Intervention de Serge Letchimy

Séance en hémicycle du 30 janvier 2014 à 9h30
Questions orales sans débat — Conditions d'application d'une circulaire interministérielle prise dans le but d'améliorer la situation du secteur privé en outre-mer.

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSerge Letchimy :

Monsieur le ministre, vous connaissez parfaitement la situation de l’économie locale en outre-mer, notamment celle de nos entreprises. En gros, nous comptons 25 000 entreprises en outre-mer, dont 8 500 en Guadeloupe et 6 500 en Martinique, et, malgré les dispositifs d’allègement des cotisations mis en place par la LODEOM, aujourd’hui, 51 % des entreprises bénéficiaires ne parviennent pas à être à jour de leurs cotisations, réalité qu’il est important de noter.

Cela résulte simplement de deux facteurs. Premièrement, des procédures amiables sont en cours, qui portent spécifiquement sur les cotisations patronales. Deuxièmement, le dispositif introduit par la circulaire du mois de juin 2013 ne permet pas d’atteindre les objectifs visés. La situation est extrêmement délicate et risque de mettre quelque 27 000 emplois en difficulté, sinon de mettre des personnes au chômage, dans un contexte économique marqué par une croissance relativement faible et un taux de chômage déjà élevé : 30 % à La Réunion, 22 % à la Martinique. La situation des jeunes est encore plus difficile puisque près de 50 % des jeunes de moins de vingt-sept ans sont au chômage.

C’est pourquoi je vous sollicite. Je vous demande de bien vouloir accepter de réétudier l’application de la circulaire du mois de juillet 2013. Je vous fais quelques propositions extrêmement précises.

Il faut permettre aux caisses générales de sécurité sociale de disposer, vraiment, de leviers nouveaux. Aujourd’hui, les procédures administratives, les délais et le fait que l’on remonte presque automatiquement au niveau des instances nationales compliquent la situation. Les conseils d’administration des caisses, unanimes dans les quatre départements d’outre-mer, ce qui montre la gravité de la situation et la prise de conscience locale, ont fait des propositions.

D’abord, il s’agit de faire vraiment respecter le principe de conditionnalité des exonérations prévues par la LODEOM. On ne peut pas exonérer sans conditions.

Ensuite, il s’agit de mettre en place un dispositif temporaire et exceptionnel d’accompagnement des entreprises concernées dans le cadre de cette opération massive de régularisation ; j’insiste sur ce mot. Ainsi les caisses pourront-elles contribuer directement à l’assainissement des finances des entreprises et à la consolidation de l’économie locale.

Il s’agit également d’ouvrir une période de régularisation limitée dans le temps, au cours de laquelle les entreprises concernées auront l’obligation de solder leurs dettes ou de conclure un moratoire. Aujourd’hui, une possibilité est ouverte, pour une durée d’environ trois mois, et à titre expérimental, en ce qui concerne les collectivités publiques qui ont des dettes vis-à-vis des entreprises : elle ne s’étend donc pas au secteur privé, ne concerne que le volet patronal, et son champ est réduit à quelques dispositifs.

Enfin, il s’agit de prévoir, à titre dérogatoire et exceptionnel, exclusivement pendant la période de régularisation, la possibilité pour les caisses de mettre en place des moratoires sur les cotisations ouvrières – je sais que c’est compliqué parce qu’il y a une responsabilité pénale – pour une durée pouvant aller jusqu’à six mois en fonction de la situation particulière des cotisants. Cela me semble très important, car, pour bénéficier des exonérations de cotisations patronales, il faut avoir payé totalement les cotisations ouvrières. Or les entreprises en difficulté le sont globalement, pas seulement pour un type de cotisations.

C’est à ces conditions, monsieur le ministre, que nous pourrons entrer dans une logique vertueuse de soutien aux entreprises en difficulté et de préservation de l’emploi, et ce dans le cadre d’une opération massive de vérification du respect des conditions légales de recours aux exonérations. Un tel dispositif, volontariste et transparent, permettrait de distinguer de manière objective les entreprises pour lesquelles il est justifié de mettre en oeuvre de mesures d’accompagnement exceptionnelles de celles qui, faute de signature d’un moratoire, verront leur situation définitivement compromise.

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