Intervention de Georges Panayotis

Réunion du 9 avril 2014 à 9h30
Commission des affaires économiques

Georges Panayotis, président de MKG Group :

Celles qui ont imposé la rénovation des établissements et l'obligation de permettre l'accessibilité aux personnes handicapées. Certes, les établissements se sont ainsi modernisés, mais au prix d'investissements très lourds, et cela n'a pas été positif pour l'ensemble de ces petites entreprises. À cela s'est ajoutée l'augmentation du taux de TVA.

Face à l'accroissement attendu de la clientèle, la capacité hôtelière française régresse et la pénurie incite les consommateurs à se tourner vers des formes alternatives d'hébergement, dont le développement rapide n'est bénéfique ni à l'emploi ni à la sécurité, et encore moins aux recettes fiscales ; de plus, cette pénurie entraîne une spirale spéculative sur les transactions immobilières. L'augmentation continue des charges, évoquée précédemment, a provoqué une terrible augmentation du prix moyen de l'offre, alors que le pouvoir d'achat des consommateurs est en baisse. Cela a incité de nombreux voyageurs à privilégier d'autres types d'offres.

L'industrie hôtelière française souffre essentiellement de l'érosion de son offre. Alors qu'en 2008 on comptait, toutes catégories confondues, 672 000 chambres disponibles, le parc s'étiole. Il est aujourd'hui inférieur à 635 000 chambres, soit un solde négatif net de 37 000 chambres en cinq ans, que l'offre de 20 000 nouvelles chambres par les chaînes hôtelières n'a pas suffi à compenser. Or, pendant la même période, partout dans le monde, l'offre a énormément augmenté, y compris dans les grands pays européens, avec 50 % d'augmentation en Allemagne et au Royaume-Uni et à peu près autant en Espagne.

Certes, bon nombre d'hôtels obsolètes ont disparu, mais les fermetures n'ont pas touché que des établissements économiques. Beaucoup d'hôtels de préfecture et d'hôtels situés près des gares ont fermé leurs portes et on a vu apparaître des hôtels plus modernes –mais, malheureusement, il n'y a eu qu'une ouverture pour deux fermetures.

Par rapport à ses voisins, la France a donc un peu rétrogradé. Il faut dire que notre offre hôtelière est atypique. Si, aux États-Unis, les grands groupes hôteliers anglo-saxons proposent 70 % de l'offre totale, l'offre hôtelière, en Europe, est plutôt aux mains des indépendants. C'est à la fois un atout et un défaut considérable pour la commercialisation.

Par ailleurs, un quart de la capacité d'accueil hôtelière française est concentré en région parisienne, et si l'on ajoute les régions Provence-Alpes-Côte d'Azur et Rhône-Alpes, on dépasse largement la moitié de l'offre globale. Dans les länder allemands, la répartition géographique de l'offre est beaucoup plus équilibrée, l'activité assez solide et le développement plutôt soutenu.

La distribution commerciale sur les canaux électroniques est sans conteste le défi majeur auquel doit faire face l'industrie hôtelière. Pour certains établissements, le seuil de la dépendance est même dépassé. En 2008, les réservations directes entre clients et hôtels représentaient 85 % de l'activité ; les réservations faites par le biais des agences de voyage en ligne – dites « OTA » pour Online Travel Agency – ne représentaient qu'entre 4 et 5 % de l'ensemble. Selon nos dernières statistiques, qui datent de quelques jours, les premières représentent maintenant 38 % de l'activité et les secondes 33 %, 29 % provenant de sites Internet ou des centrales de réservation des chaînes volontaires ou des groupes hôteliers.

C'est dire l'importance de ce canal de distribution : plus d'un tiers du fonds de commerce appartient désormais à des organisations extérieures qui, malheureusement, n'obéissent pas aux mêmes règles contraignantes, fiscales notamment, que les établissements français. Cette évolution pèse de plus en plus sur les hôtels, la commission moyenne prélevée, qui était de 10 % il y a quelques années, a augmenté de moitié pour s'établir aujourd'hui à quelque 15 %. Les comptes d'exploitation s'en ressentent, car la croissance des charges entraîne une augmentation des prix moyens qui dissuade les consommateurs de fréquenter nos établissements – et même nos destinations, jugées non compétitives, ce qui induit le déplacement de nos clientèles vers d'autres lieux.

Les OTA maîtrisent le fichier clients des établissements, à savoir les adresses et les modes de consommation des clients. Ils constituent ainsi des banques de données gigantesques, et peuvent déplacer la clientèle vers d'autres destinations, créer une pénurie ou organiser la distribution en augmentant la commission que doivent supporter les hôteliers. En outre, toute réservation faite par leur truchement coûtera 15 % à l'hôtelier, même si elle émane d'un client préexistant, déjà fidélisé. On voit quelle spirale se construit dans l'industrie du tourisme.

Bien entendu, le poids des grands groupes internationaux leur permet de négocier, d'échapper à ces commissions exorbitantes ou de limiter la part des OPA dans leur distribution. Les hôteliers indépendants, en revanche, subissent le contrecoup de manière violente. Comment protéger cette industrie en quelque sorte artisanale, dont le rôle est très important, mais qui risque de disparaître parce qu'elle ne pourra pas répondre aux attentes de la clientèle en termes de qualitéprix ? En 2012, l'investissement hôtelier en France représentait quelque 2 milliards d'euros, bien moins qu'en l'an 2000. Or, dans l'industrie hôtelière, l'offre crée la demande. Si nous voulons moderniser notre offre, il faut créer des mécanismes d'incitation à l'investissement.

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