Intervention de Christophe Cavard

Séance en hémicycle du 8 novembre 2012 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2013 — Travail et emploi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Cavard :

Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le ministre délégué, monsieur le rapporteur spécial, messieurs les rapporteurs pour avis, fin septembre, plus de 4,5 millions de chômeurs étaient inscrits à Pôle Emploi. Ce niveau de chômage très élevé entretient la modération salariale, ne facilite pas le dialogue social, cher collègue Vercamer, et augmente le nombre des travailleurs pauvres.

Ainsi les revenus des Français sont devenus fortement inégalitaires : on compte aujourd'hui plus de 8 millions de personnes en dessous du seuil de pauvreté, dont je rappelle qu'il s'établit, en France, à 954 euros par mois. Sur le front du logement et avant le lancement d'une politique résolument volontariste par le Gouvernement, on compte, selon la fondation Abbé Pierre, plus de 3,6 millions de mal logés. Au plan de la santé, avec plus de 2 millions de personnes bénéficiant de la CMU, on sait que de plus en plus de personnes doivent désormais choisir entre les soins et la satisfaction de leurs besoins quotidiens.

Chers collègues de l'opposition, l'héritage est lourd !

Les politiques sociales et de solidarité envers les personnes qui rencontrent des difficultés pour se nourrir, se loger, se soigner, se chauffer et se déplacer sont indispensables en temps de crise, si nous ne voulons pas être accusés de non-assistance à personnes en danger. Cependant, nous devons réaffirmer très clairement que l'objectif de nos politiques est, non pas le maintien dans la précarité, mais bien le retour ou l'accès à une autonomie financière satisfaisante pour chacun.

À cette fin, le budget 2013 de la mission « Travail et emploi » prévoit des moyens nouveaux pour le service public de l'emploi. La création de 2 000 postes supplémentaires à Pôle emploi et le redéploiement de 2 000 autres postes marquent notre volonté d'améliorer l'accompagnement des personnes en recherche d'emploi. Celles-ci ne sont pas des marchandises qui devraient être traitées à la va-vite, au prétexte de soigner la performance ou la prétendue rentabilité du service. Ces personnes ont des profils différents, des projets de vie différents, donc des besoins différents. C'est dans cet esprit que nous soutiendrons les amendements sur l'AER et les entreprises d'insertion défendus par le rapporteur pour avis Jean-Patrick Gille. En outre, afin de poursuivre l'amélioration du service public, nous devrons être attentifs aux pratiques de Pôle emploi, notamment le recours à des prestataires de service, et prévoir des évaluations plus qualitatives que quantitatives de leurs interventions, évaluations qui devront être conduites, bien entendu, avec les usagers : personnes en recherche d'emploi et entreprises en recherche de salariés.

Le budget 2013 prévoit également la mise en oeuvre des 100 000 emplois d'avenir, qui seront bientôt renforcés par les contrats de génération. Nous n'y reviendrons pas ici ; nous avons largement soutenu leur création. Je me contenterai de rappeler que, pour nous, ces emplois n'ont bien entendu pas vocation à remplacer les emplois créés par les entreprises et les services publics dans la marche quotidienne de leurs activités.

Par ailleurs, je souhaite revenir sur le fameux débat sur le choc de compétitivité. Nos collègues de l'opposition ne devraient pas rester fidèles à de vieilles rengaines et se tourner vers le passé pour y lire l'avenir. Le rapport Gallois a le mérite d'exister, mais, plutôt que des solutions maintes fois expérimentées, nous préférerions que soient proposées des solutions nouvelles, qui prennent en compte la nécessité d'un changement de mode de développement. Les théories et les pratiques de l'emploi pour l'emploi ou de la croissance pour la croissance ont produit trop de dégâts sociaux et environnementaux. L'objectif d'une croissance sélective permettrait de soutenir des secteurs à fort potentiel répondant aux besoins d'aujourd'hui. Non, l'automobile n'est pas un secteur d'avenir, contrairement aux transports collectifs et aux énergies renouvelables. Oui, il faut booster le secteur du bâtiment et de l'éco-construction. Oui, une fiscalité écologique peut être un outil efficace pour transformer notre économie. Oui, les régions doivent avoir, en lien avec l'Europe, les moyens d'impulser un développement économique adapté à leurs ressources et à leurs potentiels.

Pour favoriser la création d'activités, donc d'emplois, nous devons accompagner les entreprises dans le développement de nouvelles filières et renforcer un tissu de PME non délocalisables. Nous devons encourager l'accompagnement des salariés, des chômeurs et des jeunes vers des formations nécessaires à la reconversion de certaines activités ou à la création de nouvelles. Tel est le sens de l'amendement de notre rapporteur Cherpion, que je soutiens, visant à mettre en place un dispositif d'expérimentation destiné aux jeunes apprentis afin d'améliorer leur taux de qualification. Nous y reviendrons tout à l'heure.

Toutes les innovations politiques qu'il nous faudra porter ensemble soulignent combien la formation des jeunes ou la formation tout au long de la vie sont un enjeu central. C'est une des conditions d'une croissance sélective privilégiant l'utilité sociale et la qualité environnementale. Mais, puisque j'interviens sur la mission « Travail et emploi », et non sur la mission consacrée au développement économique, j'insiste pour que nous portions une attention renforcée aux personnes concernées par ces politiques.

Les Français nous ont donné mandat pour redonner du souffle à leur quotidien. Cela passera par un changement de méthode. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur plusieurs bancs des groupes SRC et RRDP.)

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