Intervention de Yves Daniel

Séance en hémicycle du 4 février 2014 à 15h00
Renforcement de la lutte contre la contrefaçon — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaYves Daniel :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, avant d’aborder le contenu de la proposition de loi que nous examinons ce soir, je voudrais tout d’abord souligner la persévérance de son auteur, le sénateur Richard Yung, mobilisé sur ce sujet depuis la précédente législature.

Ce texte est issu, comme cela a été rappelé, des recommandations d’un rapport d’information sur le bilan de la loi de 2007 de lutte contre la contrefaçon. Il ajuste cette dernière pour qu’elle puisse déployer toute son efficacité. Il me semble que nous touchons là à un aspect du travail parlementaire que nous avons parfois tendance à laisser de côté : l’évaluation et le nécessaire réaménagement des textes adoptés précédemment, pour les adapter aux réalités existantes.

Car depuis 2007, l’« industrie » de la contrefaçon – j’emploie volontairement ce terme fort au vu des chiffres dont nous disposons – ne cesse de progresser. Je les citerai encore une fois, même s’ils ont été maintes fois évoqués : l’OCDE évalue l’impact mondial de la contrefaçon à 250 milliards de dollars. Ce chiffre est d’autant plus parlant dès lors qu’il se traduit en destructions d’emplois : 100 000 en Europe, dont 35 000 rien qu’en France… Au total, sur notre territoire, plus d’une entreprise sur deux a déjà été confrontée au problème de la contrefaçon.

Cette proposition de loi, qui vise à renforcer l’arsenal juridique existant et à améliorer le fonctionnement et l’allocation des moyens dédiés, arrive donc au bon moment. Je laisserai mes collègues membres de la commission des lois, saisie au fond, les détailler.

Pour ma part, je souhaite revenir ici sur la problématique des semences de ferme, en partie évoquée lors de l’examen du texte au Sénat.

En tant que membre de la commission des affaires européennes, j’ai écouté avec attention vos propos, madame la ministre, sur le partenariat en cours de négociation entre l’Union européenne et les États-Unis. Je me réjouis, comme vous, de la diffusion, bien au-delà des frontières françaises, de la notion d’AOC, et je comprends tout à fait la nécessité de défendre, dans le contexte concurrentiel mondial que nous connaissons, le secteur économique des semences, entre autres via les certificats d’obtention végétale.

En effet, la création variétale et la production de semences et de plants de plantes cultivées contribuent de manière non négligeable à notre PIB, grâce aux entreprises – PME ou grands groupes – qui ont investi dans ces domaines : 601 millions d’euros d’excédent commercial, soit 16 % de l’excédent commercial des produits agricoles, sylvicoles et piscicoles confondus, 2,7 milliards d’euros de chiffre d’affaires annuel, dont 15 % réemployés dans la recherche. C’est d’ailleurs ce dynamisme remarquable qui fait de la France le premier producteur européen de semences, le premier marché européen et le troisième mondial, ainsi que le premier exportateur mondial.

Néanmoins, en tant qu’agriculteur exploitant, je partage, bien sûr, les préoccupations de mes collègues paysans, du fait de l’imprécision des textes actuels. La menace de sanctions qui plane sur eux dès lors qu’ils échangent leurs semences entre eux, voire se contentent de les replanter d’une année sur l’autre sans les avoir rachetées au préalable au semencier, n’est pas acceptable.

Certes, les débats qui ont eu lieu dans le cadre du projet de loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt ont permis de mettre fin à quelques inquiétudes. Par exemple, nous avons avancé sur certains sujets, comme la fin de l’obligation d’utiliser des reproducteurs certifiés.

De même, nous ne pouvons que nous satisfaire de l’adoption, avec avis favorable du Gouvernement, de l’amendement de la sénatrice socialiste Nicole Bonnefoy, lors de l’examen de la proposition de loi qui nous occupe aujourd’hui. Il a permis de conforter la législation existante en la matière, qui reconnaît et préserve les semences de ferme.

Je salue également le travail actuellement conduit par le ministre de l’agriculture, qui devrait aboutir prochainement à la publication de deux décrets. L’un vise à élargir à toutes les espèces concernées par la production de semences de ferme en France les dispositions européennes autorisant à ressemer, qui ne s’appliquent aujourd’hui qu’à vingt et une d’entre elles. Il devrait voir le jour avant la fin de cette année. L’autre tend à définir l’indemnité que l’agriculteur devra reverser, le cas échéant, à l’obtenteur du certificat si aucun accord interprofessionnel n’intervient.

Néanmoins, la voie de la concertation, marque de fabrique de ce gouvernement, a une fois de plus été privilégiée et a abouti à la signature d’un premier accord en juin 2013 pour les céréales à paille. D’autres négociations sont en bonne voie, pour le secteur de la pomme de terre, d’une part, et pour celui des protéagineux, d’autre part.

Enfin, l’amendement de Mme Untermaier, que nous allons examiner à l’article 7 et qui exclut les semences de ferme du champ d’application des modalités de retenue douanière et de destruction simplifiée, est soutenu par l’ensemble du groupe socialiste.

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