Intervention de Gérard Cherpion

Séance en hémicycle du 11 juin 2014 à 15h00
Impact de la réduction progressive du temps de travail — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Cherpion :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires sociales, chers collègues, nous saluons l’initiative du groupe UDI de dédier sa demande, unique pour cette session parlementaire, de commission d’enquête au sujet du travail et de l’emploi, première préoccupation de nos concitoyens.

Le périmètre d’étude de la commission est large et permettra d’aborder tous les sujets liés à la baisse du temps de travail, à son impact sociétal, social, économique et financier. Ce sujet est d’autant plus important que les lois visées ont été votées il y a plus de quinze ans et qu’il est nécessaire d’en mesurer le bilan précis et exact, au moment où la France traverse l’une des crises économiques et sociales la plus grave de son histoire.

Ce rapport sera l’occasion de mettre en exergue les faiblesses et les contradictions de notre système, mais aussi ses atouts, tels que la grande capacité de travail des Français. En effet, selon Eurostat, les Allemands passent une heure de plus par semaine au travail que les Français, conséquence directe des lois sur les trente-cinq heures.

Pourtant, dans le même temps, les Français travaillent 1 479 heures par an, contre 1 397 heures pour les Allemands. Cette différence s’explique notamment par le recours massif aux emplois à temps partiel en Allemagne.

Par ailleurs, la productivité française se situe dans la moyenne des pays européens, même si elle a légèrement baissé en 2013. Malgré tous ces atouts indéniables en matière de travail et d’emploi, liés à la qualité de la main-d’oeuvre française, nous sommes toujours loin des objectifs des taux d’emploi de la stratégie de Lisbonne, fixés à 70 %. Pourquoi ?

Je le dis sans détour, nous pâtissons des dispositions législatives prises à une période de forte croissance, qui sont un frein à la compétitivité de nos entreprises. C’est pour cette raison que de nombreuses lois sont intervenues sous les précédentes législatures pour compenser les erreurs des trente-cinq heures, notamment les allégements Fillon, la TVA compétitivité, ou encore la loi TEPA, avec les exonérations de charges, en particulier la mesure du « zéro charge » pour toute embauche d’un salarié dans les petites entreprises, ainsi que la défiscalisation sur les heures supplémentaires. Les neuf millions de salariés qui ont pu bénéficier de cette mesure n’ont pas oublié, ni digéré, sa suppression.

Mais le problème du passage aux trente-cinq heures est également financier, puisque les mesures compensatoires ont un coût pour l’État, qu’il s’agisse des allégements de charges pour les entreprises ou des dispositions en faveur du revenu des salariés. La commission d’enquête sera donc utile à la détermination claire du coût global de cette réforme.

Enfin, le but poursuivi par les lois Aubry était la création d’emplois, comme si le marché du travail était un gâteau que l’on pouvait partager entre salariés et demandeurs d’emploi. La réalité est tout autre : c’est le travail qui crée l’emploi ; c’est le facteur de développement de l’entreprise, de l’épanouissement des salariés, donc de la richesse de la France.

La commission répondra à cette question cruciale, mais je souhaite qu’elle se penche également sur les lois adoptées depuis 2012, qui ont renforcé les difficultés structurelles de notre pays. Tout cela ne doit pas cacher la politique économique, sociale et fiscale contradictoire du présent Gouvernement. Alors qu’il supprime la TVA compétitivité, pour ensuite augmenter la TVA sans baisser les charges, supprime les heures supplémentaires, ce qui a eu pour conséquence une baisse du pouvoir d’achat, il propose un crédit d’impôt pour la compétitivité qui, selon la Cour des comptes, ne peut s’apparenter à une baisse du coût du travail.

Ainsi, l’État compense partiellement la baisse du temps de travail à hauteur environ de 20 milliards d’euros, et finance dans le même temps indirectement les entreprises, pour 20 milliards d’euros également.

C’est probablement l’une des raisons pour lesquelles aucun pays européen n’a souhaité suivre le système du temps de travail français. Ainsi, en France, le code du travail interdit de travailler moins de vingt-quatre heures par semaine et limite le temps de travail légal à trente-cinq heures, ce qui remet en question l’avenir de certains emplois, comme le portage de journaux, les services médico-sociaux, ou encore les services à la personne, dont le temps de travail est inférieur à vingt-quatre heures et, a contrario, l’encadrement du dépassement des trente-cinq heures très strict.

Dans cette situation, le groupe UMP est bien sûr favorable à la création de cette commission d’enquête, qui permettra de faire un bilan sérieux et fiable de l’impact de la réduction du temps de travail. Elle devra également être force de propositions en matière d’emploi, première préoccupation des Français, et pour cela permettre de libérer les énergies des entreprises.

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