Intervention de Jean-Claude Cantorné

Réunion du 26 juin 2013 à 16h15
Délégation aux outre-mer

Jean-Claude Cantorné :

La sole cannière de la Guadeloupe représente 43 % de la surface agricole utile de l'île et elle a progressé depuis 2007 de 3 %. La production annuelle de sucre oscille entre 60 000 et 75 000 tonnes, que se partagent deux sucreries.

La première, Gardel, transforme entre 55 000 et 70 000 tonnes de canne. L'entreprise a fait l'objet d'investissements considérables au cours des cinq dernières années, avec l'aide des pouvoirs publics nationaux et communautaires, et elle possède une centrale thermique charbonbagasse qui fournit près du tiers de l'électricité de la Guadeloupe.

L'autre sucrerie, située à Marie Galante, transforme chaque année entre 10 000 et 12 000 tonnes de canne. Elle est soutenue à bout de bras par ses actionnaires, ne disposant d'aucun concours bancaire, et elle se bat depuis trois ans pour essayer d'obtenir un accord des pouvoirs publics locaux pour la construction d'une centrale thermique utilisant la bagasse. Nous espérons obtenir un résultat positif, qui pourrait d'ailleurs être annoncé par le Premier ministre lui-même dans les prochains jours. L'essentiel de la production de canne va en direction de ces deux usines, les distilleries n'en absorbant que 10 %.

S'agissant du rhum, nous sommes effectivement engagés dans un combat très difficile qui a fait l'objet, au Sénat, d'une proposition de résolution européenne sur le renouvellement du régime fiscal applicable au rhum traditionnel des départements d'outre-mer déposée le 27 mars 2013. Je salue la qualité de ce document remarquable qui contient une analyse très complète de la filière. Par ailleurs, je citerai également le rapport du cabinet Algoé consultants sur l'interprofession du sucre aux Antilles.

On distingue le rhum agricole, issu de la distillation directe du jus de canne, et le rhum de sucrerie, résultat de la distillation des mélasses issues de la fabrication du sucre. La part relative de chacune de ces productions varie d'un territoire à l'autre. Ainsi La Réunion produit presque exclusivement du rhum de sucrerie, tandis que la Martinique produit 83 % de rhum agricole et la Guadeloupe 45 %.

Le secteur du rhum représente 24 sociétés dans l'ensemble des départements d'outre-mer, dont 12 en Guadeloupe, 8 en Martinique, 3 à La Réunion et une en Guyane. C'est un secteur dynamique – la production d'hectolitres d'alcool pur a progressé de 17,8 % entre 2006 et 2011 – dont la caractéristique principale est l'intégration.

Contrairement à ce qui se passe dans les autres parties du monde, chaque département d'outre-mer ne peut produire du rhum qu'avec ses propres matières premières. Cette caractéristique, qui nous vaut une appellation d'origine et une indication géographique européenne protégée, justifie le soutien fiscal dont nous bénéficions depuis longtemps pour compenser les coûts qu'elle implique. Ce soutien, bien qu'entièrement supporté par le Trésor public français, fait malheureusement l'objet d'une autorisation communautaire et de la vigilance sans faille de la Direction générale de la concurrence de la Commission européenne. Or celle-ci semble davantage préoccupée par l'établissement de liens commerciaux très libéraux entre nos départements et le reste du monde que par la protection de notre rhum.

Il est à craindre que la multiplication des accords commerciaux avec des pays d'Amérique latine comme le Pérou et la Colombie et, un jour, avec les pays du Mercosur, ne contribue encore à augmenter nos difficultés. Nous sommes surpris par la politique menée par la Commission européenne, qui consiste à réduire la protection fiscale dont bénéficie le rhum des DOM en favorisant le développement d'une politique de libre-échange.

Il convient de rappeler ici que les États-Unis sont les premiers exportateurs de rhum en Europe. Cette situation est due au fait que les deux grandes marques multinationales de rhum, Bacardi et Diageo, dont la production est située aux Îles Vierges et à Porto Rico, reçoivent des subventions massives du gouvernement – 263 millions de dollars par an – qui leur permettent de mener une politique d'exportation très dynamique.

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