Intervention de Bernard Cazeneuve

Séance en hémicycle du 19 décembre 2013 à 9h30
Loi de finances pour 2014 — Présentation

Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget :

Madame la présidente, monsieur le rapporteur général, mesdames et messieurs les députés, nous arrivons au terme d’un long processus parlementaire qui nous a conduits à passer de très longues heures ensemble, pendant de nombreuses semaines, pour examiner un ensemble de lois financières : le présent projet de loi de finances pour 2014, qui fait l’objet de cet ultime échange, le projet de loi de finances rectificative pour 2013, et le projet de loi de financement de la Sécurité sociale.

Pour ce qui est du projet de loi de finances pour 2014, je serai très bref, compte tenu des nombreux échanges que nous avons eus au cours des dernières semaines. Ce projet témoigne d’une triple volonté de la part du Gouvernement. Tout d’abord, il s’agit de faire en sorte que la trajectoire de redressement de nos comptes publics dans laquelle nous sommes engagés depuis notre arrivée aux responsabilités, se poursuive, s’amplifie, s’accélère. Les déficits diminuent. À notre arrivée, le déficit public était au niveau de 5,3 % du PIB. En 2012, nous étions à 4,8 %. C’est 0,3 % de plus que la cible que nous nous étions fixée, mais nous avons été obligés de réviser notre participation au budget de l’Union européenne, sous-budgétée par la précédente majorité, et d’intégrer les effets du contentieux relatif à Dexia. Il nous a donc fallu éponger en 2012 un certain nombre d’événements que nous considérons comme exceptionnels, résultat d’un héritage. En 2013, nous souhaitons être à 4,1 % et notre objectif pour 2014 est de 3,6 %. Les déficits ne cessent donc de diminuer.

Notre effort structurel, celui sur lequel nous nous sommes engagés devant la Commission européenne, est bien réel : 1,3 % en 2012, ce qui est considéré comme un effort exceptionnel par la Cour des comptes de même que par le Haut conseil des finances publiques, 1,7 % en 2013, et 0,9 % pour 2014. La trajectoire d’ajustement structurel est tenue.

Il en est de même pour les comptes sociaux du régime général et de la protection sociale : 20,8 milliards de déficit en 2011, 17,5 milliards en 2012, 16,2 milliards en 2013, et nous poursuivons un objectif de 12,8 milliards pour l’an prochain. Depuis que nous sommes aux responsabilités, le déficit a ainsi diminué de 8 milliards. Si nous maintenons cette trajectoire de redressement des comptes sociaux, nous serons, à la fin de la législature, à 4 milliards, c’est-à-dire que nous aurons divisé par cinq le déficit des comptes du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse en cinq ans.

Je le redis avec beaucoup de force ce matin, car il y a une forme de travestissement de la réalité dans les discours qui laissent à penser que les déficits augmentent ou dérapent, alors que la séquence que je viens d’indiquer, chiffres à l’appui, montre de façon incontestable la diminution du déficit et le redressement de nos comptes.

Le deuxième point sur lequel je voudrais insister, par-delà le redressement des comptes, c’est la volonté du Gouvernement d’ajuster nos budgets, presque exclusivement pour 2014 et exclusivement jusqu’à la fin du quinquennat, par un effort d’économies en dépenses. Les 15 milliards d’économies que nous réalisons cette année ne sont pas, comme j’ai pu l’entendre ici ou là, des économies virtuelles. Les 9 milliards qui sont pris sur le budget de l’État résultent d’un effort considérable de la part des administrations centrales et des opérateurs de l’État. De nombreux facteurs entrent en jeu : stratégie d’investissement et de participation, plafonnement des taxes affectées, dématérialisation et numérisation du fonctionnement de nos ministères, effort considérable de rationalisation du fonctionnement des opérateurs de l’État, dont les budgets ont augmenté de 15 % au cours du dernier quinquennat et diminuent de 4 % dans la programmation 2014, maîtrise de la masse salariale…

