Intervention de Marc Le Fur

Séance en hémicycle du 10 juillet 2013 à 15h00
Attributions du garde des sceaux et du ministère public en matière de politique pénale et d’action publique. — Article 1er, amendements 3 6 27 41 52 62

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarc Le Fur :

Imaginons un patron qui donnerait des instructions générales sans aller voir ce qui se passe, sans contrôler, sans sanctionner : ce ne serait pas un patron ! Plus rien ne serait dirigé ! Le propre d'une autorité, c'est de donner des instructions générales, abstraites, et de veiller à leur application, quitte dans certains cas à descendre au niveau d'une situation particulière. L'opinion attend de nous que nous prenions les choses en main, ce qui, dans le domaine de la justice, passe par une hiérarchie au sommet de laquelle vous vous trouvez, madame la garde des sceaux. Si la voie hiérarchique s'arrête aux procureurs généraux, on autonomise complètement le monde de la magistrature, et celui-ci va se fixer ses propres règles, qu'elles soient de nature syndicale, des règles de copinage, d'usage ou encore résultant des pressions des uns et des autres. Pourtant, chaque niveau hiérarchique le sait, l'instruction protège les autorités locales, en l'occurrence le parquet.

Chacun sait que les instructions individuelles étaient exceptionnelles, devaient être argumentées et versées au dossier, et le fait d'y renoncer me semble une erreur de fond. Il faut en revenir à une logique simple : le procureur général ne tient pas son autorité de je ne sais quel angélisme, mais de vous-même, madame la garde des sceaux, membre d'un gouvernement responsable devant le chef de l'État, parce que nous sommes en Ve République, et devant nous, au titre du régime parlementaire. Si ce n'est plus le cas, comprenez bien que l'opinion va devenir de plus en plus populiste. « À quoi servez-vous, les uns et les autres, si chaque fois que quelque chose nous intéresse, vous nous expliquez que ce n'est vous, que c'est l'autre, qu'il faut aller voir le guichet d'à côté ? », va-t-on nous demander. Or ce qu'on attend de nous, c'est que l'on prenne les problèmes à bras-le-corps et qu'on l'assume, fût-ce en prenant des risques, et c'est ainsi que notre pays avancera. C'est le propre non pas de la démocratie, mes chers collègues, mais de la République, et je vous engage à y être attentifs.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion