Intervention de Jean-Pierre Philibert

Réunion du 3 juin 2014 à 9h00
Délégation aux outre-mer

Jean-Pierre Philibert, président de la Fédération des entreprises d'outre-mer :

Nous suggérons de privilégier le secteur du tourisme, car c'est le plus exposé à la concurrence des pays voisins à bas coûts salariaux. Lorsque la ministre des Outre-mer a présenté sa feuille de route, elle a elle-même évoqué des mesures spécifiques pour le tourisme, sans plus de précision à ce stade. Il pourrait notamment s'agir d'aides à la rénovation hôtelière.

Le secteur du tourisme souffre d'une autre difficulté : l'âge moyen des employés y est très élevé, notamment à la Martinique, où il atteint 53 ans. Or, les métiers du tourisme deviennent de plus en plus pénibles, ne serait-ce qu'en raison de l'évolution de la literie, où les lits classiques sont de plus en plus souvent remplacées par des sommiers « king size », autrement plus difficiles à manipuler. C'est pourquoi les hôteliers et la FEDOM ont engagé, notamment à la Martinique, une négociation avec les organisations syndicales et les services de l'État sur des mesures d'aide au départ des salariés âgés ou handicapés. Parallèlement, le secteur recruterait des jeunes nouvellement formés, à raison de 1,1 ou 1,2 pour 1 salarié âgé partant. Ces discussions sont longues et compliquées, mais nous avons bon espoir de les voir aboutir. Les organisations syndicales antillaises, à une exception près, sont plutôt favorables à cette négociation. Nous abordons actuellement la question des compensations et du nombre d'embauches.

Cela étant, si nous augmentons les aides au tourisme, il nous faudra diminuer d'autant les aides aux secteurs prioritaires mais non surexposés. C'est particulièrement le cas du bâtiment : même s'il n'est évidemment pas soumis à la concurrence des pays voisins, il n'en est pas moins indispensable au développement de nos économies. À La Réunion, le secteur du bâtiment n'emploie plus que 14 000 salariés, contre 27 000 en 2009. C'est un secteur qui souffre. Pour l'aider, il faut trouver une formule qui permettrait de jouer sur l'aide au logement intermédiaire. Avant la LODEOM, ce secteur était soutenu par les dispositions de l'article 199 undecies A du code général des impôts qui permettait la défiscalisation au titre du logement libre et intermédiaire. Cela a donné lieu à un certain nombre d'effets d'aubaine auxquels la LODEOM a mis un terme, mais d'une façon très brutale – c'est un domaine dans lequel nous ne savons pas doser, on en sait quelque chose dans le domaine de l'industrie photovoltaïque ; la suppression de la défiscalisation dans ce domaine a totalement déstabilisé le secteur qui était pourtant prometteur en termes d'emplois : nombre de jeunes, souvent très qualifiés, attendaient sur des projets de microcentrales qui ont été réduits à néant, et ont fini par abandonner ce domaine d'activité pour partir en métropole.

Bien que le dispositif soit clos depuis 2009, il reste aujourd'hui 230 millions d'euros de dépenses fiscales au titre de l'article 199 undecies A. Sur ce point, je suis sidéré par le silence de Bercy. Pourquoi ne pas les réutiliser, à des conditions dont nous sommes prêts à débattre, pour redynamiser le secteur du bâtiment ? Il est clair que les lois Duflot et le Scellier ne fonctionnent pas outre-mer. Un investisseur métropolitain a tout intérêt à investir en métropole. Pourquoi irait-il le faire à La Réunion, à la Martinique ou en Guadeloupe ?

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