Tout cela témoigne, s’il en était besoin, de l’effort considérable de maîtrise des dépenses publiques sur lequel nous nous sommes engagés, pour l’État comme pour la sphère sociale. Aux 9 milliards d’économies sur l’État s’ajoutent en effet les 6 milliards de la sphère sociale, qui résultent pour moitié d’une maîtrise exceptionnelle des dépenses d’assurance maladie. Le budget de l’assurance maladie a été exécuté l’an dernier un milliard sous la norme, et pour 2013 nous sommes déjà 650 millions sous la norme que nous nous sommes fixée. Cela montre un effort de maîtrise de la dépense absolument exceptionnel.

Des déficits et une dépense publique qui diminuent, une volonté d’accroître la maîtrise dans les années à venir : cette trajectoire, mesdames et messieurs les députés, nous n’y dérogerons pas. Elle est d’ailleurs la clé de la réussite du grand chantier lancé par le Premier ministre et le Gouvernement pour la réforme de notre fiscalité. Il n’y aura pas de réforme de la fiscalité si nous ne parvenons pas à faire baisser les prélèvements obligatoires. Notre trajectoire, au titre du programme de stabilité présenté devant l’Union européenne, nous engage à une diminution de 0,3 % des prélèvements d’ici à la fin du quinquennat. C’est cette diminution qui peut donner de la lisibilité à la réforme fiscale. Pour cela, il faut réaliser des économies en dépenses jusqu’à la fin du quinquennat, et faire en sorte que cette grande réforme fiscale permette de poser des principes simples et solides qui jalonneront nos échanges et nos choix au cours des prochains mois et des prochaines années. Simplification, stabilisation, stimulation de la croissance et justice fiscale : voilà quatre grands principes à partir desquels nous pourrons cheminer ensemble. Ces principes sont d’ores et déjà inclus dans le projet de loi de finances pour 2014.

Diminution des déficits, diminution des dépenses, trajectoire des finances publiques privilégiant, jusqu’à la fin du quinquennat, la baisse de la pression fiscale, les économies en dépenses et la réforme de notre fiscalité : à tout cela s’ajoute la volonté que deux préoccupations soient durablement au coeur de l’action que conduisent ensemble la majorité et le Gouvernement.

Première préoccupation : la modernisation de l’économie, l’accompagnement dans la durée de l’inversion de la courbe du chômage et du retour de la croissance, le renforcement des actions de redressement de notre appareil productif. Faut-il rappeler que le projet de loi de finances pour 2014 consacre des choix, déterminés pour certains d’entre eux dans la concertation, qui visent à améliorer le financement de l’économie au profit des entreprises ? Je veux parler de la réforme des plus-values mobilières, du nouveau dispositif d’accompagnement des jeunes entreprises innovantes, du dispositif corporate venture qui permet d’accompagner de grands groupes qui interviennent dans le financement des PME-PMI en prenant des risques, de la réforme du dispositif d’amortissement pour soutenir la modernisation et la robotisation de notre appareil productif, de la réforme, qui ne figure pas dans le projet de loi de finances pour 2014 mais dans le collectif pour 2013, de l’assurance-vie, qui vise à mieux orienter l’épargne vers le logement et le développement de l’économie, ou encore de la montée en puissance du crédit d’impôt compétitivité emploi qui permettra un allégement net de charges sur les entreprises de 10 milliards. J’indique également que les prélèvements qui pèsent sur les entreprises diminueront, en plus du CICE, de 2 milliards en 2014. Agrégés, le CICE et cet allégement de fiscalité représentent un allégement de 12 milliards pour les entreprises. Par conséquent, quand on dit que la charge fiscale sur les entreprises augmente, c’est faux.

