin d'améliorer à la fois nos capacités productives et les conditions de travail des salariés, au niveau local et au niveau national.

La situation de l'usine Goodyear d'Amiens-Nord est particulière, mais elle illustre bien la nécessité de l'action de la puissance publique. Certes, l'État n'a pas de baguette magique ; certes l'État ne peut pas tout : soyons réalistes et ne demandons pas l'impossible ! Mais je tiens à le rappeler avec force, avec l'État et avec les collectivités territoriales – que nous ne pouvons pas oublier –, nous ne sommes pas désarmés.

Les collectivités territoriales jouent déjà leur rôle et continueront de le faire. Je pense notamment à la région Picardie, qui suit ce dossier de près. Elle soutient le comité d'entreprise et les salariés. Mais l'objectif, c'est avant tout de trouver des possibilités de réindustrialisation de ce site.

Si, dans ce cas précis, le problème de la reprise du site dépasse largement le cadre local, nous devons agir tous ensemble, en associant bien évidemment les collectivités territoriales, au premier rang desquelles la région Picardie.

Les délocalisations spéculatives sont hélas nombreuses, trop nombreuses. Je pense en particulier avec émotion à tous ces salariés licenciés dans une ville industrielle comme Soissons, elle aussi en Picardie. Des milliers de salariés ont été jetés sur le carreau au cours de ces dernières années : Wolber, Saint Gobain Emballage, Baxi, Focast ou encore la chaudronnerie BSL : à chaque fois, ce sont des drames humains insupportables.

La situation de Goodyear est particulière, marquée par des annonces de reprises, des polémiques violentes, inacceptables, et surtout deux plans sociaux annulés par les tribunaux, Goodyear n'ayant pas réussi à démontrer qu'ils étaient justifiés.

C'est le fondement de notre vote en faveur de la commission d'enquête. Vouloir comprendre et démêler le vrai du faux – ce qui n'est pas facile dans ce dossier – est toujours utile, mais gardons à l'esprit que notre objectif prioritaire et essentiel doit rester la préservation du site industriel et des emplois.

Et puis, je rappelle au passage, comme d'autres collègues l'ont fait, que Goodyear a réalisé un bénéfice d'environ 1,4 milliard d'euros en 2012. Cette proposition de résolution met donc aussi en lumière une tendance lourde de notre système économique, contre laquelle nous devons lutter, à savoir la financiarisation progressive de l'industrie, au détriment de l'emploi et des hommes, financiarisation qui montre bien les limites d'un système qui ne repose que sur le profit à court terme, et ce sur le dos des salariés.

N'oublions pas que si le site d'Amiens-Nord venait à fermer, ce seraient non seulement des emplois qui évidemment disparaîtraient, mais également des savoir-faire, des techniques, une activité locale, des emplois induits, autant de choses qui ne se reconstruisent que très lentement.

Dans ces conditions, une commission d'enquête parlementaire sur ce sujet nous paraît une bonne initiative. Mais les députés du groupe RRDP pensent que nous devons faire plus. Au-delà même de la proposition de loi sur la reprise des sites rentables, nous voulons engager un véritable débat sur ces sujets, et je profite de cette occasion pour vous rappeler la proposition de loi de Jean-Noël Carpentier, cosignée par l'ensemble du groupe RRDP, sur les licenciements collectifs pour motif économique.

Mes chers collègues, même si ces sujets sont complexes dans une économie mondialisée en mutation, marquée par les délocalisations, nous ne devons céder ni au fatalisme ni à la démagogie, et moins encore renoncer à nos ambitions politiques. Nous nourrissons l'espoir que cette commission d'enquête puisse faire la lumière sur ce dossier, mais surtout qu'elle puisse être véritablement utile au maintien de l'emploi sur ce site.

Dans cette perspective, il faudra travailler vite, car le risque est grand que le rapport de cette commission d'enquête arrive trop tard. L'audience sur le recours du comité central d'entreprise pour obtenir l'annulation du plan de sauvegarde de l'emploi est en effet prévue le 6 septembre au TGI de Nanterre. Il y a donc urgence. Les députés du groupe RRDP sont disponibles pour travailler dès que possible à cette commission. Voilà notre état d'esprit au moment de voter cette proposition.

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