Intervention de Nicolas Sansu

Séance en hémicycle du 15 octobre 2014 à 15h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 - projet de loi de finances pour 2015 — Discussion générale commune

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Sansu :

En Allemagne, une étude indique que cette taxe permettrait de dégager un surcroît de recettes de 18 à 28 milliards d’euros.

En dépit du lobbying acharné des banques, notamment françaises, notre pays doit peser de tout son poids pour une mise en oeuvre rapide de cette taxe.

Dans ce cadre, que peuvent bien signifier les coupes drastiques dans les dépenses, si rien n’est entrepris pour mettre fin à la captation, par la sphère financière, des richesses produites ?

S’agissant de la dépense publique, il faut là aussi rappeler quelques vérités. Quand un étudiant français entre dans la vie active, il a, en moyenne, 800 euros de dettes. Son homologue américain en a, déjà, 15 000.

Les dépenses publiques et sociales nous placent face à une question de choix de société, et pas seulement face à un exercice comptable.

Je veux aussi porter le débat sur la dette. Ah qu’il est puissant pour imposer les politiques restrictives, cet argument des 2 000 milliards de dette !

Il est si puissant que, bien souvent, nous oublions ses causes ainsi que les alternatives à celle-ci. Tout fonctionne comme si les seules boussoles étaient les variables financières.

Faudra-t-il, comme me le disait un salarié, que tous les parents soient au chômage pour que nos enfants ne supportent plus de dette ?

Passons sur les causes évidentes de l’endettement : il s’agit des cadeaux fiscaux – éléments déterminants, comme l’avait souligné le rapport Carrez en 2010, du niveau de notre endettement – accordés par la droite aux grandes entreprises et aux plus riches.

Le niveau de la dette vient, aussi, de l’obligation faite aux États, depuis les années 1970 et 1980, de se financer sur les marchés.

Pourquoi refuser d’ouvrir la voie au refinancement direct des dettes souveraines par la Banque centrale européenne, au taux de 0,05 %, comme cela se pratique pour les banques privées ? Cela permettrait de dégager, a minima, 40 milliards d’euros d’économies budgétaires.

Aujourd’hui, ce sont de facto les rentiers privés de la dette publique, qui ne sont ni des anges ni des philanthropes, qui poussent à arbitrer contre les dépenses publiques et sociales !

Messieurs les ministres, si ces combats ne sont pas simples, ils restent essentiels. Il faut engager une réflexion et une action sur la dette qui sortent de la seule dictature des chiffres pour en modifier la structure.

Parce que personne, ici, ne s’accommode de la dette et des déficits, un des objectifs des amendements que les députés Front de gauche auront à défendre sera, bien sûr, de rétablir les comptes publics.

À notre sens, cela passe par une autre architecture fiscale, en vue de plus de justice, plus de progressivité et, au bout du compte, plus d’efficacité.

Avec ce projet de loi de finances, ce sont les impôts indirects, et d’abord la TVA, dont la part progresse dans les recettes de l’État. TVA et TIPP passent en effet de 51,3 % à 53,7 % du total de ces recettes.

L’impôt sur le revenu, lui, reste sous la barre des 25 % du total des recettes. Dans ce contexte, supprimer la première tranche d’imposition —pour corriger les erreurs accumulées depuis 2010 sur le bas de barème —ne peut faire illusion. Cette mesure soulagera, certes, des millions de contribuables. Mais tous les foyers déjà non imposables aujourd’hui n’en tireront aucun bénéfice, contrairement à la revalorisation des prestations et des salaires.

Surtout, ce geste fiscal ne va pas restaurer la confiance dans l’impôt. La mesure risque même de rendre plus crédible l’idée reçue selon laquelle une moitié des ménages financerait les dépenses publiques dont profiterait l’autre moitié, ainsi que le soulignait récemment le leader de la CFDT.

Rien n’est prévu pour le haut du barème, qui doit également être traité, ou pour introduire plus de justice dans la fiscalité du patrimoine, toujours plus concentré dans les mains d’une infime minorité.

Enfin, l’effondrement de l’impôt sur les sociétés, qui passe de plus de 47 milliards en 2013 à 33 milliards en 2015, est le signe d’une politique de l’offre complètement aveugle.

Nous avons quand même réussi l’exploit de cumuler un taux d’impôt sur les sociétés extrêmement conséquent et un produit très faible !

Si vous cherchez des économies, supprimez le CICE et privilégiez les dépenses d’intervention qui permettent de cibler les aides en soutenant, notamment, les investissements essentiels pour la culture, les transports, l’écologie et la transition écologique !

Comment accepter que les banques et les compagnies d’assurance continuent de bénéficier du CICE à hauteur de 280 millions d’euros cette année, et de près d’un milliard par an en rythme de croisière ?

Ce gaspillage de la ressource publique contribue à défaire les services et à déprimer l’investissement publics.

Le soutien à l’investissement public demeure une priorité affichée du Gouvernement, mais tous ses actes le contredisent !

Qu’il s’agisse de la baisse des dotations aux collectivités locales, de la ponction sur les recettes des agences de l’eau, ou de l’effondrement du montant affectés aux contrats de plan État-régions, les choix affichés dans ce projet de loi seront dramatiques pour l’investissement public. Ils le seront également, par ricochet, pour l’emploi, notamment dans le secteur des bâtiments et travaux publics qui doit assurer la transition énergétique.

Certes, avec le CICE, les marges des entreprises de ce secteur se sont un peu améliorées, mais leurs carnets de commandes sont vides pour l’année prochaine. En clair, comme me l’a dit le patron d’une entreprise, grâce au CICE, certaines entreprises du BTP vont pouvoir mourir en bonne santé…

C’est particulièrement le cas dans les territoires fragiles comme celui dont je suis élu, que vous connaissez particulièrement, monsieur le ministre.

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