Intervention de Jean-Michel Clément

Séance en hémicycle du 4 février 2014 à 15h00
Renforcement de la lutte contre la contrefaçon — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Michel Clément, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République :

Cela énoncé, je rappellerai que notre commission des lois a adopté cette proposition de loi en lui apportant, à mon initiative, plusieurs améliorations.

D’abord, nous avons amélioré l’indemnisation des victimes de la contrefaçon. Pour cela, la commission des lois a tenu à préciser l’étendue des réparations possibles, tout en écartant le risque d’introduire en droit la notion de dommages-intérêts punitifs. Premièrement, la commission des lois a précisé que chacune des différentes composantes du préjudice subi doit être prise en compte par le juge civil, afin d’éviter toute appréhension trop globale ou insuffisante du dommage causé. Deuxièmement, le préjudice moral doit, lui aussi, être indemnisé. Le texte le prévoit désormais explicitement. Troisièmement, il paraît anormal que le contrefacteur soit seulement condamné au paiement d’une somme équivalente à celle versée par l’exploitant régulier d’un droit de propriété intellectuelle. Pour que le dispositif soit dissuasif, il faut que le contrefacteur s’expose nécessairement au paiement d’une somme plus élevée.

Ensuite, plusieurs modifications apportées par notre commission ont visé à conforter et à compléter la procédure dite de saisie-contrefaçon, qui permet à un huissier de justice de prélever des échantillons ou de saisir des objets litigieux en vue de démontrer une contrefaçon. Dans le cadre du chapitre relatif au renforcement des pouvoirs des douanes, nous avons étendu le délit de contrefaçon à tous les droits de propriété intellectuelle, y compris aux topographies de produits semi-conducteur – les cartes à puces – qui ont été oubliées du champ lors de la première lecture au Sénat. Un autre sujet a fait débat et continuera de le faire à n’en pas douter, tant il est sensible : c’est celui des semences de ferme, dont l’apparition dans ce texte peut surprendre et méritera explication. L’utilisation par un agriculteur de ses semences de ferme sur sa propre exploitation ne peut en aucun cas être qualifiée de contrefaçon, quel que soit le type de semence de ferme utilisé.

Je considère également important d’exclure toute possibilité de destruction des récoltes issues de semences de ferme, même celles protégées par un certificat d’obtention végétale et couvertes par un accord interprofessionnel. En effet, la destruction de denrées alimentaires ou de produits agricoles ne portant pas atteinte à la santé humaine constitue toujours une sanction disproportionnée et incompréhensible pour les agriculteurs. Je proposerai deux amendements en ce sens.

Notre commission des lois a également permis à l’administration douanière de transmettre des images, photos ou vidéos, au titulaire du droit en cas de retenue, afin qu’il saisisse les tribunaux dans les meilleurs délais, dont elle a précisé le point de départ.

D’autres modifications tendent par ailleurs à préciser les dispositions relatives à la création d’un fichier informatisé de données, qui seraient transmises par la poste et les entreprises de fret express à la direction générale des douanes, pour lui permettre de rechercher des preuves et de constater des infractions douanières. Notre souci a été de renforcer les garanties attachées à la création d’un tel fichier au regard des exigences de la loi informatique et libertés. Je proposerai d’ailleurs d’adopter des amendements complémentaires en ce sens pour tirer les conséquences des remarques formulées par la CNIL, adressées par courrier au président de la commission des lois, après la réunion de celle-ci.

Enfin, s’agissant du volet pénal, nous avons simplifié la saisine de la juridiction pénale en cas de contrefaçon par un simple dépôt de plainte auprès du procureur de la République. En revanche, contrairement à ce que j’avais annoncé en commission, j’ai finalement renoncé à proposer l’alourdissement des différentes peines réprimant les délits de contrefaçon, considérant que l’essentiel est ailleurs : il est dans l’effectivité des poursuites et dans le démantèlement des réseaux.

Pour conclure, mes chers collègues, je vous invite à suivre notre commission des lois et à adopter cette proposition de loi qui va apporter à notre économie les protections dont elle a besoin.

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