Intervention de Victorin Lurel

Réunion du 19 février 2014 à 17h00
Délégation aux outre-mer

Victorin Lurel, ministre des Outre-mer :

Monsieur Gibbes, le toilettage des lois organiques sera réalisé, je l'espère, avant la fin de l'année. La réflexion est engagée pour Saint-Barthélemy, dont je reçois demain le président, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon.

Pour Saint-Martin, la commission des lois de l'Assemblée nationale a créé une mission d'information et la collectivité elle-même a constitué une commission ad hoc.

L'octroi de mer n'est pas applicable à votre collectivité, aux termes des textes qui la régissent. Celle-ci a donc engagé un contentieux contre l'État au motif que l'octroi de mer que versait la région Guadeloupe, lorsque votre collectivité était une commune, n'a pas été pris en compte dans la dotation globale de compensation. Le Conseil d'État a renvoyé cette affaire devant le tribunal de Paris. Le toilettage peut être l'occasion de changer la législation, comme vous le souhaitez. Je vous rappelle que nous avons diligenté une mission de l'Inspection générale de l'administration, qui a rendu un rapport d'étape sur la dotation globale de compensation. J'évoquerai cette question demain avec le président de la collectivité.

Par ailleurs, puisque vous cherchez des recettes nouvelles, nous étions disposés à envisager quelques pistes avec vous, notamment en matière de carburant pour éviter un détournement du trafic entre la partie française et la partie hollandaise de Saint-Martin. Il y a là une marge de manoeuvre.

Monsieur Vlody, s'agissant de l'octroi de mer, l'économie générale du système est maintenue. Nous avions envisagé avec vous la baisse du seuil d'assujettissement – nous verrons comment décliner cela dans le texte. L'Europe examine actuellement le différentiel entre les trois listes de produits. Nous avons demandé aux instances européennes si les taux des dix dernières années sont encore appropriés. Nous leur avons également demandé s'il est possible d'octroyer une protection aux produits nouveaux et aux produits émergents, autrement dit d'assurer une protection aux industries naissantes pour faciliter leur développement pendant un temps déterminé. À cet égard, l'Europe est quelque peu réticente sur le taux de 15 % que nous avons proposé.

Madame Allain, concernant la transition énergétique, le texte porté par M. Philippe Martin comporte treize articles pour tenir compte de la valorisation énergétique outre-mer – ils sont une sorte de préfiguration de ce qui pourrait se faire de mieux en métropole. Ces treize propositions d'articles sont en cours de mise au point avec mes collègues du Gouvernement, dont les plus significatives sont : la mise en place d'une stratégie de rénovation énergétique du bâti existant et de retrait des équipements électriques les moins performants ; l'amélioration du dispositif des certificats d'économie d'énergie ; le développement de la filière photovoltaïque en autoconsommation avec stockage et gestion intelligente (à Mayotte, une expérimentation a été réalisée par EDM, et nous attendons la parution du décret) ; la création d'une redevance communale en matière de géothermie ; l'obligation de mise en place d'une autorité organisatrice unique de transports à l'échelle de chaque territoire (la Martinique a demandé une habilitation) ; le développement des bornes de recharge des véhicules électriques (une expérimentation avait commencé avec Renault à La Réunion, et j'ai demandé qu'elle soit relancée) ; et enfin une évolution des paramètres d'analyse des projets par la Commission de régulation de l'énergie qui permette la poursuite du développement des projets innovants et une meilleure intégration des moyens de production dans les territoires.

Monsieur Said, le changement de paradigme impose une petite révolution intellectuelle. Nous avons tenté de le faire avec vous, et votre Délégation a joué un rôle important lors du vote de la loi relative à la régulation économique outre-mer. Je ne souhaite pas que cette loi soit réduite au « bouclier qualité-prix ». Des changements structurels s'imposent ; j'en veux pour preuve la confrontation qui a eu lieu sur les carburants. Le retour de l'État est le changement de paradigme souhaité, sans pour autant sombrer dans l'économie administrée. Il est possible d'introduire plus de transparence, de concurrence et d'initiatives dans les économies insulaires.

D'autres révolutions restent à faire. Certains partis politiques prônent une réforme de la fiscalité – y compris du régime douanier, ce qui n'est pas à l'ordre du jour. Certains veulent passer en PTOM (pays et territoire d'outre-mer), comme c'est le cas pour Saint-Barthélemy ; d'autres, comme un ancien ministre des Outre-mer, proposent la création de zones franches totales. Reste à savoir si nos populations soutiendront ces audaces intellectuelles, si les conditions sont réunies pour le changement de paradigme que vous appelez de vos voeux.

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