Intervention de Najat Vallaud-Belkacem

Séance en hémicycle du 29 novembre 2013 à 15h00
Renforcement de la lutte contre le système prostitutionnel — Article 3

Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du gouvernement :

La présentation de cet amendement me donne l’occasion de répondre aux orateurs qui se sont exprimés sur l’article. M. Coronado disait tout à l’heure que jusqu’à présent, les pouvoirs publics sont très loin d’avoir été à la hauteur de leur mission d’accompagnement des personnes prostituées. C’est vrai : je partage totalement cette opinion. Nous avons failli, en nous contentant bien souvent de déléguer aux associations d’accompagnement des personnes prostituées cette mission essentielle. Pis encore, nous ne leur avons pas donné les moyens suffisants pour l’accomplir.

La véritable nouveauté, la véritable révolution opérée par cette proposition, ce n’est pas simplement rendre les clients responsables : c’est aussi, précisément, rendre l’État responsable du sort des personnes prostituées, grâce à ce parcours de sortie de la prostitution. Ce parcours s’appuiera sur des associations partenaires et des collectivités territoriales. Il sera doté, comme je le disais tout à l’heure, d’un fonds de 20 millions d’euros par an. L’organisation de tout cela relèvera de la responsabilité de l’État. Telle est la véritable nouveauté apportée par cette proposition de loi.

Les amendements nos 60 rectifié et 65 que je vous soumets visent à lever un certain nombre de malentendus pesant sur ce parcours de sortie de la prostitution. Le premier malentendu porte sur la question des associations sur lesquelles l’État s’appuiera dans le cadre de ce parcours. Que les choses soient claires : nous nous appuierons sur toutes les associations qui accompagnent les personnes prostituées, quelles que soient leur origine et leur doctrine. Dans notre esprit, il n’a jamais été question du contraire. Je pense, en disant cela, à des associations qui agissent déjà sur le terrain, comme l’Amicale du Nid, les Amis du Bus des femmes, le Mouvement du Nid, Ippo, à Bordeaux, Médecins du Monde, mais aussi à des associations généralistes qui ont mis en place des programmes d’accompagnement des personnes prostituées et qui adhèrent, par exemple, à la FNARS – la Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale. Comme vous le voyez, ces associations sont nombreuses : nous aurons besoin de chacune d’elles.

Nous ne voulons pas faire de distinctions entre ces associations. Soyez certains que chacune trouvera sa place, de manière à ce que l’accompagnement des personnes engagées dans un parcours de sortie de la prostitution soit le plus efficace possible. C’est la seule priorité qui nous guidera.

Par ailleurs, ce parcours et ce fonds ont pour objet d’offrir une solution globale à la personne prostituée. Dans la logique de ce parcours, des mesures de protection sont offertes, ainsi que des soins, des actions d’insertion sociale et professionnelle. Au fond, ce parcours est une mesure clé pour offrir des alternatives à la prostitution.

En échangeant avec les associations, il nous est apparu nécessaire de clarifier un certain nombre des conditions d’organisation de ce parcours de sortie de la prostitution. Premièrement, nous vous proposons de clarifier la rédaction de cet article pour ce qui touche à l’agrément des associations. Nous vous soumettons une rédaction plus ouverte, qui permettra donc de soutenir toutes les actions d’insertion destinées aux prostituées. Deuxièmement, pour répondre à ce que disait M. de Courson, je ne crois pas que ce parcours de sortie de la prostitution doive prendre la forme d’un contrat. Les associations ont beaucoup insisté sur ce point et je crois qu’elles ont eu raison de le faire. Les prostituées et les autorités publiques ne sont pas placées sur un pied d’égalité : elles ne sont pas dans la situation des parties à un contrat. Il ne faut donc pas parler d’un contrat, mais d’une simple main tendue, d’un soutien, dont le suivi devra être assuré en lien avec les associations.

L’engagement d’une personne dans un parcours de sortie de la prostitution sera acté par l’autorité administrative et l’association qui l’accompagne personnellement. Le suivi sera assuré par la même instance administrative, qui veillera à ce que les droits et la sécurité de cette personne soient effectivement garantis.

Voilà ce que je peux vous dire. Pour le reste, nous faisons confiance aux individus. Comme Mme Clergeau le disait tout à l’heure, n’ayant jamais cru que la prostitution puisse être un projet de vie, je crois a contrario que dès que nous tendrons la main à ces personnes prostituées, elles choisiront autre chose que la prostitution.

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