Intervention de Philippe Germa

Réunion du 18 février 2014 à 17h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Philippe Germa, directeur général de WWF France :

Notre organisation emploie quatre-vingt-dix personnes qui travaillent à Paris, Lyon, Marseille, Nouméa et Cayenne. Selon les années, son budget oscille entre 16 et 18 millions d'euros. Comme la Fondation Nicolas-Hulot pour la nature et l'homme, WWF fonctionne grâce aux dons des particuliers et au mécénat de certaines entreprises, mais la conjoncture, en particulier l'accroissement de la pression fiscale, ne nous est pas très favorable. (Rires sur les bancs UMP)

Nous avons enregistré de lourdes pertes en 2012 et 2013, qui nous ont obligés à passer d'importantes provisions, et nous sommes bien loin du budget de WWF Allemagne, qui atteint 65 millions d'euros.

Nous sommes de plus en plus souvent sollicités par le Gouvernement pour participer à des débats ou à des commissions ou, presque chaque semaine, pour donner notre avis sur un projet de règlement ou de décret. Nous ne pouvons cependant pas répondre à toutes ces demandes, car nos donateurs entendent que nous nous consacrions avant tout à des programmes de conservation de la nature.

WWF France est impliqué dans deux grands programmes internationaux : la protection de l'Amazone et celle des coraux du Pacifique qui se trouvent au large de Nouméa. Nous nous préoccupons aussi de la pêche illégale, dont le « chiffre d'affaires » annuel atteint 25 milliards de dollars. Comme le braconnage, qui en rapporte 15, c'est un fléau pour l'humanité, car il met en danger la ressource halieutique et son caractère renouvelable. Pour juguler ce mal qui ne fait que s'aggraver en raison de la demande croissante des pays émergents, pourquoi ne pas utiliser les compétences du Centre national d'études spatiales (CNES), dont les images satellite permettraient de surveiller tous les bateaux illégaux du monde ?

Les « commodités », les matières premières mondiales – huile de palme, soja, coton, etc. – sont issues à 70 % des pays du Sud et utilisées à 70 % par deux cents entreprises mondiales, parfois françaises. Nous souhaitons que celles-ci se tournent vers des productions certifiées n'ayant qu'un faible impact sur la déforestation ou sur le changement climatique.

En dehors des programmes français ou européens consacrés à la Méditerranée ou aux Alpes, nous finançons des programmes à Madagascar. Ce pays très pauvre, qui possède une biodiversité très riche, a connu des troubles terribles et ne reçoit désormais plus d'aide internationale. La nature y est fortement sollicitée par la population, qui n'a pas d'autre ressource, et pillée par des braconniers, qui organisent notamment un trafic de bois de rose. Nous intervenons également dans le bassin du Congo, puisque le bureau de Paris a acquis une légitimité pour piloter des actions dans les pays francophones. Nous sommes également présents en Indonésie et au Brésil, compte tenu des problèmes que pose la production d'huile de palme et de soja. Nous vous remercions donc d'avoir réintroduit dans la loi des mesures de défiscalisation permettant de financer ces programmes internationaux.

L'enjeu des prochaines années sera de définir un modèle de développement soutenable, alors que l'empreinte de l'homme sur la nature se fait chaque jour de plus en plus forte : à l'échelle d'une année, il a consommé en août tout ce que la nature est capable de lui donner ! En d'autres termes, il vit pendant cinq mois sur une dette écologique. Il y a quelques années, c'est seulement en octobre qu'il commençait à « manger » le capital de la planète. L'augmentation de la richesse des pays émergents joue un rôle déterminant dans ce processus. À présent que les pays d'Europe ont fait beaucoup pour l'environnement, c'est dans les pays du Sud, dont la population veut, elle aussi, rouler en voiture, faire deux vrais repas par jour et se nourrir de protéines animales, que se posent les plus grands problèmes. Notre tâche est de les inciter à se développer en réduisant leur empreinte sur la nature. Nous agissons dans le même sens envers les entreprises françaises, que nous tentons de convaincre de préférer aux services ou aux produits « gris », des services ou des produits « verts ».

Nous avons largement participé aux débats sur la transition énergétique. Nous souhaitons que votre commission soit pleinement associée à la rédaction de la loi qui sera consacrée à ce sujet. (Rires sur tous les bancs)

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