Intervention de Frédérique Cousin

Réunion du 30 avril 2014 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Frédérique Cousin, chef du bureau « environnement intérieur, milieux du travail et accidents vie courante », EA2 à la direction générale de la santé, DGS :

Le bruit figure parmi les nuisances majeures ressenties par les Français dans leur vie quotidienne et leur environnement de proximité. Il ressort d'une enquête d'opinion réalisée par la SOFRES en 2010 que deux Français sur trois sont gênés par le bruit à leur domicile. Celui qui provient des infrastructures de transport et du voisinage fait l'objet du plus grand nombre de plaintes. Le code de la santé publique considère comme « bruits de voisinage » ceux qui sont émis par des voisins, qui sont liés aux activités professionnelles, culturelles, sportives ou de loisirs, ou qui proviennent des chantiers.

Dans son rapport de 2011 sur le bruit environnemental, l'OMS évalue à plus d'un million les années de vie en bonne santé perdues à cause du bruit. Les effets non auditifs – trouble du sommeil, maladies cardio-vasculaires, déficiences cognitives chez les enfants – et subjectifs du bruit restent mal connus. C'est pourquoi la direction générale de la santé a demandé à l'Institut français des sciences et technologies des transports, de l'aménagement et des réseaux (IFSTTAR) d'étudier les effets sanitaires des bruits aéroportuaires. Sous le contrôle d'un comité scientifique, l'IFSTTAR développe un programme comprenant une étude écologique large et une étude prospective d'une durée de cinq ans sur une cohorte. Ses résultats de ce travail, qui porte le nom de DEBATS (Discussion sur les effets du bruit des aéronefs touchant la santé), seront connus en 2017.

L'évolution des pratiques culturelles et des techniques du son entraînent une augmentation des niveaux sonores, désormais susceptibles de causer des atteintes auditives irréversibles. Dans un avis d'octobre 2008, le comité scientifique des risques sanitaires émergents et nouveaux (CSRSEN) de la Commission européenne estime que 5 % à 10 % des utilisateurs de baladeurs, soit six millions de personnes en France, risquent des pertes auditives irréversibles. Des études plus ou moins récentes, ainsi que les professionnels ORL et les audioprothésistes, soulignent que les troubles auditifs augmentent particulièrement chez les jeunes. Un des facteurs de risque, outre des antécédents ORL, est l'exposition au bruit lors de loisirs, dans les salles de concerts ou discothèques ou par le biais d'un baladeur mp3. Ces pratiques en forte augmentation exposent de plus en plus tôt les jeunes à des volumes sonores pouvant provoquer une dégradation définitive de l'audition. Selon une étude réalisée en Île-de-France en 2003 et corroborée depuis lors, 50 % des traumatismes sonores aigus seraient liés à la musique amplifiée.

Pour agir, le ministère de la santé conduit des actions sur quatre axes.

Le premier consiste à élaborer une réglementation adéquate. Durant l'été 2013, la France a renforcé sa réglementation relative aux baladeurs pour la rendre compatible avec les normes européennes publiées en 2012. Elle actualise la réglementation sur les lieux musicaux, vieille de plus de dix ans, afin de mieux prendre en compte l'exposition du public, notamment aux basses fréquences. Un projet d'arrêté commun aux ministères de la santé et de l'éducation, concernant les bilans de santé à l'école, prévoit la possibilité d'un dépistage auditif lors des visites effectuées à six et douze ans. Le protocole et les modalités de transmission restent à définir.

Le deuxième axe tend à impliquer les agences régionales de santé (ARS) pour contrôler l'application de la réglementation et la délivrance d'avis sanitaires relatifs au bruit. L'inspection et le contrôle des lieux musicaux figuraient en 2013 parmi les priorités nationales d'inspection. Un système d'information permettant de gérer ces contrôles est en cours de déploiement. Les avis sanitaires relatifs aux projets d'aménagement et aux documents d'urbanisme ou d'autorisation d'activités bruyantes ont progressé, grâce au rapport de l'Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) sur l'évaluation des impacts sanitaires extra-auditifs du bruit environnemental.

La sensibilisation du public et des professionnels, en vue de modifier les comportements bruyants et à risques, représente un troisième axe. La prévention des risques nécessite la mise en oeuvre, aux niveaux local et national, d'actions de prévention – notamment auprès des jeunes. L'Institut national de prévention et d'éducation à la santé (INPES) mène régulièrement des campagnes de prévention en direction des jeunes et les ARS soutiennent de nombreuses actions de sensibilisation, notamment dans les établissements scolaires ou à l'occasion de festivals. En complément, la direction générale de la santé soutient des associations têtes de réseau pour la diffusion de supports de communication, pour la formation d'acteurs relais et pour la sensibilisation des professionnels du spectacle ou du grand public. Elle intervient notamment auprès d'AGI-SON, du CIDB ou de la Semaine du son.

Le quatrième axe concerne la conduite d'études et de recherches. Au-delà de l'étude DEBATS déjà citée, je veux mentionner la pérennisation sur Paris du système de surveillance des traumatismes sonores aigus, ainsi que la saisine de l'ANSES sur l'impact sanitaire des basses fréquences sonores et des infrasons dus au parc éolien. Les résultats de cette étude seront connus en 2015.

Je rappellerai pour finir les travaux que nous menons actuellement pour fédérer des actions dans le troisième Plan national santé-environnement (PNSE3).

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