Intervention de Danielle Auroi

Réunion du 4 juin 2013 à 17h00
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanielle Auroi, présidente :

Je vous remercie d'être parmi nous pour cette audition conjointe « post-Conseil européen ». Je le fais d'autant plus chaleureusement que la commission des affaires européennes a déjà eu la chance de vous recevoir avant le Conseil.

Je ne reviendrai pas sur l'utilité de ces Conseils thématiques, qui sont certes plus brefs mais permettent d'avoir une vision précise des urgences qui s'imposent à l'Union. Je souhaite néanmoins insister sur un point : il semble que le modèle économique qui a conduit à la crise actuelle, qui va bien au-delà de la seule crise financière, soit toujours à l'oeuvre et qu'une bonne partie des membres du Conseil ne soient pas prêts à l'interroger. Ce modèle, qui est somme toute celui des années 1980, se fonde sur une hypertrophie du secteur financier – et sur son irresponsabilité. Il se voit certes corrigé, mais notre prise de conscience est-elle suffisante ? J'aimerais connaître votre sentiment sur ce point.

Une ambition – qui n'est pas seulement européenne – est née en ce qui concerne la lutte contre l'évasion fiscale. En témoigne la fin du blocage sur la directive épargne et les échanges automatiques d'information à partir du 1er janvier 2015, ainsi que les progrès en matière de transparence des mouvements financiers et de ce que doivent déclarer les banques – même s'ils peuvent paraître timides au regard du débat que nous avions eu sur ce sujet en France. Quel lien maintiennent les autorités luxembourgeoises et autrichiennes entre le feu vert donné à l'adoption de la directive et les négociations avec les autres paradis fiscaux européens ? Il semble que des zones d'ombre subsistent.

Nous redoutions que le chantier de l'énergie ne soit traité de manière superficielle le 22 mai. Nous défendons pour notre part depuis longtemps l'ambition d'une Europe de l'énergie ; M. Jacques Delors nous a redit il y a peu qu'il était lui-même favorable à une Europe de l'énergie et de l'environnement. Le Président de la République affirme tout aussi clairement cette ambition. Or si le Conseil européen a prodigué des encouragements en ce sens, on ne peut s'empêcher de relever quelques contradictions. La commission des affaires européennes recevait ce matin Mme Connie Hedegaard, commissaire européen en charge de l'action pour le climat. Je me réjouis qu'elle nous ait appelés à la prudence en ce qui concerne les gaz de schiste. Elle a notamment rappelé que si les États-Unis peuvent en exploiter, c'est aussi parce qu'ils ont de l'espace, et cité l'exemple de la Pologne – d'où certaines sociétés se retirent aujourd'hui parce que l'exploitation n'est pas assez rentable. Elle a par ailleurs souligné que l'exploitation des gaz de schiste émet des gaz à effet de serre, et aggrave par conséquent le réchauffement climatique. L'efficacité énergétique – qui reste la meilleure des énergies, y compris aux yeux du président Van Rompuy – a t-elle suffisamment sa place dans les discussions au sein du Conseil européen ? Il est important que nous soyons rassurés sur ce point à l'heure où notre pays débat de la transition énergétique.

Cette audition me permet également d'évoquer mon déplacement à Dublin, où je me suis rendue la semaine dernière avec l'un de mes collègues de la commission des affaires européennes pour rencontrer notamment nos homologues irlandais. Il ressort de nos échanges avec eux qu'ils ont avancé sur le sujet de la taxe sur les transactions financières, surtout en ce qui concerne la répartition et les objectifs de celle-ci. Ils sont assez ouverts à l'idée que l'Union européenne dispose de financements propres, et nous ont encouragés à travailler sur l'idée d'une taxe écologique aux frontières de l'Europe. La décision que vient de prendre la Commission européenne à propos des panneaux solaires chinois démontre d'ailleurs l'opportunité de cette réflexion, et nos homologues du Bundestag s'étaient prononcés il y a peu dans le même sens. Le Conseil est-il prêt à l'approfondir ?

Nous avons également fait part à nos collègues irlandais des bonnes résolutions prises à l'occasion de la conférence des présidents de parlement européens de Nicosie en ce qui concerne l'application de l'article 13 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'Union économique et monétaire (TSCG), qui permet aux Parlements de traiter deux fois par an du budget, aussi en amont que la Commission elle-même. Pensez-vous que le message soit passé auprès du Conseil ?

Enfin, Mme Geraldine Byrne Nason, secrétaire générale aux affaires européennes, nous a confirmé que le gouvernement irlandais avait compris le message qui a été adressé avec la menace d'un veto français et la résolution adoptée par le Parlement européen pour défendre l'exception culturelle européenne dans la perspective de l'ouverture d'une négociation commerciale bilatérale avec les États-Unis. En va-t-il de même pour d'autres gouvernements ?

En revanche, nous n'avons pas le sentiment d'avoir progressé en ce qui concerne la défense. Qu'en est-il du côté des gouvernements ?

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