Notre volonté, en faisant tout cela, est de retrouver le chemin de l’emploi et de la croissance et de redresser notre appareil productif. Or cela ne peut se faire sans progression du pouvoir d’achat des ménages. Celui-ci, comme l’investissement des entreprises, est l’un des deux facteurs de la demande, qui doit entraîner, s’il est stimulé, le retour de la croissance. C’est la raison pour laquelle nous avons réindexé le barème de l’impôt sur le revenu, créé une décote et augmenté le plafond du revenu fiscal de référence. C’est la raison pour laquelle, à la demande des parlementaires, nous avons accepté de ne pas revenir sur les niches fiscales relatives aux frais de scolarité, ce qui représente 450 millions d’euros en faveur du pouvoir d’achat des ménages. C’est la raison pour laquelle nous étendons, pour 400 millions d’euros, les tarifs sociaux de l’électricité, nous augmentons de 2 % au-delà du SMIC le revenu de solidarité active et nous créons pour les étudiants cherchant à accéder à l’autonomie et à la connaissance 55 000 bourses supplémentaires qui viennent s’ajouter aux efforts déjà consentis pour assurer le financement de celles qui avaient été promises sans être financées.

C’est la raison pour laquelle nous avons également instauré un taux réduit de TVA de 5 % pour la rénovation thermique, de manière à ce que la facture d’électricité ne pèse pas davantage sur le pouvoir d’achat des ménages les plus défavorisés, et un taux réduit de TVA sur le logement social et les petites réparations pour que les loyers dans les zones tendues, qui constituent un poste de dépenses important, n’augmentent pas davantage.

Bien entendu, certains considèrent que l’on peut toujours faire plus avec ce que l’on n’a pas. Mais ce qui est important, c’est de rendre compatibles ce que nous faisons en faveur du pouvoir d’achat, de la réduction des déficits et de la compétitivité de notre appareil productif. Il faut en effet rendre compatibles la volonté politique qui nous anime et l’esprit de responsabilité qui doit présider à notre action.

Je rappelle enfin la volonté résolue du Gouvernement de lutter contre la fraude fiscale. Chaque euro que nous récupérons sur ceux qui ont décidé de leur propre initiative de ne pas payer d’impôts est un euro de moins que nous prélevons sur les Français qui contribuent par leurs impôts au redressement des comptes alors qu’ils ne font pas nécessairement partie des plus fortunés, car tous les Français ont été appelés à faire un effort. Cette lutte contre la fraude fiscale constitue un axe très fort de la politique du Gouvernement et nous en attendons 2 milliards d’euros dans le budget de 2014. La circulaire qui a été promulguée conduit un très grand nombre de ceux qui avaient déposé leurs avoirs à l’étranger à revenir en France pour se mettre en conformité avec le droit. Cette action doit permettre d’atteindre l’objectif de 1 milliard d’euros de recettes sur les personnes physiques, ce qui correspond bien à ce que nous avons inscrit dans le budget pour 2014. Nous souhaitons également que le projet de loi contre la fraude fiscale, présenté avec Christiane Taubira et auquel vous avez abondamment contribué les uns et les autres, permette de renforcer les moyens de lutte et d’obtenir davantage de résultats encore. Tout ce que nous ferons dans les années qui viennent sera destiné à parvenir à moins de fraude, et, partant, moins d’impôt.

Pour conclure, je remercie très chaleureusement l’ensemble des parlementaires, toutes tendances politiques confondues, pour leur travail, pour leurs amendements, pour nos confrontations. Tout cela est consubstantiel à la démocratie parlementaire et très précieux pour le Gouvernement. Le texte de la loi de finances pour 2014 est sorti de l’exercice parlementaire plus fort, plus équilibré et plus charpenté qu’à son entrée. Cela est normal. Nul n’a jamais, en aucun domaine, assez de science pour être assuré de faire au mieux avant que le débat ne se noue, que les cerveaux ne se connectent, que les confrontations n’aient lieu. Je remercie donc tous ceux d’entre vous qui, par leurs amendements, ont permis à ce texte de se bonifier. J’ai une pensée particulière pour le rapporteur général,…

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