Intervention de Antoine Caput

Réunion du 29 janvier 2014 à 11h00
Mission d'information sur l'écotaxe poids lourds

Antoine Caput, représentant du groupe Thales :

Quelques précisions complémentaires sur le contrôle automatique, entièrement développé par le groupe Thales.

Je confirme que, s'agissant de la stratégie de contrôle et des moyens y afférents, l'appel d'offres de l'État a été extrêmement prescriptif, tant en phase initiale que finale. Du point de vue industriel, cela n'avait rien d'étonnant puisque tous les pays européens dotés d'un dispositif de taxation des poids lourds au kilomètre possèdent un système de contrôle automatique tout à fait similaire. Les autorités françaises ne se sont donc pas adonnées à une innovation débridée qui aurait pu aboutir à un système spécifique sans équivalent ailleurs. Entre la consultation initiale et la consultation finale, le nombre de points de contrôle automatique fixes a été substantiellement réduit, ce qui témoigne d'une conscience des coûts et des difficultés qu'entraînait la sur-spécification des besoins.

Aujourd'hui, 173 points de contrôle automatique fixes constitués d'un portique, parfois de deux, sont répartis sur un réseau de 15 000 kilomètres, soit, en moyenne, un point de contrôle tous les 87 kilomètres. Que ce soit trop ou pas assez n'est pas la question. Rappelons-nous seulement que tout système moderne de taxation kilométrique repose sur le postulat que chaque véhicule assujetti à la taxe est muni d'un équipement embarqué qui fonctionne. Que cet équipement soit absent ou techniquement perturbé, et le véhicule devient invisible pour le système : il peut circuler sur le réseau sans acquitter la taxe.

Selon les projections de trafic effectuées sur la base des statistiques routières dont dispose le ministère des transports, 610 000 véhicules assujettis passeront chaque jour devant les 173 points de contrôle automatique fixes. La stratégie du contrôle automatique a précisément pour objet de traiter de manière systématique un tel volume : chaque véhicule qui passe sous un portique est contrôlé. Pour remplir la même tâche de contrôle en toute sécurité, les agents seraient obligés de dévier, notamment par mesure de sécurité, les poids lourds vers des aires de stockage. Et en supposant qu'ils soient techniquement en mesure de contrôler quotidiennement 610 000 véhicules roulant à 80 kilomètres heure, cela nécessiterait des moyens humains colossaux dont le coût serait extrêmement important.

Le système de contrôle automatique n'est pas seulement destiné à repérer les fraudeurs. Il peut également détecter des erreurs de classification commises par les chauffeurs routiers eux-mêmes et à leur détriment. Dans le système français, en fonction de la remorque attelée, la classification du véhicule peut être modifiée par une simple opération sur l'équipement embarqué, de façon à payer le tarif correspondant. En cas d'oubli de la part du chauffeur, il peut arriver que des véhicules circulent sous une classification trop élevée. Le système de contrôle vérifie aussi que cette classification n'est pas erronée et que le tarif de taxation correspond bien à la situation.

Plutôt que de provocants, je qualifierais les portiques de dissuasifs puisque tel est l'effet recherché. Du point de vue du citoyen, je ne sais pas si le système automatique de contrôle de vitesse – les fameux radars – est provocant ou dissuasif. On observe que les dégradations commises sur les matériels sont restées extrêmement localisées en France. Si le dispositif venait à être démonté sur tout le territoire, ce serait une incitation très forte à la fraude. Notamment, cela permettrait aux transporteurs étrangers, qui traversent bien souvent le territoire d'une traite, sans même s'arrêter pour acheter du carburant ou des marchandises soumises à TVA, de traverser très facilement le territoire sans acquitter la taxe.

Pour finir, la CNIL a fait connaître sa position sur la conservation des données collectées par le système. Dans un premier temps, une photographie du véhicule et de sa plaque d'immatriculation est prise à distance du portique. Ce n'est que lorsque le véhicule passe au droit du portique que le système peut le classifier, c'est-à-dire déterminer s'il est assujetti ou pas. Dès lors que le véhicule est identifié comme non assujetti ou assujetti en situation régulière, toutes les données sur son passage – photos de contexte et plaque minéralogique – sont détruites par le système du portique dans les quelques secondes qui suivent. La CNIL a été extrêmement attentive à ce sujet, elle a vérifié le fonctionnement du système. Je confirme que lesdites données sont immédiatement effacées, non pas dans le système central, mais localement, dans les portiques.

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