Intervention de Éric Alauzet

Séance en hémicycle du 17 septembre 2014 à 15h00
Règlement du statut des groupes parlementaires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Alauzet :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, chers collègues, comment ne pas saluer cette proposition de résolution, qui a suscité un très large consensus lors de son élaboration ?

Les écologistes soutiennent bien évidemment cette étape supplémentaire sur la voie d’une plus grande transparence financière de notre vie politique : elle vient compléter des dispositifs mis en oeuvre depuis 2012, qui vont dans ce sens. Je pense notamment à la loi de 2013 relative à la transparence de la vie publique, qui a rendu obligatoire la publicité des déclarations d’intérêts et imposé des contrôles fiscaux aux nouveaux ministres – l’actualité nous a démontré son utilité et son efficacité. Cette loi a également introduit l’interdiction d’utiliser l’indemnité représentative de frais de mandat pour financer une campagne électorale, et elle a mieux encadré les dons aux partis politiques.

Nous avons en outre assuré collectivement la transparence de la réserve parlementaire et la publicité de nos votes, et créé un registre des représentants d’intérêts présents à l’Assemblée nationale. De tout cela, nous pouvons être fiers, car en procédant à ces avancées réglementaires ou législatives, nous permettons à la France de sortir peu à peu de l’hypocrisie dans laquelle la République a trop souvent vécu, s’agissant des rapports entre la vie publique et l’argent.

Et pourtant ! Il nous faut reconnaître qu’au moment où nous nous apprêtons à procéder à cette modification utile, et même indispensable, de notre règlement, nous ne pouvons que ressentir un malaise. Ce malaise provient, à mon sens, de deux phénomènes distincts. Nous ne pouvons malheureusement pas faire grand-chose face au premier, sinon, précisément, créer des cadres aussi contraignants que possible. Je veux parler du comportement de quelques-uns, qui jettent le discrédit sur l’ensemble de celles et ceux qui s’engagent en politique : comportements personnels ahurissants de bêtise et de légèreté, dont on peine à savoir s’ils relèvent d’un sentiment d’impunité ou s’ils témoignent d’une personnalité perturbée – on l’a vu récemment avec un ministre éclair, qui ne peut, en toute lucidité, prétendre redevenir notre collègue.

Mais il s’agit aussi de comportements collectifs : je songe aux révélations proprement scandaleuses sur les pratiques d’un groupe politique au Sénat ou – disons-le sans acrimonie, mais sans hypocrisie non plus – aux dérives constatées ici, dans l’un des groupes de notre assemblée. Tout cela justifie que nous soyons aujourd’hui occupés à réformer le fonctionnement des groupes politiques à l’Assemblée nationale.

Au moins peut-on espérer que les dispositions de cette résolution apporteront des réponses utiles, grâce au cadre associatif, qui s’imposera désormais à nous, grâce au contrôle des comptes des groupes politiques, et grâce à leur publication.

Mais il est regrettable – et c’est la deuxième source du malaise que beaucoup d’entre vous partagent avec moi, j’en suis convaincu – que nous agissions toujours, sur ces questions, dans une logique du « mieux vaut tard que jamais ». En un mot, nous sommes réactifs, bien plus que proactifs. Nous répondons à des situations qui, à l’évidence, sont insupportables du point de vue de l’éthique et de la crédibilité des institutions ; situations révélées par la presse, dont il faut saluer le travail d’investigation, qui permet, peu à peu, d’améliorer nos règles.

Mais, en adoptant cette attitude défensive sur les questions de transparence, nous agissons – ou plutôt, nous réagissons – lorsque le mal est déjà fait. Je veux parler du mal éthique, du mal qui permet aux populismes de prospérer, sur le thème du « tous pourris ». C’est pourquoi, en votant cette proposition, j’en formule une autre, au nom du groupe écologiste : continuons à réfléchir et à proposer des avancées sur la question de la transparence. Saisissons-nous collectivement de ces questions et tentons d’anticiper les problèmes, plutôt que d’y remédier après coup – ou après que le scandale a éclaté.

Il existe un statut spécifique pour les partis politiques. Réfléchissons et tentons d’élaborer un statut propre aux groupes parlementaires, dans le respect des impératifs constitutionnels de liberté et d’indépendance du pouvoir législatif, certes, mais en prenant en compte le fait que le statut associatif ne suffit pas et que la certification des comptes n’est pas la panacée – on a vu des comptes de partis politiques certifiés, alors qu’ils étaient à l’évidence insincères. De même, s’agissant de notre fonctionnement personnel en tant que parlementaires, améliorons le dispositif de l’indemnité représentative de frais de mandat, l’IRFM, qui doit être exclusivement utilisée pour nous accompagner dans l’exercice de notre mission parlementaire, ce qui suppose une transparence renforcée. La transparence est l’outil principal de lutte contre les déviances.

Ce ne sont que des pistes de réflexion, mais je souhaite que nous ne les perdions pas de vue. Sachez en tout cas que les écologistes, au-delà de leur soutien au texte que nous adopterons aujourd’hui, sont disponibles pour avancer sur ces questions, en associant notamment à leurs travaux les associations citoyennes qui contribuent, par leur observation exigeante de notre fonctionnement, à faire progresser la transparence.

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