Intervention de Thierry Mariani

Séance en hémicycle du 12 juin 2014 à 9h30
Lutte contre l'apologie du terrorisme sur internet — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThierry Mariani :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, nous examinons aujourd’hui une proposition de loi renforçant la lutte contre l’apologie du terrorisme sur internet. Les événements récents montrent hélas qu’il y a urgence à agir en la matière.

Le nombre des Français qui vont grossir les rangs du djihad en Syrie a connu une augmentation de 75 % ces derniers mois. Ces personnes constitueraient d’ailleurs le premier contingent de combattants européens dans ce pays. Ce phénomène est sans précédent : ni la guerre en Afghanistan ni la guerre en Irak n’ont eu de telles répercutions, en si peu de temps.

Cette situation s’expliquerait en partie par le fait que nombre de djihadistes ont suivi les étapes d’un processus d’auto-radicalisation et d’embrigadement depuis internet. Internet occupe ainsi une place déterminante dans ce processus qui nuit aux intérêts fondamentaux de notre nation.

Force est de constater qu’internet n’a plus rien d’un monde virtuel aujourd’hui. Il abrite des enjeux géopolitiques bien réels et peut ainsi se révéler un véritable vecteur de radicalisation, de recrutement et de propagande.

Au-delà de l’affaire Snowden, qui avait mis en lumière le problème de la cybersurveillance, on peut se demander comment lutter contre les nouvelles menaces issues d’internet telles que le cyberdjihadisme, dont l’origine géographique semble parfois extrêmement compliquée à déterminer.

Les communautés djihadistes virtuelles, qui apparaissent sur des sites, des forums et des réseaux sociaux, attirent un public toujours plus large et plus jeune. Elles sont à l’origine du basculement et de l’enrôlement d’individus souvent isolés dans le terrorisme.

Ce texte, présenté par Guillaume Larrivé, vise à renforcer la lutte contre la diffusion du terrorisme par le biais d’internet. Il vise à doter notre arsenal juridique d’outils nouveaux permettant de faire face à l’évolution récente de la menace terroriste que constitue le développement du cyberdjihadisme.

Les solutions proposées sont le fruit et l’aboutissement d’un long processus de réflexion et d’auditions. Les mesures figurant dans cette proposition de loi ont déjà été proposées à notre assemblée à plusieurs reprises. Il serait regrettable de passer, une fois encore, à côté, puisque la situation actuelle prouve chaque jour davantage la nécessité de les mettre en place. Il semble ainsi indispensable, pour lutter convenablement contre le cyberterrorisme, de rendre possible le blocage des sites djihadistes ou de créer un nouveau délit pour la consultation habituelle de ces sites.

Je ne sous-estime pas les complications juridiques et matérielles qu’engendrerait l’application de cette proposition de loi au regard, notamment, du principe fondamental de la protection des libertés publiques et individuelles, mais je reste convaincu qu’il est possible de respecter cet impératif.

Même s’il ne résout pas tous les problèmes face à un monde virtuel complexe, ce texte revêt une importance particulière. Il doit être l’occasion de renforcer une lutte encore plus active et plus globale contre le terrorisme. Car, comme je l’ai rappelé, ainsi que nombre de mes collègues, il y a urgence.

J’appelle donc le Gouvernement à multiplier les positions en faveur de ce type d’initiatives sur des sujets qui doivent faire consensus car ils relèvent de l’intérêt général. Notre groupe avait ainsi voté la loi de lutte contre le terrorisme du 21 décembre 2012. D’ailleurs, je me félicite qu’en mars dernier, au tribunal de Paris, ait eu lieu un procès, inédit dans les annales de la justice française, pour « apologie » et « provocation au terrorisme », grâce à l’entrée en vigueur de cette même loi. Pour la première fois, un cyber propagandiste a pu être placé en détention provisoire pour apologie d’actes de terrorisme.

Dans cet esprit de coopération, le groupe UMP estime que nous devons aller plus loin. La présente proposition de loi nous permettrait de répondre à l’endoctrinement via internet, mais après leur recrutement et leur départ en Syrie, nous devrons faire face au retour en Europe de combattants aguerris, endoctrinés et membres actifs de réseaux terroristes. La France, comme les autres démocraties européennes, devra bientôt gérer ces retours sur son sol. Ce phénomène pourrait se retourner contre elle.

Voilà pourquoi j’ai cosigné avec enthousiasme une proposition de loi de Lionnel Luca, qui vise à déchoir les combattants djihadistes français avérés de la nationalité française. Cela pourrait constituer une autre réponse au terrorisme ; le Royaume-Uni nous a montré la voie. Toutes les solutions pour empêcher le terrorisme de continuer à se développer sur notre territoire doivent être approfondies, et la présente proposition de loi mérite d’être votée.

Je souhaite que la majorité fasse preuve, à son égard, du même esprit constructif que celui qui nous a animés lors de l’examen de la loi antiterroriste de décembre 2012. C’est une priorité pour éviter de nouveaux endoctrinements et autant de futures menaces pour notre sécurité. Cette proposition répond à un aspect du problème très important et les mesures qu’elle contient doivent être mises en oeuvre très rapidement pour lutter efficacement contre l’apologie du terrorisme sur internet.

Il est aussi nécessaire d’adapter notre politique internationale que de renforcer notre arsenal juridique national. Je pense, monsieur le secrétaire d’État, que l’intervention française au Mali était nécessaire, et je l’ai soutenue. Mais comment continuer à soutenir indirectement certains mouvements ouvertement djihadistes en Syrie ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion