Intervention de Jeanine Dubié

Séance en hémicycle du 11 septembre 2014 à 9h30
Agriculture alimentation et forêt — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJeanine Dubié :

Je voudrais aussi remercier tous nos collègues qui ont participé, tôt le matin et tard dans la nuit, à toutes ces séances de travail, pour avoir exprimé leurs convictions tout en conservant une forme de bienveillance, contribuant ainsi à la sérénité de nos débats. J’ai une pensée particulière pour notre rapporteur Germinal Peiro, qui n’a pas compté les heures, pour examiner, parfois dans des conditions d’urgence, un par un les milliers d’amendements, avec son expertise qui n’est plus à démontrer. Je l’en remercie.

Enfin, je n’oublie pas le président de la commission des affaires économiques, François Brottes, qui, comme d’habitude, a su trouver les mots pour assurer la bonne tenue de nos débats lorsque nous avons rencontré des blocages, tout en détendant régulièrement l’atmosphère avec ses bons mots et son sens de la convivialité.

Au Sénat comme à l’Assemblée, de très nombreux amendements, dont certains très importants, ont été adoptés, des amendements émanant de toutes les familles politiques, ce qui est trop rare et qui mérite d’être souligné car lorsqu’il s’agit de sujets majeurs, nous devons pouvoir travailler ensemble en dépassant les clivages partisans.

Au cours des deux lectures, le groupe RRDP a déposé plus de deux cent cinquante amendements. Plus de soixante ont été adoptés et une trentaine ont été satisfaits par l’adoption d’amendements identiques ou proches. Nos amendements visaient globalement à donner des perspectives d’avenir à l’agriculture en favorisant l’installation des jeunes agriculteurs et la diversité des productions sur l’ensemble du territoire, en luttant contre la perte de foncier agricole, notamment par le renforcement des SAFER, et en confortant la gouvernance territoriale avec l’amélioration du rôle des chambres et de leurs salariés, ainsi que le rôle et les fonctions des départements et des régions.

Ils visaient aussi à revenir à des mesures raisonnables et pragmatiques sur le respect de l’environnement en assouplissant et aménageant des interdictions et des conditions d’utilisation des produits phytopharmaceutiques, des engrais et des pesticides. Nous nous félicitons que des amendements de compromis aient été adoptés pour encadrer l’utilisation des produits les plus dangereux à proximité des lieux sensibles, sans pour autant nuire à la compétitivité des exploitations agricoles.

Concernant la lutte contre les prédateurs, plusieurs amendements du groupe RRDP visaient à améliorer la prise en compte du rôle de la chasse et des chasseurs dans les territoires ruraux et agricoles. Je remercie ici Frédérique Massat pour son engagement sur ce sujet.

Nous nous félicitons de certaines avancées, notamment celle concernant les éleveurs qui sont désormais autorisés à abattre les loups dans certaines zones et à certaines conditions, pour se défendre et enrayer les phénomènes de surpopulation et d’attaques sur les troupeaux. Je me permets d’ailleurs de dire que je suis heureuse que la CMP ait permis d’ajouter au texte de l’Assemblée les termes « ou du berger ». Le texte sera ainsi plus clair.

Au final, ce texte contient de très nombreuses dispositions, dont certaines plus importantes que d’autres, qui se traduiront par de réelles améliorations pour nos agriculteurs. Même si aucune d’entre elles ne suffira à résorber la crise grave et profonde que traverse notre agriculture, les députés du groupe RRDP sont convaincus que leur addition sera profitable à nos paysans.

Parmi les mesures les plus significatives de ce projet de loi figurent la création des groupements d’intérêt économique et environnemental et l’instauration d’un cadre juridique visant à leur reconnaissance. Ce nouvel outil visant à une triple performance économique, sociale et environnementale sera utile au développement des projets sur l’ensemble de notre territoire.

