Intervention de Richard Ferrand

Réunion du 18 décembre 2013 à 11h15
Mission d'information sur l'écotaxe poids lourds

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRichard Ferrand :

Vous avez évoqué le problème de l'acceptabilité de l'écotaxe, notamment en Bretagne. Permettez-moi, en tant que député du Finistère, de rappeler un certain nombre de circonstances qui peuvent l'expliquer. Il y a d'abord la concentration dans le temps et dans l'espace de crises agro-alimentaires très difficiles, coïncidant avec l'arrivée d'une taxe supplémentaire, qui a donné le sentiment de frapper singulièrement nos productions agricoles et agro-alimentaires. Ensuite, l'argument du report modal ne tient guère dans notre région : le fret ferroviaire ne va guère au-delà de Rennes, et le port de Brest n'est pas utilisé autant qu'il le devrait faute d'aménagements – l'État y a très peu investi ces dernières années, de sorte qu'il faut aller au Havre. S'y ajoute le sentiment d'éloignement de la première région agricole française, qui estime qu'elle sera plus taxée que d'autres pour transporter ses marchandises – d'où la demande de « ristourne » qui avait été acceptée.

Par ailleurs, il faut dire clairement qu'il y a eu des manipulations politiques grossières autour de l'écotaxe. Par courtoisie, je ne citerai cependant pas le nom de mon collègue – qui est absent.

J'ajoute que la gratuité des routes en Bretagne est un principe acquis et ancré dans les esprits, depuis Anne de Bretagne jusqu'au discours du général de Gaulle à Quimper en février 1969, qui l'a réaffirmé sans ambiguïté.

Les Bretons ne sont pas de mauvais citoyens ; ils acquittent l'impôt comme tout le monde. Mais le sentiment qui prévaut aujourd'hui est que l'on réinvente le fermier général sous les traits d'Ecomouv'. Historiquement, les fermiers généraux ont toujours été bien rémunérés ... il semble que cela n'ait guère changé ! En outre, la répercussion de la taxe sur le chargeur, et donc le producteur, donne le sentiment qu'il s'agit non d'un impôt sur le transport, mais d'un impôt sur la production – puisque ce sont ceux qui produisent et qui chargent qui le payent ; les transporteurs n'ayant finalement qu'un rôle de collecteur. Il apparaît donc comme une taxe à la production, et cela au moment même où l'on appelle au redressement productif.

Il est vrai qu'il faut financer nos infrastructures – en Bretagne comme ailleurs. La question qui se pose est de savoir comment trouver des financements sans peser sur la production. Sans doute les gouvernements successifs ont-ils pensé qu'il serait plus aisé de répercuter la taxe sur les producteurs, qui n'ont pas les mêmes possibilités que les transporteurs pour bloquer le pays. C'est pourtant sur le transport que la taxe devait être perçue. Pour éviter la taxation des producteurs et des chargeurs, et compte tenu des difficultés d'un certain nombre d'entreprises de transport, pourquoi ne pas mettre à contribution la grande distribution, qui est à la fois l'un des grands utilisateurs de transports et l'un des secteurs les plus prospères du pays ?

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