Intervention de Serge Letchimy

Réunion du 5 novembre 2013 à 17h00
Délégation aux outre-mer

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Letchimy :

Je félicite les rapporteurs pour la qualité de leur travail et également le président de la Délégation pour avoir été à l'initiative de ce rapport qui permet de bien préparer en amont les discussions sur la future loi d'avenir pour l'agriculture. On ne peut que se féliciter de ce rôle, extrêmement sérieux, que joue la Délégation pour anticiper les discussions au Parlement et pour préparer les débats.

D'emblée, j'ai un problème avec le futur projet de loi. Le Président de la République s'était engagé à ce qu'il y ait un projet de loi spécifique concernant l'agriculture outre-mer. Je comprends que l'on a préféré introduire les dispositions de ce projet de loi spécifique dans un texte d'orientation portant sur l'agriculture en général ; mais ce que je comprends moins c'est la raison pour laquelle on n'a introduit dans le texte que deux ou trois articles très condensés, et même pas un véritable chapitre. Il faut agir auprès des différents ministres intéressés pour que, dans le projet de loi, il figure un véritable chapitre sur l'agriculture outre-mer.

D'autant que les dispositions qui pourraient être contenues dans ce futur chapitre apparaissent comme étant vitales pour la vie économique de nos territoires et notamment pour l'évolution de la production destinée à la consommation locale. Il existe en effet bon nombre de secteurs où l'on importe à peu près la totalité de ce que l'on consomme réellement. Dans les hôtels de Martinique, par exemple, j'ai pu relever que 82 % de ce qui était consommé était produit à l'extérieur. Il faut donc faire un effort sur le développement endogène de nos pays.

Le second problème que je distingue, cette fois à propos du rapport, est que ce dernier parle des filières, mais qu'il ne prend pas parti sur les produits. Le raisonnement sur les filières n'est intéressant que si l'on cible les produits. J'aurais ainsi aimé avoir des pistes pour le développement de certains produits comme le cacao, le café, etc.

En troisième lieu, je souhaite évoquer l'application de l'article 349 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Je m'en réfère au rapport que j'ai rendu sur cette question à M. le Premier ministre et où j'ai montré qu'il y avait un refus de la Commission d'appliquer cet article avec allant, ce qui pénalise l'agriculture. C'est ainsi que, lorsqu'il est question de prévoir des aides pour des filières complètes de produits, il n'est pas rare que Bruxelles ne réponde que par quelques crédits dispersés. L'irritation des acteurs de la filière « banane » à l'égard du commissaire européen à l'agriculture, M. Dacian Ciolos, lorsque celui-ci s'est proposé de prélever sur les crédits de cette filière pour financer la diversification, prouve bien d'ailleurs qu'il y a un problème en ce domaine et que l'on ne peut pas se contenter de « saupoudrer » les crédits du POSEI.

Enfin, je rappelle qu'il figure, dans le cadre du traité européen, une clause de sauvegarde en cas de forte concurrence exercée sur tel ou tel produit. Pendant une durée de cinq ou six ans, cette clause permet une protection minimale des produits en danger. On devrait faire jouer cette clause plus souvent et même pratiquer des quotas renversés pour protéger les productions locales – c'est-à-dire que, de même qu'il existe, par exemple, un quota de banane à l'exportation pour préserver les marchés mondiaux, de même, on pratiquerait des quotas renversés à l'importation, le temps que les produits locaux se développent et prospèrent.

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