Intervention de Marion Maréchal-Le Pen

Séance en hémicycle du 3 juin 2014 à 21h30
Prévention de la récidive et individualisation des peines — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarion Maréchal-Le Pen :

Le milieu social défavorisé est toujours la principale excuse pour minimiser la responsabilité du coupable. La prison serait l’école du crime. La victime n’a qu’à bien se tenir.

Le tout carcéral français que vous avancez pour défendre votre texte est un mythe : le taux d’incarcération, de 117 pour 100 000 habitants en France, est plus faible que l’ensemble des pays du Conseil de l’Europe ! Et 50 % seulement des peines comprennent de la prison, 20 % de la prison ferme. Environ 80 000 peines de prison prononcées chaque année demeurent inexécutées.

Ce texte est marqué du sceau de l’injustice : les victimes en sont les grandes oubliées. Vous poussez à l’extrême le principe d’individualisation de la peine. Ce principe, figurant déjà à l’article 132-24, est bien sûr un gage d’équité et d’humanité, qu’il ne faut pas remettre en cause. Mais votre texte va beaucoup plus loin en incitant le juge à se livrer à une analyse de plus en plus subjective sur le caractère, la situation et la vie privée de la personne. Ainsi, c’est moins l’acte qui sera jugé que la personnalité de l’auteur de l’infraction.

Que soient reconnues des circonstances aggravantes ou atténuantes est une chose, mais réaliser des investigations complémentaires sur la personnalité et la situation sociale du prévenu, comme le prévoit votre article 4, en est une autre. Le risque est bien évidemment celui d’une justice à la carte, pouvant conduire à de véritables procès d’intention, pour ne pas dire de personnalité.

Dans le même esprit, vous supprimez les peines plancher, considérant que le récidiviste ne doit pas subir par principe une peine minimum légalement plus élevée. C’est oublier que ce dispositif n’avait rien d’automatique, si tant est que le magistrat motivait sa non-application. Cette suppression est logique de votre part puisque, dans votre article 1er, vous omettez sciemment deux fonctions essentielles de la peine, la dissuasion et la protection, pour ne plus citer que la sanction et la réinsertion.

Cette rédaction révèle bien que l’esprit qui vous anime se soucie avant tout du coupable et non de la victime qui, elle aussi pourtant, attend justice. Que vous le vouliez ou non, la meilleure des préventions reste la peur de la sanction. C’est un signal désastreux que vous envoyez aux voyous en instaurant une peine alternative à la prison, dite « contrainte pénale », pour les délits de cinq ans d’emprisonnement et moins – ou pour tous les délits même, selon le texte que vous avez laissé amender en commission !

Il s’agit, ni plus ni moins, d’un dispositif déjà existant, le sursis avec mise à l’épreuve, que vous systématisez afin d’éviter la prison à l’immense majorité des condamnés. Soyons clairs : nous ne parlons pas là de vol de bicyclette mais de coups et blessures volontaires, de trafic de stupéfiants, de profanation de cimetière, d’exhibition sexuelle dans un lieu public, d’agression sexuelle et de braquage si l’amendement socialiste est maintenu. Il y a là un oubli total du besoin de justice de la victime portant en lui le risque de vendettas et de soifs de justice inassouvies !

De même, l’aspect dissuasif s’efface complètement au profit d’une pseudo-rééducation dont le suivi et le contrôle effectif laissent tout à craindre. En effet, 175 200 personnes sont déjà suivies en milieu ouvert, soit deux fois et demie le nombre de personnes incarcérées. Un tel afflux empêche les services de probation d’assurer le contrôle des obligations et interdictions prononcées par la justice. Les contrôles de domicile ne peuvent plus être assurés régulièrement. En région parisienne, certains tribunaux se sont résignés à accorder des permissions pour la totalité du week-end jusqu’au lundi soir. Cela signifie que les condamnés ne restent effectivement sous surveillance que trois jours par semaine ! Compréhensible, dès lors qu’un juge d’application des peines traite en moyenne 120 dossiers…

Par conséquent, comment assurer la surveillance alourdie de la contrainte pénale, sachant que 45 % des individus condamnés à une peine alternative à la prison ont récidivé ? On se souvient de la triste affaire Tony Meilhon, qui a tué en 2011 la jeune Laetitia Perrais alors même qu’il était sous le coup d’un sursis avec mise à l’épreuve, soit l’équivalent de votre contrainte pénale.

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