Intervention de Christiane Taubira

Séance en hémicycle du 5 juin 2014 à 15h00
Prévention de la récidive et individualisation des peines — Après l'article 7

Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice :

L’avis du Gouvernement aussi sera défavorable. Vous proposez l’interdiction d’utiliser cette procédure pour les délits passibles de plus de sept ans d’emprisonnement. Cela exclurait des délits pour lesquels la comparution immédiate est vraiment une procédure judicieuse, pertinente, efficace : je pense par exemple au trafic de stupéfiants ou à certains vols avec circonstances aggravantes.

Ce que je vous propose, c’est de faire vraiment confiance aux magistrats et aux juridictions. Je comprends la réticence, car ces dernières années, il y a eu, et même de la part du législateur, une incitation à recourir de façon presque systématique et en tout cas incontestablement excessive à la comparution immédiate. On a vu qu’un certain nombre de juridictions s’étaient quasiment spécialisées. En tout cas, elles utilisent la comparution immédiate de façon disproportionnée.

Sinon, quand il n’y a pas cette pression, et sachant que la comparution immédiate est lourde, notamment pour les petites juridictions, puisqu’il s’agit d’une formation collégiale, les magistrats apprécient. Et ils apprécient à partir de plusieurs critères. Si on l’interdisait de façon aussi tranchante que vous le proposez, on risquerait d’avoir un effet pervers, que probablement vous ne recherchez pas : dans certaines situations, la décision prise débouchera sur une détention provisoire qui risque d’être longue.

Ensuite, on sait bien que la comparution immédiate peut être fortement préjudiciable aux victimes, qui n’ont pas le temps de rassembler les différents éléments qui permettent d’estimer convenablement le préjudice subi. Dans ce cas, il vaut mieux avoir un peu de temps.

Par ailleurs, dans la mesure où ce texte lui-même améliore la procédure par la césure possible du procès pénal, on disposera d’un temps qui permettra de décider de façon plus judicieuse.

Comme vous êtes toujours très impliqué dans les débats sur la justice, je vous rappelle qu’à l’occasion de la transposition de la directive B relative au droit à l’information, nous avons introduit une disposition contenue dans la directive C sur la présence de l’avocat en cas de comparution immédiate : vous avez autorisé la présence de l’avocat lorsque le prévenu est déféré au procureur. Compte tenu de ces dispositions, je vous propose le retrait de ces amendements.

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