Intervention de Christophe Bouillon

Réunion du 30 avril 2014 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Bouillon, président du Conseil national du bruit, CNB :

Je vous remercie, monsieur le président, d'avoir organisé cette table ronde sur un sujet sensible, dont l'enjeu sanitaire est évident. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) estime qu'à l'échelon européen 1,8 million de vies en bonne santé sont perdues à cause du bruit. Deux Français sur trois considèrent que leur environnement sonore est gênant. Le problème, aussi grave que celui de la qualité de l'air, tient à l'augmentation de l'urbanisation ou du trafic, ainsi qu'aux phénomènes de multi-exposition au travail, lors des déplacements ou à domicile. Les pertes auditives et les acouphènes concernent plus de 5 millions de Français, dont 2 millions sont âgés de plus de cinquante-cinq ans. Sur les 6 millions de Français qui pourraient porter une prothèse auditive, la moitié seulement est effectivement appareillée, ce qui, en plus des raisons financières, s'explique par le fait que le port d'un appareil auditif, contrairement à celui des lunettes, est ressenti comme la marque d'un handicap ou comme un signe de vieillissement.

Le CNB est une instance consultative, dont un comité interministériel pour la modernisation de l'action publique (CIMAP) a rappelé les missions en 2013. Il est saisi pour avis par tout ministère qui met en oeuvre des politiques publiques relatives à l'environnement sonore. Il constitue par ailleurs une force de proposition : depuis sa création, dans les années quatre-vingt, il a pris l'habitude de s'autosaisir, faisant preuve d'imagination et de sens pratique. Il joue également un rôle d'information et de recommandation. Rédigeant en 2010, avec Philippe Meunier, un rapport parlementaire sur les nuisances sonores, j'avais constaté une abondance de textes, dont la mise en oeuvre ou l'application laissaient souvent à désirer. Le CNB contribue à les faire respecter.

En 2013, le nombre de ses membres, fixé par décret, a été réduit de soixante-douze à quarante-huit personnes dont le mandat dure trois ans.

Notre premier axe de travail, pour la période 2013-2016, consiste à réconcilier rénovation thermique et rénovation acoustique des bâtiments. Puisqu'on consacre des moyens importants à la première, notamment par le biais de mesures incitatives, profitons-en pour mener une réflexion sur la seconde, en nous donnant les moyens techniques et financiers de réunir les deux objectifs.

Un autre axe de travail est de mieux connaître l'impact des nuisances sonores sur la santé et de proposer de véritables actions de prévention, comme la réforme de la réglementation des lieux musicaux ou des festivals en plein air. Un guide des bonnes pratiques sera rédigé, afin de mieux accompagner certaines manifestations. Les jeunes sont particulièrement exposés aux nuisances sonores, contre lesquelles il faut les mettre en garde. Nous devons également nous pencher sur l'utilisation des baladeurs ou la gestion du bruit dans les services de néo-natalité, ce qui concerne tant les appareils médicaux que les pratiques du personnel.

Un troisième axe est l'éducation des jeunes au civisme, à l'écoute et à la protection auditive. Il y a quelques années, une action a été menée avec succès à destination des élèves du primaire. Pour intervenir auprès des collégiens et des lycéens, auxquels s'adresse déjà le Centre d'information et de documentation sur le bruit (CIDB), nous allons renforcer les contacts avec le ministère de l'éducation nationale.

Notre dernier axe de travail est la gestion des bruits de voisinage et du bruit des activités par les collectivités. Il serait bon de relever les bonnes pratiques, afin de les démultiplier. La réalisation de guides d'information est essentielle.

Entre autres sujets, le CNB s'est saisi d'une approche économique. Dans la lignée du Grenelle de l'environnement et comme le suggérait le rapport du comité opérationnel (COMOP) n° 18, qui rassemblait des réflexions, des indications et des recommandations sur le bruit, il serait bon d'étendre à la prévention des nuisances sonores le bénéfice de la fiscalité écologique.

Le CNB veille aussi à traiter le problème du bruit dans les transports. Il existe une législation sur le trafic routier ou ferroviaire ou sur la présence d'infrastructures aéroportuaires, mais nous devons adapter la réglementation à la multi-exposition induite par l'urbanisation. Par ailleurs, il faut poursuivre les efforts menés, en lien avec la direction générale de l'aviation civile, par les transporteurs aériens et Aéroports de Paris. La mise en oeuvre du décret « hélicoptères » de 2010 a soulevé de vifs débats. Nous devons également nous demander quelle suite donner à la classification sonore des avions légers.

Enfin, le CNB organise une manifestation intitulée « Les décibels d'or ». Nous saisirons l'édition 2014 pour valoriser, cette année encore, les bonnes pratiques et les propositions, qu'elles proviennent des chercheurs, des collectivités, des entreprises ou du monde de l'éducation.

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