Intervention de Christiane Taubira

Séance en hémicycle du 27 février 2014 à 15h00
Procédures de révision et de réexamen d'une condamnation pénale définitive — Article 3

Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice :

Sinon, la révision d’un acquittement serait soumise à un régime moins exigeant en termes de respect du droit, eu égard au principe du procès équitable et des droits de la défense, et donc moins contraignant que ce qui est pratiqué actuellement pour un simple prononcé de non-lieu.

Admettez que cet amendement pose de sérieux problèmes en termes d’éthique et de principes, ainsi que des problèmes juridiques. Vous vous référez à l’article 6 du code de procédure pénale, mais celui-ci concerne la déclaration d’extinction de l’action publique. Il ne s’agit pas de revenir sur une décision de fond, mais, éventuellement, sur cette déclaration s’il est avéré que celle-ci a été prise sur la base d’un faux. Cette référence ne peut donc convenir et ne renforce pas votre argumentation.

C’est une marque de respect de ma part, monsieur le député, que d’avoir pris le temps d’argumenter pour vous expliquer pourquoi le Gouvernement n’émet pas un avis favorable à votre amendement. Le sujet est important, la façon d’y répondre l’est tout autant, et celle-ci ne peut consister à évacuer des principes du droit qui datent d’au moins deux siècles. On ne peut pas faire l’économie d’une interrogation sur la cohérence de notre droit et sur le risque d’introduire des distorsions juridiques, je pense notamment à la liste très large des personnes qui seraient habilitées à présenter une requête en révision. Ainsi, le rapporteur a relevé que vous permettriez à des personnes qui n’ont pas intérêt à agir de le faire, et à la victime, qui pourtant ne peut pas faire appel d’un acquittement non définitif, de le faire si celui-ci est devenu définitif. Quelles distorsions ! Admettez qu’on ne peut pas inscrire de telles dispositions dans un texte de loi sans en tirer les conséquences.

Telles sont les raisons, de principe et de fond, pour lesquelles le Gouvernement émet un avis défavorable. Mon raisonnement se fonde sur l’éthique et sur le droit, et n’a rien à voir avec ce que je peux éprouver à l’égard des victimes. Je répète d’ailleurs que j’aurai l’opportunité d’expliquer exactement quelle est la politique de ce gouvernement à leur endroit.

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