Intervention de Aurélie Filippetti

Séance en hémicycle du 4 février 2014 à 15h00
Harmonisation des taux de tva applicables à la presse — Présentation

Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication :

Hier encore, la publication des derniers chiffres relatifs à la consultation des sites a montré le grand dynamisme et la grande popularité de ces titres de presse en ligne. C’est donc en accompagnant la transition vers le numérique que nous pourrons contribuer au sauvetage de l’ensemble de la presse. Nous allons lui donner une opportunité historique pour faire sa mue, et contribuer ainsi à vivifier le pluralisme de la presse, qui trouve son fondement dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, comme l’a rappelé le président Patrick Bloche.

Il y avait urgence à agir, et c’est pourquoi je me félicite de cette initiative parlementaire qui permet d’accélérer le mouvement que j’ai engagé au mois de juillet dernier. La crise de la presse écrite s’aggrave, avec des effets délétères pour l’information des Français. La presse a subi 6 000 destructions d’emplois au cours des dix dernières années, dont 1 500 au cours des deux dernières années : nous sommes donc confrontés aujourd’hui à un état d’urgence. Une partie de la solution se trouve dans la transition numérique.

Comme nous sommes toujours vigilants sur l’état de nos finances publiques, je veux aussi noter que le coût budgétaire de l’abaissement du taux de TVA applicable à la presse en ligne à 2,1 % est extrêmement limité. Les données d’étude dont nous disposons aujourd’hui indiquent que le coût initial en dépense fiscale – sans doute autour de cinq millions d’euros – sera plus que compensé, au bout de trois ans seulement, par les effets d’entraînement économique sur le secteur. Il s’agit donc d’une mesure judicieuse, y compris pour les finances publiques.

Cet élément confortera la position française au niveau de l’Union européenne. Nous plaidons sans relâche auprès de la Commission européenne pour la neutralité technologique en matière fiscale. Aujourd’hui, la Commission est très divisée sur ce sujet, mais des élections européennes auront lieu en mai et une nouvelle Commission sera mise en place. Avec, désormais, le renfort et le soutien de l’Allemagne, la France défendra une position bien plus solide encore en ayant d’ores et déjà mis en place ce taux super-réduit. Nous pourrons nous prévaloir d’une homogénéité entre notre action sur le secteur du livre, soumis à un taux de TVA de 5,5 %, et la mesure que nous allons adopter sur la presse, qui sera soumise à un taux de 2,1 %.

Nous appelons de nos voeux une évolution de la fiscalité culturelle, pour permettre la transition de l’économie de la culture vers l’ère du numérique. Une mission sur cette fiscalité à l’échelle européenne a été confiée à Jacques Toubon. Nous savons que la Commission a écouté – et, nous le croyons, entendu – nos arguments en faveur de la neutralité fiscale entre les biens culturels, quel que soit leur support. Le Parlement européen s’est d’ailleurs lui aussi prononcé en ce sens. De nombreux autres États européens souhaitent cette évolution ; l’ensemble des professionnels européens du secteur la demandent, et ils ont salué la décision française d’avancer résolument sur cette question. Nous avons à accomplir une belle mission pour la France : celle de continuer à anticiper, à innover, et à faire en sorte que la transition numérique constitue une belle opportunité pour l’ensemble de nos industries culturelles créatives et pour l’ensemble de la presse.

Au niveau national comme à l’échelle continentale, l’urgence est là. La situation de la presse n’est pas meilleure dans les autres pays européens. La crise de la presse est tangible, et l’Europe doit agir. L’Europe peut agir maintenant : c’est évidemment une affaire de volonté. Les procédures de l’Union européenne sont nécessaires et légitimes, mais elles ne doivent pas nous conduire à l’inaction. À Paris, à Berlin, à Bruxelles et à Strasbourg, nous sommes convaincus que nous devons faire l’Europe par la preuve. Quelle plus belle preuve d’Europe qu’un engagement européen commun à la création culturelle, à l’invention numérique et à l’information citoyenne ? Pour ma part, je continue de croire qu’une résolution de cette question de la fiscalité culturelle à l’échelle européenne est possible. Je la souhaite, et je ferai tous les efforts nécessaires pour y parvenir.

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