Intervention de Jean-René Marsac

Séance en hémicycle du 8 novembre 2012 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2013 — Travail et emploi

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-René Marsac :

Madame la présidente, messieurs les ministres, messieurs les rapporteurs, chers collègues, malgré les contraintes budgétaires, la mission « Travail et emploi » est consolidée. Par ailleurs, tous les syndicats de salariés et le patronat ont décidé de signer un accord sur la mise en oeuvre des 500 000 contrats de génération. Nous attendons beaucoup de la relance du dialogue social, qui est l'un des marqueurs les plus importants des six premiers mois de ce Gouvernement, et qui contribuera fortement à changer les relations sociales dans les entreprises, dans les branches et dans les territoires. Le rapport Gallois vient très justement de rappeler que le dialogue, la décision collective et la négociation participent fortement à la performance économique ; or, on sait que la France est très mal placée en matière de dialogue social.

Sur l'intervention de l'État, je souligne et soutiens, comme mes collègues de la majorité, l'effort budgétaire qui a été consenti. Je pense, néanmoins, qu'en matière de politiques de l'emploi, d'orientation professionnelle et d'accompagnement des demandeurs d'emploi, des réorientations fortes s'imposent, ainsi que de nouvelles modalités d'organisation. À cet égard, deux orientations me semblent essentielles.

Il faut d'abord aller plus loin dans la mobilisation des territoires autour des questions d'emplois, de formation et d'insertion professionnelle. Il s'agit là d'une approche très différente pour le service public de l'emploi et pour les collectivités territoriales.

La deuxième orientation est sans doute moins consensuelle, mais je tiens à l'exprimer, car elle est le fruit d'une trentaine d'années d'expérience dans le domaine de la formation et de l'insertion. Sans renier la nécessaire individualisation de l'accompagnement, je pense que le « tout individuel » rencontre très vite des limites, lorsqu'il s'agit d'apporter des réponses aux demandeurs d'emploi. Le malaise de Pôle Emploi réside en grande partie dans cet écart entre les attentes individuelles, souvent angoissées, des demandeurs d'emploi, et les réponses disponibles.

Je milite donc pour un soutien renforcé à des espaces collectifs d'accompagnement, tels que les structures d'insertion par l'activité économique, les groupes d'entraides, les groupes projets, ou encore les ateliers de formation et les coopératives d'activités. Il faut aussi redonner du sens, et redonner une place, à l'éducation permanente et à l'éducation populaire dans les processus de retour vers la formation de populations qui aujourd'hui n'entrent pas, ou très peu, dans les processus de qualification professionnelle.

Les modalités de la mise en oeuvre, déjà existantes ou à inventer, sont multiples. Elles répondent en partie aux dégâts résultant de l'isolement des chômeurs face à leurs problèmes, et créent des dynamiques, personnelles et collectives, que l'entretien individuel ne peut pas produire.

Pour une plus grande efficacité des politiques de l'emploi, une nouvelle architecture doit être mise en oeuvre dans les deux ans à venir, qui pourra s'appuyer, en particulier, sur la nouvelle loi de décentralisation.

À l'État et à l'opérateur public reviendront le pilotage et le contrôle de l'accès aux droits, définis par la loi et par les conventions entre les partenaires sociaux. Aux régions incombera l'articulation entre stratégie de développement économique, objectifs emploi-formation par secteurs d'activités et accès de tous à l'orientation et à la formation tout au long de la vie. Aux intercommunalités, enfin, il sera reconnu une compétence « emploi et insertion professionnelle », attachée naturellement à leur compétence économique et aux ressources qu'elles en tirent.

Les maisons de l'emploi jouent, à ce niveau local, un rôle essentiel de rencontre et de coordination entre les services de l'État, le service public de l'emploi, la région et les collectivités locales. Dans mon territoire, le pays de Redon, la maison de l'emploi est aussi maison de la formation professionnelle – labellisée par le conseil régional – et de l'insertion. Je pense que ce genre d'articulations est très positif pour la dynamique territoriale.

Pour compléter cette architecture, l'évolution de plusieurs dispositifs me semble nécessaire. Je ne donnerai ici que quelques exemples et je poserai quelques questions. Quel est le rôle du RSA dans le retour à l'emploi et dans la consolidation de l'insertion ? À quel niveau doit-il être piloté, et comment doit-il être articulé avec l'ensemble des politiques de l'emploi ?

La question de l'insertion par l'activité économique fait l'objet d'un rapport conduit par l'administration. C'est une bonne chose, car il est utile de revisiter le fonctionnement de ces structures. Mais n'est-il pas possible de mieux analyser leur fonction dans un projet de développement économique et social local ? Elles ne sont pas des prolongements du service public, mais des entreprises, qui ont la particularité de considérer la fabrication de l'emploi comme le coeur de leur métier. L'État doit donc vraiment les considérer comme des entreprises de l'économie sociale et solidaire.

Sur la formation, enfin, sans nier la logique de marché qui est à l'oeuvre, et donc le nécessaire appel d'offres, les cahiers des charges doivent introduire des critères redonnant un espace aux initiatives et aux innovations, particulièrement à celles qui sont inspirées de l'éducation permanente et populaire. Je crains, si nous n'agissons pas dans ce sens, que la formation de tous, tout au long de la vie, ne soit qu'un voeu pieux. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.)

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion