Intervention de André Chassaigne

Séance en hémicycle du 19 décembre 2013 à 9h30
Projet de loi de finances rectificative pour 2013 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Chassaigne :

Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, j’interviens une nouvelle fois au nom de Nicolas Sansu et de Gaby Charroux, qui sont retenus dans leurs circonscriptions.

Je voudrais moi aussi m’associer aux remerciements adressés à ceux qui travaillent sur les questions budgétaires. Je salue également la pugnacité du ministre et du rapporteur général, ainsi que leur volonté d’expliquer, de justifier et d’argumenter, même si les efforts déployés ne suffisent pas à convaincre les députés du Front de gauche.

Nous achevons l’examen de ce projet de loi de finances rectificative, lequel se distingue par quelques mesures dites de « financement de l’économie » qui, pour l’essentiel, visent à déresponsabiliser les banques et à pallier le rationnement du crédit bancaire autant que le manque de fonds propres des entreprises,

Si nous avons tous le souci de permettre aux entreprises de notre pays, particulièrement les PME et les entreprises de taille intermédiaire, de sortir des difficultés, les outils que vous proposez de mettre en place depuis un an nous semblent manquer leur objectif et retomber dans les travers de la gestion précédente.

Qu’il s’agisse du dispositif PEA-PMI ou de la réforme de l’assurance-vie proposée dans ce texte, votre propos est d’inciter les détenteurs de patrimoines très importants à investir. Vous le faites par la voie d’incitations fiscales ou de dispositifs d’abattements particulièrement attractifs. Le procédé est d’autant plus surprenant que vous aggravez par ailleurs la pression fiscale sur l’immense majorité de nos concitoyens, notamment les plus modestes.

Il n’est pas inutile de rappeler, comme l’a fait mon collègue Nicolas Sansu mardi dernier, que pour 90 % des 17 millions de souscripteurs de contrats d’assurance-vie, le montant épargné cumulé est inférieur à 50 000 euros, tandis que les 10 % restant rassemblent rien de moins que 64,8 % de l’encours, soit une somme de plus de 880 milliards d’euros et une moyenne légèrement inférieure à 530 000 euros, tandis que le centile le plus riche dispose de contrats d’une valeur moyenne de deux millions d’euros.

Les mesures proposées à l’article 7 vont surtout bénéficier à ces fameux 10 % dont la Cour des comptes a pu estimer le nombre à quelque 1 700 000 ménages. Vous vous êtes attachés à border un peu le dispositif pour limiter les effets d’aubaine, mais au fond, la question demeure la même. Ne serait-il pas plus efficace de s’attaquer aux causes du rationnement du crédit et de la faiblesse des fonds propres des entreprises, plutôt que de multiplier et d’accumuler les dispositifs d’incitation qui rendent notre législation toujours plus illisible, plus opaque et plus injuste ?

Le rationnement du crédit bancaire touche aujourd’hui l’ensemble des pays européens. Il pénalise les entreprises industrielles, et particulièrement l’industrie manufacturière, qui a vu les encours de crédit reculer de 5 % l’an passé.

Face à cette situation, votre stratégie consiste à encourager les PME et les ETI à recourir aux marchés vers lesquels vous voulez canaliser plus d’épargne en actions. Le risque n’est pas seulement d’accroître la dépendance des entreprises à l’égard des marchés, il est aussi de fragiliser l’épargne.

Si nous partageons l’objectif d’une meilleure mobilisation de l’épargne en faveur du tissu productif, cela pose au préalable l’exigence d’une profonde réforme du financement de l’économie. Nous avons, comme vous le savez, soutenu la création de la Banque publique d’investissement, au motif que celle-ci nous semblait un outil de nature à apporter un soutien efficace aux entreprises, leur permettant de s’émanciper des marchés et de retrouver les marges de manoeuvre nécessaires à l’investissement et à l’emploi.

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