Intervention de Christiane Taubira

Séance en hémicycle du 27 février 2014 à 9h30
Procédures de révision et de réexamen d'une condamnation pénale définitive — Présentation

Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice :

Vous y êtes parvenus parce que vous vous êtes investi profondément et totalement, je peux en témoigner ; vous y êtes parvenu parce que vous avez produit un travail de très grande qualité ; vous y êtes parvenu parce que vous avez mis en place une méthode de rigueur. Je veux surtout ajouter que vous y êtes parvenu parce que vous avez choisi une approche tout à la fois rigoureuse, exigeante et humaniste. Vous avez pris le temps d’entendre, d’écouter ; vous avez procédé à une cinquantaine d’auditions, ainsi que vous venez de le rappeler, monsieur le rapporteur. Vous avez ainsi auditionné quatre anciens gardes des sceaux, sans compter le garde des sceaux en exercice ; vous avez entendu de nombreux magistrats, dont des magistrats de la Cour de cassation, c’est-à-dire ceux qui pratiquent la procédure de révision ; vous avez entendu des avocats, des associations s’exprimant au nom des victimes, des associations portant la parole des condamnés ; vous avez entendu des spécialistes de la police scientifique ; vous avez entendu des juristes, des chercheurs, des sociologues ; vous avez entendu des institutions, notamment la Commission nationale consultative des droits de l’homme ainsi que la Ligue des droits de l’homme.

Par ailleurs, vous avez rassemblé toute une série de données à caractère juridique et statistique, ainsi que des éléments de droit comparé. Vous avez ainsi pu constater, à la faveur tant de ces auditions que des éléments que vous avez rassemblés pour éclairer votre réflexion, les insuffisances incontestables de la procédure actuelle. Toutes les personnes que vous avez auditionnées vous ont dit qu’il était nécessaire de changer la loi. En fait, l’état des lieux même illustre et conforte ce que vous avez déduit tant des auditions que des éléments que vous avez rassemblés.

Vous l’avez dit vous-même, monsieur le rapporteur : sur l’ensemble des procédures de révision enregistrées depuis la loi de 1989, seules neuf condamnations en matière criminelle et quarante-trois décisions en matière correctionnelle, alors même que la loi de 1989 est une loi de vrai progrès puisqu’elle a judiciarisé la totalité de la procédure, introduisant ainsi plus d’objectivité, et qu’elle dispose en outre qu’un élément faisant naître le doute doit être pris en considération, même s’il ne révèle pas immédiatement l’innocence. Il y a incontestablement matière à s’interroger, d’autant que les auditions vous ont permis de constater que, en pratique, les annulations prononcées l’ont été seulement sur la base d’éléments prouvant l’innocence, et non sur la base d’un doute, comme le prévoit la loi de 1989.

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