Intervention de Gilles Carrez

Séance en hémicycle du 16 octobre 2014 à 9h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 - projet de loi de finances pour 2015 — Article 2

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilles Carrez, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire :

Ma première observation prendra la forme d’une question à vous adressée, monsieur le secrétaire d’État. On observe en matière d’impôt sur le revenu un phénomène nouveau. Depuis trois ans, faiblement en 2012, à hauteur de moins d’un milliard d’euros, puis de façon très importante en 2013 et plus encore en 2014, le rendement est très inférieur à la prévision. On constate un écart d’un milliard d’euros en 2012, cinq milliards en 2013 et au moins 5,5 milliards en 2014. Il s’agit d’un phénomène tout à fait nouveau sur les raisons duquel il faut absolument s’interroger. L’une d’entre elles, et je m’adresse ici à M. Sansu, est à mon avis l’hyperconcentration de l’impôt sur le revenu, très bien expliquée dans le rapport de Dominique Lefebvre. En effet, 1 % des ménages, soit 370 000 foyers fiscaux, acquittent aujourd’hui 32 % de l’impôt sur le revenu, soit une concentration importante.

J’attire votre attention sur le taux marginal, monsieur Sansu. Le taux marginal pour les revenus très élevés, constitués avant tout de revenus du patrimoine, est de 45 % augmenté de 4 % de contribution exceptionnelle et de 15,5 % de prélèvements sociaux, soit en tout 65 %. J’ai le sentiment, et je ne suis pas le seul, que nous assistons à des modifications de comportement des quelques milliers de contribuables situés tout en haut du barème. Deux signaux incitent à le penser. Les délocalisations de contribuables dont les revenus sont supérieurs à 300 000 euros par an ont doublé en 2012 par rapport à 2011, passant d’un peu moins de 300 à 450. En outre, la chute des recettes fiscales est plus importante sur les bénéfices non commerciaux, les produits financiers et les BIC, ce qui laisse penser que des revenus restent dans l’entreprise ou que des adaptations de comportement ont lieu.

Quand le phénomène prend de telles proportions et se chiffre en milliards, il doit absolument être étudié. Je vous demande donc très précisément la chose suivante, monsieur le secrétaire d’État : menons dès le mois d’avril, sur la base de l’amendement déposé en loi de finances rectificative au mois de décembre 2012 dont Eric Woerth se souvient très bien car nous l’avions défendu ensemble, l’analyse précise des départs et des retours de contribuables en 2013 à partir de l’ISF, de l’exit tax et de l’impôt sur le revenu. Nous ne pouvons pas attendre le mois de septembre 2015 pour étudier le phénomène ! Il serait par ailleurs souhaitable d’obtenir une analyse précise par types de revenu afin de comprendre le phénomène affectant les BIC et les BNC. Nous ne pouvons demeurer dans le déni ! Il s’agit de cinq ou six milliards d’euros ! J’attire votre attention sur ceci, monsieur Sansu : ce qu’on ne trouve pas dans le haut du barème de l’impôt sur le revenu, on le récupère grâce à la taxe sur le gazole ! Voilà comment fonctionnent les recettes fiscales de l’État !

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