Intervention de Camille de Rocca Serra

Séance en hémicycle du 22 janvier 2014 à 21h30
Ratification de la charte européenne des langues régionales ou minoritaires — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCamille de Rocca Serra :

J’ai suivi, depuis 2008, le travail incessant mené par Marc Le Fur sur cette question. Je peux témoigner qu’il est non seulement sincère et intellectuellement honnête, mais aussi clairvoyant.

J’ai bien relevé que Paul Giacobbi avait avoué quelques inquiétudes quant à la présente proposition de loi. Lui qui est aussi président du conseil exécutif de Corse et qui défend dans ce cadre la co-officialité de la langue corse et du français, ce qui va beaucoup plus loin que ce que je défends moi-même, c’est-à-dire un bilinguisme éclairé et renforcé, a du reste raison de s’inquiéter de la constitutionnalisation de la déclaration interprétative, qui est très limitative.

Le Président de la République peut, au moment de ratifier la Charte, l’assortir d’une déclaration interprétative. Mais l’inscrire dans la Constitution peut poser problème : on ne sait pas quelle jurisprudence le Conseil constitutionnel bâtira sur ce fondement. Prenons l’exemple de la Corse, que nous connaissons bien et qui est aujourd’hui à l’avant-garde pour ce qui est des langues régionales en France. Grâce au précédent gouvernement et à Nicolas Sarkozy, elle dispose d’une chaîne de télévision, appelée ViaStella, qui diffuse plus de treize heures par jour d’émissions en langue corse. Cela sera-t-il toujours possible si nous constitutionnalisons telle quelle cette déclaration interprétative ?

Nous oeuvrons depuis longtemps pour la défense et la promotion du bilinguisme. L’État y participe mais nous voulons aller encore plus loin, pour l’instaurer dans le service public, tous les services publics. C’est bien sur ce point que nous sommes inquiets. Car nous souhaitons, comme vous, ratifier cette charte. Nous nous sommes engagés en 2008 sur ce chemin difficile, souvenez-vous de ces débats. Nous avons continué sur cette voie. Je voulais même aller beaucoup plus loin, avec un amendement beaucoup plus dangereux que ce dont nous débattons aujourd’hui : il visait à inscrire dans la Constitution que le français est la langue de la République, dans le respect des langues régionales qui fondent sa diversité. Je voulais presque soumettre le français aux langues régionales ! Vous voyez que j’allais, dans ma naïveté, beaucoup trop loin.

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