Au sujet du développement du bail environnemental, qui était l’un des objectifs du projet de loi initial, le dialogue avec le Sénat a été fructueux. Nous avons réussi à limiter les contraintes pour les agriculteurs tout en amorçant un mouvement. Toutes les dispositions visant à améliorer l’encadrement collectif pour l’organisation de notre « ferme France », les coopératives, les interprofessions, les relations fournisseurs-distributeurs, vont dans l’ensemble dans le bon sens. Elles répondent à des blocages ou à des manques, même si nous aurions probablement pu ou dû aller plus loin dans les relations commerciales avec la grande distribution.

Sur la question de la préservation du foncier agricole, cette loi sera certainement celle d’une réforme durable qui fera date. S’agissant des commissions départementales de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers – CDPENAF –, du registre de l’agriculture, du renforcement des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural – SAFER –, des mesures d’installation pour les jeunes, de la fin de l’incitation à l’agrandissement des exploitations et d’un contrôle des structures repensé, de l’introduction de la notion de compensation agricole, notamment pour les maîtres d’ouvrage des projets publics ou privés : nous nous félicitons du travail accompli.

Par ailleurs, le projet de loi initial établissait, conformément à l’engagement du Président de la République, une priorité pour la jeunesse et le renouvellement des générations. Le texte comporte de bonnes mesures même si certains de nos amendements, qui n’ont pas été adoptés, proposaient d’aller plus loin.

Je n’oublie pas la modernisation de l’enseignement agricole, notamment par l’acquisition progressive des diplômes ou la facilitation de l’accès aux études supérieures pour tous les publics et la mise en place de l’Institut agronomique, vétérinaire et forestier de France.

Enfin, la commission mixte paritaire a mis un point final au grand débat sur l’encadrement des produits phytopharmaceutiques. Il existe déjà des outils juridiques qui donnent les moyens au préfet d’édicter des règles pour limiter la dissémination vers les habitations, les cours d’eau ou les champs voisins. La commission mixte paritaire a supprimé l’exigence spécifique d’encadrement au titre des zones de traitement proches des habitations : c’est donc la rédaction plus raisonnable de l’Assemblée nationale qui a prévalu. Nous nous en félicitons car nous sommes en mesure d’exercer une surveillance efficace.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, toutes ces mesures étaient nécessaires car notre pays ne serait pas le même sans les milliers d’exploitations qui subsistent, parfois dans de grandes difficultés, en dépit du travail courageux de nos paysans. Aujourd’hui, nous le savons, le contexte est préoccupant pour les exploitants et leurs salariés, notamment dans les zones de montagne.

L’agriculture française décline de façon progressive et continue depuis environ dix à quinze ans. Aussi bien en matière de production, de surfaces cultivées, de nombre d’agriculteurs, de salariés et d’exploitations, tous les chiffres démontrent un affaissement inquiétant, même si toutes les filières ne souffrent pas de façon homogène.

Les mesures contenues dans ce projet de loi étaient nécessaires dans leur immense majorité, mais seront-elles suffisantes pour garantir le relèvement de notre agriculture ? Restons lucides, nous n’en avons pas la garantie. Les députés du groupe RRDP considèrent que nous aurions pu aller plus loin sur les sujets de la lutte contre la concurrence déloyale avec nos voisins européens, du coût du travail, des relations commerciales, de la lutte contre les contraintes administratives, de l’encouragement des jeunes et de la préservation du foncier, pour ne citer que quelques exemples qui me tiennent à coeur.

Monsieur le ministre, nous savons aussi qu’une grande partie du combat pour le redressement de l’agriculture française a lieu à Bruxelles et nous comptons sur vous pour défendre nos agriculteurs au niveau européen.

Pour conclure, je dirai que ce texte trace un chemin. Il ouvre des perspectives et des orientations que les députés du groupe RRDP approuvent et soutiennent. Dans ces conditions, monsieur le ministre, nous voterons ce projet de loi avec la conviction qu’il portera de beaux fruits et qu’il donnera de bonnes raisons d’espérer à tous nos paysans.

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