Intervention de Général André Soubirou

Réunion du 15 octobre 2014 à 17h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Général André Soubirou, président de l'Association nationale des participants aux opérations extérieures (ANOPEX :

Notre association n'est née qu'il y a quatre ans, mais elle tend à fédérer l'ensemble des participants aux opérations extérieures, qu'ils soient soldats en activité ou anciens combattants. M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense, vient d'annoncer les points d'applications de la suppression des 7 500 emplois prévue par la loi de programmation militaire. Permettez-moi de partager avec vous tous une pensée pour les militaires, leurs familles et leurs proches qui sont affectés par ce nouveau bouleversement.

La mémoire est le deuxième objectif du programme 167 ; nous sommes solidaires des générations extérieures et considérons que les célébrations du début de la Première et de la fin de la Deuxième Guerre mondiales sont positives, mais nous regrettons que ce programme, doté de 22 millions d'euros, ne fasse pas de place aux opérations extérieures. Nous déplorons ainsi le silence du programme sur les crédits alloués à la réalisation du monument aux morts en opérations extérieures. Sans multiplier les cérémonies commémoratives, nous ne comprenons pas l'impasse sur le vingtième anniversaire du traité de Paris, signé en décembre 1995, qui a marqué la conclusion de la négociation de Dayton qui mettait fin au conflit en Bosnie-Herzégovine. Or la France avait joué un rôle majeur dans les opérations militaires comme dans les actions diplomatiques. Une telle commémoration, peu onéreuse, aurait du sens à un moment où le séparatisme par la force ressurgit en Europe.

En ce qui concerne le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » le PLF pour 2015 ne procède à aucune remise en cause de droits, contrairement à l'année dernière pour la retraite mutualiste. Hormis l'avancée sur la carte de combattant pour les OPEX, dont nous nous réjouissons, ce budget se contente de maintenir les options engagées. Nous demandions depuis plusieurs années l'octroi de cette carte ; cette reconnaissance de la nouvelle génération du feu fera entrer les anciens des OPEX dans la famille des combattants, alors qu'ils étaient considérés comme des soldats de deuxième catégorie jusqu'à aujourd'hui. Cette dépense s'inscrit dans un cadre budgétaire contraint, mais sera engagée à un moment où le nombre des bénéficiaires des pensions militaires diminue nettement. Mesdames et messieurs les députés, les soldats des OPEX défendent l'honneur de la France et la sécurité collective de nos concitoyens les armes à la main et sans compter leurs efforts au péril de leur vie : ne les oubliez pas au moment du vote du budget !

Cette avancée s'opère en même temps que la mise en cause du droit à reconnaissance et à réparation, qui induit des effets néfastes pour le moral et le recrutement des soldats. Ainsi, le récent rapport du sénateur M. Philippe Marini, inspecteur des finances honoraire et en cela peut-être influencé par la doctrine de l'administration de Bercy, a jeté un trouble dans le monde combattant. En effet, il suggère que le droit à reconnaissance et à réparation a perdu de son sens, maintenant que la fonction militaire est un métier, et qu'il n'y a plus de conscription. Les blessures et la mort, dans ce raisonnement, ne sont plus que des risques du métier, et les militaires ne souffrent plus que d'accidents du travail ne nécessitant pas de code spécifique. M. Marini n'est, hélas, pas le seul à défendre une telle conception. Si l'on appliquait aux militaires en opération, au nom de l'effort de redressement des finances publiques, la norme du droit du travail, on nierait la nature spécifique de leur engagement, eux qui risquent leur vie pour servir la France. La mise en danger délibérée, décidée par les autorités politiques qui les envoient sur le champ de bataille, méconnaît le principe de précaution cher à beaucoup de nos concitoyens. Cette nature d'une mission à remplir quel qu'en soit le prix ne dépend pas des voies de recrutement des soldats. La génération OPEX comprend bien que le statut actuel perdurera tant que les gros bataillons des anciens combattants d'Algérie vivront encore, mais qu'on le menacera après. On ne peut pas à la fois envoyer des soldats en OPEX depuis 50 ans et chercher à réduire leurs droits à reconnaissance et à réparation. Mesdames et messieurs les députés, je suis persuadé que vous serez vigilants pour préserver le respect dû au monde combattant et aux soldats de notre armée, car il en va de l'intérêt de notre cher et vieux pays.

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