Intervention de Marylise Lebranchu

Séance en hémicycle du 16 juillet 2013 à 15h00
Modernisation de l'action publique territoriale et affirmation des métropoles — Présentation

Marylise Lebranchu, ministre de la réforme de l’état, de la décentralisation et de la fonction publique :

Madame la présidente, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le président de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, qui avez tant travaillé, mesdames et messieurs les rapporteurs des commissions saisies pour avis, mesdames, messieurs les députés, le Sénat, après un travail acharné, vous a laissé un énorme chantier législatif. Je tiens d’abord à vous remercier. J’ai vu, monsieur le président de la commission des lois, l’agenda que nous vous avons imposé, avec l’ensemble des projets de loi et des propositions de loi qu’il vous a été demandé d’examiner. Avec vous, je remercie l’ensemble des commissaires, qui ont su, malgré tout, faire face à l’arrivée d’un texte revu par le Sénat ainsi qu’à un très grand nombre d’amendements, lesquels ont été traités les uns après les autres avec beaucoup de sérieux. À travers vous, je remercie donc l’ensemble des parlementaires de tous les bancs qui ont affronté ce travail.

Pierre Mauroy disait que « nos institutions locales s’enracinent dans l’histoire du pays ». « La commune et le département, ajoutait-il, ont une existence séculaire. La région, dans son découpage, aussi insatisfaisant soit-il, est désormais connue et appréciée de l’ensemble de nos concitoyens. Cette organisation a certes l’inconvénient d’une superposition de niveaux. Mais elle a aussi pour contrepartie des légitimités et un enracinement démocratique qu’il serait vain de bousculer au nom de l’efficacité. » C’est en relisant ces mots de Pierre Mauroy, qui nous a récemment quittés, qu’Anne-Marie Escoffier et moi-même avons travaillé, sous l’autorité du Premier ministre, à l’écriture du projet de loi remanié par le Sénat. Treize ans nous séparent de ces mots qui, sous la plume de Pierre Mauroy, dessinaient sa France territoriale de 2015.

Je ne résiste pas à l’envie de vous faire part de la fin de sa citation : « La France est bâtie autour d’un pouvoir régional fort, apte à engager la compétition économique avec ses partenaires européens, dépassant l’exception française liée à l’éparpillement communal par le jeu d’une coopération inter-communale qu’il convient peut-être – et je lis ces mots en souriant – de doter par l’élection au suffrage universel direct d’une légitimité démocratique nouvelle. » Nous avons donc d’autres chantiers qui nous attendent peut-être. Il ajoutait également que ces intercommunalités, étant dotées d’un conseil départemental aussi, à côté d’elles – dont le mode d’élection est fortement modernisé –, des compétences sont, en application du principe de subsidiarité, transférées au niveau où elles peuvent être le mieux exercées. Nous avons essayé de répondre à ce challenge-là.

Le Sénat aussi, avant vous, a mené un travail acharné. Au cours de plusieurs séances, qui ont montré à quel point ce besoin de changement est un besoin qui ne s’arrête pas aux strictes frontières des familles politiques, nous avons eu des débats intéressants mais très transpartisans. Je suis certaine que nous allons retrouver les mêmes. La philosophie du Gouvernement a été simple : il faut écrire l’action publique du XXIe siècle et prendre en compte les conséquences d’une crise majeure commencée en 2008, mais surtout prendre en compte l’absolue nécessité de dessiner une France juste, solidaire, dynamique et compétitive.

Chaque enfant de France doit être assuré de pouvoir choisir son avenir malgré les contraintes liées à sa naissance. J’ai envie de dire : à égalité de chances, on perd l’égalité des possibles selon que l’on naît ici ou que l’on naît là. Aujourd’hui, les inégalités territoriales s’ajoutent aux inégalités sociales. Le Gouvernement s’engage à ce que chaque enfant de France ait égalité d’accès à ses droits et à son avenir.

De même, chaque jeune de France devrait pouvoir regarder son avenir avec confiance. Pourtant, nous en sommes loin. Une intercommunalité en difficulté, un département dont les comptes ne permettent plus de financer l’accompagnement, une région qui ne peut plus assurer au mieux la construction des lycées ou l’entrée dans l’économie de la connaissance, c’est-à-dire le droit à la connaissance, ne peut plus dire à chaque jeune de France qu’il a le droit à l’égalité des possibles. C’est pourquoi nous allons ensemble, mesdames, messieurs les députés, parler à nouveau de formation professionnelle, d’apprentissage et de moyens pour les enfants de France.

Chaque citoyen de France doit aussi avoir, là où il vit, là où il travaille, les moyens de se loger, les moyens de se déplacer. Aujourd’hui, les inégalités de logement comme de transport sont violentes.

Chaque entreprise, chaque agriculteur doit trouver un interlocuteur attentif à toutes les étapes de la création de son activité et tout au long de la vie de celle-ci, et je n’oublie pas l’engagement des grandes villes portuaires, des départements ou des régions qui ont su, « parfois même sans l’État », disent-ils, répondre aux grands chantiers des transports maritimes ou de la pêche.

Chaque famille de France doit savoir qu’elle importe à l’action publique et que, compétence après compétence, il s’agit avant tout d’améliorer sa vie.

L’État s’engage sur tous ces sujets. Mais l’action publique, si elle est une en tant qu’exercée par l’État, est aussi et pour beaucoup exercée par les collectivités territoriales. Le choix fait par le Gouvernement est simple : faire confiance aux élus, arrêter les discours rampants, parfois bruyants, à propos d’élus trop nombreux, d’élus laxistes laissant filer les dépenses, d’élus gabegiques et inefficaces. En effet, qu’ils soient dans les communes, dans les départements ou dans les régions, les élus ont au contraire permis, et nous devons en être tous convaincus, de mieux résister à la crise majeure que nous connaissons.

En revanche, après les observations formulées par les élus eux-mêmes, les gouvernements successifs ont décidé de conduire des évaluations de politique publique, celui-ci a fortiori en tenant compte du rapport de la Cour des comptes ou encore du rapport Rebière-Weiss sur l’administration territoriale de l’État. Ainsi, ce matin, au cours d’une longue réunion, nous avons scellé dans le marbre le pacte de confiance et de stabilité avec l’ensemble des représentants des associations d’élus, et Anne-Marie Escoffier et moi-même avons dit, sous l’autorité du Premier ministre, à quel point nous sommes non seulement attachées à mieux définir les compétences mais aussi, à chaque pas de cette définition, à mieux évaluer avec eux nos politiques publiques.

Je pense que nous sommes unanimes à vouloir éviter ce qu’on a nommé « les doublons ». Le Gouvernement, après la lecture au Sénat, veut définir avec vous un cadre clair de l’exercice des compétences. Il s’agit donc de préciser la notion de chef de file, inscrite dans la Constitution depuis 2003 mais restée trop floue. Des propositions vont dans ce sens et je sais que nos débats seront riches et précis. Nul ne doit pouvoir affirmer désormais que l’action publique est complexe, opaque et inefficace.

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