Intervention de Gaby Charroux

Séance en hémicycle du 17 juillet 2013 à 15h00
Modernisation de l'action publique territoriale et affirmation des métropoles — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGaby Charroux :

…mais aux déclarations, je préfère les preuves d'amour. Plus sérieusement, je vais vous livrer un autre aperçu, une autre perception de la situation dans le département des Bouches-du-Rhône.

Selon l'idée que je m'en fais, l'honneur du débat parlementaire réside dans l'expression respectueuse d'avis différents. C'est ce à quoi je vais m'employer.

La coopération intercommunale « se fonde sur la libre volonté des communes d'élaborer des projets communs de développement au sein de périmètres de solidarité » : telle est la définition figurant à l'article L. 5210-1 du code général des collectivités territoriales. Le fondement de la coopération intercommunale réside donc bien dans la libre volonté des communes.

Permettez-moi de dire que le projet de loi que nous examinons est bien éloigné de ce principe. Il faut donc trouver une nouvelle définition de la coopération intercommunale, qui pourrait être la suivante : « La coopération intercommunale, avec la création des métropoles, se fonde sur l'obligation pour les communes d'élaborer des projets définis par une structure centralisée imposée par l'État. »

Telle est, mes chers collègues, la nature du projet de loi que nous allons examiner. Reconnaissez que nous sommes bien loin du concept de décentralisation. J'en veux pour preuve les dispositions du chapitre III du titre II relatives aux dispositions spécifiques à la métropole Aix-Marseille-Provence.

Les sénateurs, représentants élus des collectivités territoriales, ont pris une lourde responsabilité en émettant un vote favorable alors que sept sénateurs des Bouches-du-Rhône sur huit, 109 maires sur 119, représentant un million d'habitants, cinq présidents d'EPCI sur les six concernés et dix maires sur les dix-huit qui forment l'actuelle communauté urbaine de Marseille sont opposés à la création de cette structure centralisatrice. Je crains que, sous la pression conjuguée du Gouvernement et de M. Jean-Claude Gaudin, ces sénateurs n'aient pas pris réellement la mesure des spécificités de notre département, en décidant de créer une structure qui, dans les faits, ne pourra voir le jour sans le consentement des populations.

Combien de lois, dans l'histoire de notre pays, sont mort-nées faute d'avoir reçu une application concrète ? Dernièrement, la loi du 16 décembre 2010, qui portait sur le même sujet, est demeurée, dans notre département comme dans le reste du pays, au fond des tiroirs en raison de l'opposition unanime des élus et des citoyens. Dès 1972, la loi Marcellin, qui prétendait imposer des regroupements de communes, est restée également dans les mémoires comme un échec cuisant du législateur.

On peut se poser légitimement la question : à quoi sert-il, en matière de territoires et de décentralisation, de voter des lois à l'opposé des attentes des habitants et auxquelles les élus chargés de leur mise en oeuvre sont opposés ?

Cela est d'autant plus inacceptable que les membres de l'actuel gouvernement ont rejeté comme un seul homme la loi de 2010 instituant les métropoles et s'étaient engagés, si la gauche revenait au pouvoir, à abroger ces dispositions. Aujourd'hui, ce sont des dispositions similaires, mais encore plus contraignantes, qui sont soumises à notre examen.

À quels objectifs cela répond-il ? Celui de la réduction des déficits publics sous l'effet de la contrainte européenne ? De l'affaiblissement des services publics locaux, qui sont souvent le seul recours de nos concitoyens face aux politiques d'austérité qui les frappe de plein fouet ? Mais en quoi est-il plus important de satisfaire les désirs des technocrates de la Commission européenne – je généralise quelque peu – que de répondre aux attentes légitimes des habitants ?

Vous n'allez tout de même pas provoquer une nouvelle « guerre des demoiselles », à l'image de celle engendrée par la décision de Charles X, en 1832, d'ôter aux communes leurs prérogatives domaniales.

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