Intervention de Michel Sapin

Séance en hémicycle du 8 novembre 2012 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2013 — Travail et emploi

Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social :

Messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les députés, le budget que Thierry Repentin et moi-même avons l'honneur et le plaisir de vous présenter aujourd'hui répond à l'exigence du moment : la lutte contre le chômage.

Ce budget répond à l'urgence de la situation à laquelle nous faisons face aujourd'hui, et que nous connaissions. Nous n'avons cessé de dénoncer le million de chômeurs en cinq ans, mais la situation n'a cessé d'empirer au cours des dernières années.

Cette situation se traduit en un contexte particulièrement dégradé, qu'il s'agisse du marché du travail, qui a connu plus de dix-sept mois consécutifs de hausse du chômage, ou de nos finances publiques. Ce budget est donc avant tout chose un budget de combat dans l'urgence.

Mais s'il répond à l'urgence, ce budget prépare aussi l'avenir, avec le financement de nos premières priorités. Il s'agit bien des premières priorités, car tous les nouveaux dispositifs ne trouvent pas, aujourd'hui, leur traduction budgétaire dans ce projet de loi de finances. Par exemple, le financement du contrat de génération n'y est pas inscrit puisque la négociation avec les partenaires sociaux vient de s'achever avec succès. Toutes les organisations syndicales et patronales ont signé cet accord sur le contrat de génération, et le projet de loi sera déposé à la fin de cette année, puis débattu dans cet hémicycle au début de l'année prochaine.

Nous avons ouvert d'autres chantiers, beaucoup d'entre vous y ont fait allusion, notamment dans le cadre de la grande conférence sociale dont les travaux vont durer au moins jusqu'à la fin de cette année.

Nous revendiquons le temps nécessaire pour construire nos réformes dans la durée. Notre politique n'est pas celle des coups d'éclat qui occupent l'agenda médiatique et s'évanouissent aussi vite qu'ils sont survenus. Ce que nous voulons, c'est faire bouger en profondeur la société. Cette entreprise, comme toute entreprise, est longue, profonde, et a besoin de s'inscrire dans le temps. Et la méthode qui permet d'inscrire dans le temps et la durée est celle du dialogue social.

Monsieur le rapporteur, vous avez insisté sur un point que nous avons en commun : la volonté de voir ce dialogue social s'épanouir, et s'inscrire dans une réalité qui ne soit pas formelle, mais qui permette de faire bouger en profondeur notre société. L'évolution de la représentativité a déjà été votée, et nous la mettons en oeuvre pour son volet salarial, tandis que les organisations patronales se sont engagées à nous faire les propositions les plus consensuelles possibles s'agissant du volet patronal de cette réforme. Dans ce domaine comme dans tout autre, si la négociation ne permet pas l'accord, c'est la loi qui tranchera.

Je souhaite vous répéter l'importance que j'accorde à ce dialogue social, et je pense que cela est partagé largement sur tous les bancs de cette assemblée. Ce n'est pas une manière de remettre à plus tard que de soumettre un sujet au dialogue social. C'est la bonne manière pour dépasser des intérêts qui peuvent être divergents, mais qui doivent trouver des solutions durables face au défi de l'emploi.

C'est notre ambition profonde, car nous voulons changer les choses durablement. Changer pour les chômeurs, pour les jeunes, pour les seniors, et pour nos concitoyens les plus fragiles.

La troisième caractéristique de ce budget est qu'il est responsable. Il fait preuve du sérieux budgétaire dont est empreint l'ensemble du projet de loi de finances qui vous est présenté et dont nous débattons depuis plusieurs semaines. Dans le combat qui est le nôtre, les efforts d'économie et de redressement budgétaire doivent être demandés à tous, dans la justice. C'est ainsi que le schéma d'emploi de mon ministère intègre 141 suppressions de postes, et contribuera ainsi aux créations de postes prévues dans les secteurs prioritaires que sont l'éducation, la justice et la police.

Des économies importantes seront aussi réalisées sur les moyens de fonctionnement courant. Nous savons tous que ces économies ne seront pas faciles, et avant de vous détailler, mesdames et messieurs les députés, les priorités de ce projet de budget, je voudrais saisir cette occasion pour remercier et rendre un hommage appuyé au personnel de mon ministère qui, quotidiennement, oeuvre pour les politiques de l'emploi, du travail, de la formation professionnelle et du dialogue social. (Applaudissements sur tous les bancs.) Ils peuvent compter sur mon soutien et sur le vôtre, dans des tâches souvent difficiles et indispensables à la protection des salariés et à la cohésion de notre société. De ce point de vue, le temps est venu d'un climat nouveau au sein de notre ministère et d'un respect retrouvé.

Ce budget finance d'abord l'urgence, avec le maintien d'un niveau élevé de contrats aidés. C'est le niveau qui figurait dans la loi de finances initiale pour 2012 que nous avons choisi de maintenir : 340 000 contrats non marchands et 50 000 contrats marchands, parce que les contrats aidés restent le meilleur levier pour amortir les chocs de conjoncture pour les publics les plus fragiles.

Prescrire un contrat aidé, ce n'est pas seulement offrir une solution à un chômeur, c'est aussi lui donner du pouvoir d'achat, et nous l'assumons. Mais notre action va bien au-delà. Le chômage est une trappe de laquelle il est difficile de s'extraire une fois qu'on y est tombé. Les contrats aidés ne sont pas une fin en soi, ils sont une échelle pour remonter, reprendre pied dans la société, retrouver confiance en soi, réapprendre parfois un rythme de vie ponctué par les horaires de son travail et regagner ainsi l'estime de soi.

Là aussi, nous changeons de méthode, et nous rejetons une logique purement quantitative dont nous avons vu la traduction dans le rythme d'utilisation des contrats aidés au cours de cette année. À la politique du chiffre, je préfère une politique de qualité, et c'est le sens que nous donnons à ce budget : mettre l'accent sur la qualité des contrats aidés, en vue d'une meilleure insertion des bénéficiaires, et aussi afin qu'ils y trouvent de quoi construire leur vie et leur bonheur légitime.

À ce titre, nous mettons fin pour l'année 2013 et au-delà, tant que nous en aurons la responsabilité, au stop and go dans l'attribution de ces contrats aidés et nous en allongeons la durée par rapport à celle qui est constatée aujourd'hui.

Je l'ai demandé aux préfets de région et aux DIRECCTE dans des circulaires qui leur ont été récemment adressées. J'y serai particulièrement attentif, et je compte sur votre collaboration et votre connaissance du terrain pour me permettre de faire respecter cette directive essentielle.

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