Intervention de Guy Geoffroy

Séance en hémicycle du 29 novembre 2013 à 15h00
Renforcement de la lutte contre le système prostitutionnel — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuy Geoffroy, président de la commission spéciale :

En Europe, ce que nous avions constaté en voyageant avec Danielle Bousquet et d’autres dans les pays voisins et amis se confirme : on nous attend. On nous attend en Espagne, pour mettre un terme à ce que les Espagnols eux-mêmes ont appelé leur hypocrisie publique. On nous attend aux Pays-Bas, où les Hollandais veulent sortir des zones grises qui les empêchent d’avancer et qui les ont emmenés dans le mur. On nous attend en Allemagne, parce que l’on a compris outre-Rhin qu’en ouvrant les bordels, on ouvrait grand la porte aux réseaux de prostitution.

Colette Capdevielle a parlé de l’impossible aveu. Quelle évidence ! Comment demander à une personne prostituée qu’elle dise devant les caméras qu’elle est victime de sévices et qu’elle a été placée dans cette situation contre son gré ? Elle ne le fera pas, bien sûr ! Mais lorsqu’elle en sort, elle le dit. Je prendrai l’exemple d’Ulla, cette ex-grande pasionaria de la cause prostitutionnelle voilà presque quarante ans. À l’époque, Ulla n’avait pas de mots assez durs contre ceux qui osaient imaginer mettre un frein au développement de la prostitution, accusés, comme nous aujourd’hui, d’être vétustes et poussiéreux. Il y a quelques temps, retirée des affaires, Ulla nous interrogeait avec un sourire complice : comment avez-vous pu me croire ? Elle n’était pourtant pas victime de réseaux internationaux ; mais elle n’avait alors pas d’autre choix que d’exprimer ainsi, d’une certaine manière, la dignité qui restait en elle.

Gwendal Rouillard a évoqué l’exemple suédois. Que n’entend-on à ce propos ! À partir des réussites constatées, on construit, sans les étayer, des démonstrations pour dire que ce modèle ne marche pas. Quelle facilité ! Mais que toutes les vedettes de la planète on beau le répéter en concert, cela ne fait qu’un formidable flop !

Pour ceux de ma génération, qui avaient entre quinze et vingt ans dans les années 1960, la Suède, c’était l’aspiration à la libération des moeurs, à la liberté sexuelle, à l’égalité entre les femmes et les hommes – que nous n’appelions pas encore ainsi, surtout nous, les jeunes garçons.

Je pose la question : comment ce pays de la liberté, de l’égalité, de la lutte contre toutes les violences a-t-il bien pu devenir en trente ans vieillot et rétrograde au point de décider, le premier, que la société devait réfléchir sur elle-même, sous la contrainte de la responsabilité et non dans l’hypocrisie d’une loi qui interdit ? Ce pays est en cohérence profonde avec ce qui fit de lui, il y a quarante-cinq ans, un des précurseurs de notre aspiration collective ! Méditons cet exemple, c’est essentiel.

Mon dernier mot sera pour Jean-Louis Borloo : avec l’honnêteté qu’on lui connaît, il a avoué qu’il ne savait pas. Si nous pouvions faire oeuvre utile, ce serait en réussissant, par nos propos convergents et transpartisans, à le faire progresser dans sa connaissance et à le convaincre de nous rejoindre mercredi, au rendez-vous de ce texte.

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