Intervention de Gérard Masson

Réunion du 3 octobre 2012 à 9h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Gérard Masson, président de la Fédération française handisport et président du Comité paralympique et sportif français :

En ce qui concerne la chronologie Jeux olympiques-Jeux paralympiques, sachez qu'il n'y a pas un pays au monde qui serait capable de les organiser simultanément, simplement à cause des installations : il faudrait deux stades olympiques et quatre piscines de cinquante mètres car les disciplines paralympiques cohabitent mal. Un malvoyant peut difficilement courir aux côtés d'une personne qui a été amputée d'une jambe. Quant aux quinze jours de délai entre les deux, ils tiennent à des raisons logistiques et biologiques. Il faut trois jours pour arranger les installations et les athlètes doivent avoir le temps de se remettre du décalage horaire. Douze heures de décalage nécessitent douze jours d'adaptation et certaines délégations ne peuvent pas arriver avant l'ouverture du village. Il n'y a pas moyen de réduire le délai. Réjouissons-nous plutôt d'avoir deux belles manifestations.

La Fédération française handisport et la Fédération française de sport adapté ont toujours eu la volonté de favoriser le sport pour tous. La Fédération française handisport gère 35 disciplines, dont 16 étaient présentes aux Jeux paralympiques. Le foot en fauteuil électrique est la discipline la plus importante en nombre d'équipes mais il ne figure pas aux Jeux paralympiques. Il s'adresse aux plus grands handicapés puisque les joueurs sont tous des myopathes. Nous ne l'abandonnerons pas pour avoir une médaille de plus. Et les ministres successifs n'ont jamais songé à tenir une comptabilité des médailles paralympiques parce que tous les handicaps ne sont pas représentés. Ainsi les sourds ne participent pas aux Jeux paralympiques mais on ne renoncera pas pour autant au budget qui leur est destiné. J'espère que cet état d'esprit subsistera.

Comment développer le handisport et faire faire du sport aux personnes handicapées ? Tout le monde s'accorde sur l'idée d'envoyer les enfants handicapés dans les écoles « normales ». Mais les quelque 200 000 élèves qui les fréquentent ne sont plus dans les écoles spécialisées qui constituaient autrefois notre pépinière, et ils sont pratiquement tous dispensés de sport… Pendant très longtemps, par facilité, j'ai accusé les ministres et l'éducation nationale, mais ce sont les parents qui dispensent les enfants de sport, à cause de notre conception du handicap et du système éducatif. Il ne viendrait à l'esprit de personne de dispenser sa progéniture de français ou de physique. Pour citer mon expérience personnelle, j'étais très jeune quand j'ai eu mon accident, et ma mère faisait tout pour qu'il ne m'arrive rien de plus grave.

En 1948, Guttmann a fait entrer le sport à l'hôpital parce que plusieurs pilotes de la Royal Air Force n'aspiraient à rien d'autre qu'à mettre la main sur un cachet qui les ferait disparaître. Le médecin leur a fait faire du sport, parce qu'il n'arrivait pas à les intéresser à la musique ou à la peinture. Il leur a ainsi fait découvrir quelque chose sur eux-mêmes et leur a rendu la joie de vivre. Il faut essayer de trouver des remèdes à la situation présente sans compter seulement sur l'éducation nationale ou sur France Télévisions. Nous devons faire un effort collectif pour aller chercher les enfants là où ils sont.

Bien sûr, il faut plus de moyens ; oui, plus de visibilité – merci, Daniel Bilalian ! –, pour changer le regard sur les personnes handicapées. En tout cas, des progrès ont été faits depuis Sydney, où j'avais croisé Marie-George Buffet dans un ascenseur. Et si je suis ici, c'est grâce à elle qui m'a secoué comme il fallait, et à Béatrice Hess qui a raflé 9 médailles d'or à Sydney. Nos résultats sont irréguliers, comme dans le reste du sport français… En tout cas, le développement passe par les fédérations qui accueillent les personnes en situation de handicap. Notre pays dispose des structures nécessaires, mais il faut que les mentalités changent et 2012 devrait marquer un tournant. Pour avancer, nous devons être tous partenaires et avoir plus de moyens financiers. Sur le terrain, nous avons besoin de plus en plus de professionnels. Aujourd'hui, le sport pour handicapés reste aux mains des amateurs et, pour avoir un club France aux Jeux paralympiques, il faudrait un budget comparable. Or, c'est le jour et la nuit avec les Jeux olympiques, mais peut-être une lueur point-elle à l'horizon ?

Monsieur Braillard, les championnats du monde d'athlétisme handisport vont avoir lieu à Lyon en 2013. Aidez-nous, et vous aussi Daniel Bilalian, en diffusant des images ! Si nous arrivions à faire connaître ces épreuves, ce serait une chance.

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