Intervention de Michel Lesage

Séance en hémicycle du 10 décembre 2013 à 21h45
Modernisation de l'action publique territoriale et affirmation des métropoles — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Lesage :

Madame la présidente, mesdames les ministres, mes chers collègues, j’interviens sur des articles du projet de loi dont on parle moins, ceux qui sont relatifs à la politique de l’eau, à la création d’une compétence « gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations » et à son affectation au bloc communal. Les articles 35B, C, D et E viennent concrétiser des réflexions menées depuis plusieurs mois dans le cadre de l’évaluation de la politique de l’eau en France et déclinent la feuille de route fixée par le Gouvernement à l’occasion de la conférence environnementale des 20 et 21 septembre dernier.

L’eau, on le sait, est l’objet de multiples enjeux. Le temps de l’eau facile est révolu. L’eau est désormais fragile et le réchauffement climatique accentue les tensions. Si l’eau est un bien commun, c’est aussi une ressource vitale qui doit être gérée à long terme. C’est également une cause de risques majeurs comme en témoignent les inondations dramatiques que notre pays a connues, avec plus de quatre-vingt-dix morts lors de la dernière décennie.

Les questions liées à l’eau en France ne relèvent pas seulement d’hydrologie, mais d’abord et surtout de gouvernance. Les articles 35B à 35E apportent des réponses par la création de cette compétence GEMAPI et son attribution au bloc communal, d’abord aux communes et, par transfert automatique, aux EPCI à fiscalité propre.

Une réponse est ainsi apportée au problème de la maîtrise d’ouvrage de la gestion des cours d’eau. Une nouvelle ressource facultative et plafonnée est aussi créée pour le financement de cette compétence.

Dans son rapport du 5 juillet 2012 sur les enseignements des inondations de 2010 sur le littoral atlantique, avec Xynthia, et dans le Var, la Cour des comptes rappelait la contribution de l’entretien des cours d’eau à la prévention des inondations.

La gestion des cours d’eau, le rétablissement de leur continuité écologique et de leur morphologie sont également des éléments clés pour lutter contre les pollutions et atteindre les objectifs de la directive-cadre européenne.

Or, faute de répartition claire des compétences, il est souvent difficile d’identifier des maîtres d’ouvrage pour porter les actions. En effet, la loi actuelle, datant de 1807, attribue au propriétaire riverain la responsabilité de l’entretien des berges et des ouvrages de protection. Cette situation n’est plus tenable au XXIe siècle. Cela a conduit le plus souvent à la réalisation des travaux par la maîtrise d’ouvrage publique au titre de l’intérêt général. Tous les rapports publiés mais aussi la succession d’événements d’inondation de grande ampleur, avec des conséquences graves pour la sécurité des personnes et des biens, viennent régulièrement souligner et dénoncer cet état de fait.

Comme je l’ai souligné dans le rapport sur l’évaluation de la politique de l’eau, que j’ai remis au Premier ministre en juin, les collectivités territoriales sont bien l’échelon pertinent pour structurer cette nouvelle gouvernance de l’eau, en complément de leurs compétences sur l’eau potable et l’assainissement. Déjà beaucoup d’intercommunalités se sont d’ailleurs engagées dans cette gestion de l’eau des milieux aquatiques – des intercommunalités qui couvrent désormais l’ensemble du territoire national, ce qui est une garantie pour qu’il y ait partout des maîtres d’ouvrage.

L’urbanisme, on le sait, est une compétence du bloc communal, qu’il s’agit donc de faire converger avec la politique de l’eau. Cette compétence apportera plus de réactivité et de responsabilité, plus de lisibilité et de cohérence, mais aussi plus de souplesse dans l’action, afin de tenir compte de l’histoire et de la diversité des territoires.

J’ajoute qu’il sera nécessaire de trouver la bonne articulation entre cet échelon territorial institutionnel et l’échelle hydrographique du bassin versant engagée par la loi sur l’eau de 1964. Cette cohérence pourra se faire par le biais de syndicats mixtes, d’établissements publics territoriaux de bassin auxquels les EPCI pourront transférer tout ou partie de la compétence. Les comités de bassin, avec les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux, les conseils régionaux, avec les conférences territoriales de l’action publique proposées dans ce même texte, et les préfets de région, coordonnateurs de bassin, pourront et devront établir cette cohérence indispensable, et ce sur l’ensemble du territoire national.

Cette première avancée est amenée à être suivie par d’autres, dans le cadre d’une vision globale de la politique de l’eau. Il me paraît donc indispensable de créer un comité de suivi et d’évaluation de la mise en oeuvre de ces articles concernant la gouvernance de l’eau. Ce comité devrait associer l’ensemble des ministères, les parlementaires et les principales instances concernées.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion